Objectifs pédagogiques

  • Diagnostiquer une anomalie de la vision d'apparition brutale.
  • Identifier les situations d'urgence et planifier leur prise en charge.

Hiérarchisation des connaissances

I. Pour comprendre

  • Un trouble brutal de la vision se manifeste généralement par une cécité ou une vision floue, mais peut parfois se présenter sur un mode plus atypique : phosphènes, déformation des images, éblouissement.
  •  Dans la grande majorité des cas, il résulte d'une atteinte du système visuel, depuis le globe oculaire jusqu'au cortex occipital. Plus rarement, en cas de vision floue, il peut relever d'une atteinte des voies oculomotrices, de type parésie ou nystagmus.
  • Un trouble visuel monoculaire relève d'une atteinte du globe oculaire ou du nerf optique. L'examen ophtalmologique constitue le premier temps fondamental pour en identifier l'étiologie. Un trouble visuel binoculaire relève le plus souvent d'une atteinte cérébrale.
  • Les causes d'un trouble brutal de la vision sont nombreuses et de gravité variable. La démarche diagnostique repose sur l'interrogatoire, l'examen ophtalmologique et neurologique.

 Le caractère brutal du trouble visuel, qu'il soit transitoire ou constitué, évoque un mécanisme vasculaire ischémique. Le modèle en est la cécité monoculaire transitoire (amaurose fugace). Une prise en charge urgente est nécessaire pour en identifier la cause et débuter un traitement de prévention secondaire.
Les deux autres principales urgences en pathologie ophtalmologique sont le décollement de rétine et la crise de glaucome aiguë de fermeture de l'angle irido-cornéen
L'aura visuelle de la migraine est le plus fréquent des troubles visuels de cause cérébrale.

II. Conditions générales du diagnostic

A. Interrogatoire

1. Type du trouble visuel

  •  Baisse de la vue, du simple flou à la cécité, intéressant tout ou partie du champ de vision.
  • Autres manifestations : phosphènes (taches lumineuses, éclairs), photophobie (intolérance à la luminosité), déformations de la perception (métamorphopsies : lignes droites perçues comme ondulées ; dyschromatopsie : trouble de la perception des couleurs), diplopie (vision double), hallucinations élaborées.

2. Modalités d'installation

  • Installation brutale (d'une seconde à l'autre) ou progressive.
  • Caractère permanent ou régressif du déficit.
  • Durée.
  • Existence d'épisodes antérieurs du même type.

3. Caractère monoculaire ou binoculaire

  • Un trouble visuel monoculaire implique une atteinte de l'œil ou du nerf optique.
  • Un trouble visuel binoculaire correspond généralement à une atteinte du chiasma ou des voies visuelles rétrochiasmatiques, plus rarement à une atteinte bilatérale de l'œil ou du nerf optique.
  • L'occlusion successive de chaque oeil est la seule manière simple d'affirmer le caractère monoculaire ou binoculaire du trouble. Si le trouble visuel a disparu, il est donc fondamental de demander au patient s'il avait effectué un test d'occlusion alternée de chaque oeil. Si la vision est décrite comme floue mais uniquement en condition binoculaire, il s'agit vraisemblablement d'une atteinte oculomotrice (forme fruste de diplopie, cf. chapitre 12).

4. Présence d'une douleur associée

  •  Type et localisation de la douleur (oculaire, orbitaire, céphalées, cervicalgies).

5. Contexte

  • Circonstances de survenue (traumatisme, position de la tête, activité physique, chaleur ambiante).
  • Antécédents ophtalmologiques.
  • Âge
  • Facteurs de risque vasculaire.

B. Examen physique

1. Examen ophtalmologique

 Il est du ressort de l'ophtalmologiste, même si la détection d'un œil rouge, d'une exophtalmie, d'une inégalité pupillaire, d'une amputation du champ de vision, d'une limitation des mouvements oculaires relève de tout examen médical.
Il précise en particulier :

  • la valeur de l'acuité visuelle, de loin et de près, avec correction optique si nécessaire ; chez les patients présentant une acuité visuelle effondrée, on peut évaluer la distance pour compter les doigts ou la persistance d'une perception lumineuse ;
  • la réactivité pupillaire : réflexe photomoteur direct et réflexe photomoteur consensuel à l'éclairement de l'oeil controlatéral ;
  •  l'examen du globe oculaire et de ses annexes au biomicroscope (lampe à fente) : paupières (corps étranger), conjonctive (hyperhémie), cornée (kératite, plaie), chambre antérieure (tyndall), iris (état et motilité des pupilles), cristallin (cataracte) ;
  • l'examen du fond d'oeil après dilatation pupillaire, sauf en cas de glaucome aigu par fermeture de l'angle :  vitré (hémorragie), rétine (décollement), vaisseaux (occlusion), macula (oedème), papille (oedème) ;
  • la mesure du tonus oculaire (glaucome).
  • le champ visuel de chaque oeil ; au lit du patient, le champ visuel peut être évalué par un examen aux doigts (champ visuel par confrontation).

2. Examen neurologique

  • Étude de l'oculomotricité (paralysies, nystagmus).
  • Recherche de signes associés de localisation neurologique (syndrome pyramidal, trouble de la reconnaissance visuelle, de la mémoire, de la lecture, du langage, etc.).

3. Examen cardiovasculaire

  • Pression artérielle.
  • Fréquence cardiaque.
  • Palpation des pouls temporaux.
  • Auscultation cardiaque et des artères carotides.

C. Examens complémentaires

 Les examens complémentaires sont orientés par l'interrogatoire et l'examen physique et peuvent comporter, selon la topographie lésionnelle présumée et les hypothèses diagnostiques :

  • suspicion d'atteinte oculaire : échographie orbitaire en mode B (hémorragie du vitré empêchant la visualisation du fond d'oeil), tomographie en cohérence optique (OCT), angiographie rétinienne à la fluorescéine… ;
  • suspicion d'atteinte des nerfs optiques : potentiels évoqués visuels, IRM des nerfs optiques… ;
  • suspicion d'atteinte chiasmatique ou rétrochiasmatique : IRM cérébrale ou, à défaut, scanner ; enregistrement du champ visuel ;
  • mécanisme vasculaire : écho-doppler des troncs supra-aortiques, échocardiographie, holter-ECG, bilan biologique (évaluation d'une anomalie lipidique, recherche d'un diabète)… ;
  • mécanisme inflammatoire : VS, ponction lombaire…

III. Raisonnement diagnostique

 Le raisonnement diagnostique repose sur l'identification et la caractérisation du trouble visuel, l'établissement d'hypothèses concernant la topographie de l'atteinte, du mécanisme et, enfin, de la cause sous-jacente (figure 2.1). La première étape consiste à déterminer si l'atteinte visuelle est monoculaire ou binoculaire, ce qui ne peut parfois pas être déterminé avec certitude si les troubles ont déjà régressé sans que le patient n'ait réalisé de test d'occlusion alternée des yeux.

Fig. 2.1.  Arbre diagnostique devant une anomalie de la vision d'apparition brutale.
AIT, accident ischémique transitoire; HLH, hémianopsie latérale homonyme; QLH, quadranopsie latérale homo- nyme; HTIC, hypertension intracrânienne; SEP, sclérose en plaques; OACR, occlusion de l'artère centrale de la rétine; OVCR, occlusion de la veine centrale de la rétine; NOIAA, neuropathie optique ischémique antérieure aiguë; NORB, névrite optique rétrobulbaire; DMLA, dégénérescence maculaire liée à l'âge; PRES, syndrome d'encéphalopathie postérieure réversible.
(Source : CEN, 2019.)

IV. Atteinte visuelle monoculaire

Un trouble visuel monoculaire signe une atteinte préchiasmatique (œil ou nerf optique, figure2.2). La démarche repose avant tout sur l'examen oculaire, la recherche d'un déficit pupillaire afférent relatif (qui évoque alors une atteinte du nerf optique si la rétine est normale, cf. encadré infra), et le fond d'œil (œdème ou hémorragies de la papille, pâleur ou occlusion vasculaire de la rétine).
On distingue schématiquement les troubles visuels monoculaires transitoires, qui ont le plus souvent régressé au moment de l'examen clinique initial, et les troubles persistants, parfois appelés constitués (figure 2.1).

A. Atteinte visuelle monoculaire transitoire

1. Cécité monoculaire transitoire (amaurose fugace)

  • Clinique :
    • déficit brutal de la vision, d'évolution habituellement régressive en moins de 10 minutes (accident ischémique transitoire-AIT- rétinien);
    • les symptômes peuvent être à type de cécité totale, simple flou visuel, amputation du champ de vision de l'œil concerné;
    •  le plus souvent isolée, elle peut s'associer à des signes neurologiques controlatéraux en cas d'ischémie hémisphérique concomitante (par exemple, syndrome opticopyramidal : cécité monoculaire transitoire du côté de la lésion et hémiparésie controlatérale).
  • Mécanisme : généralement embolique; la mise en évidence d'emboles de cholestérol au niveau des bifurcations artérielles à l'examen du fond d'œil est rare, mais pathognomonique (figure 2.3).
     Il s'agit d'une urgence diagnostique en raison du risque de survenue d'un accident ischémique constitué de la rétine (occlusion de l'artère centrale ou de ses branches), ou même d'infarctus cérébral.

 

Fig. 2.2. Localisation de la lésion en fonction de l'atteinte du champ visuel.

A. Scotome central de l'oeil gauche par atteinte du faisceau maculaire de l'oeil gauche.
B. Cécité unilatérale gauche totale par lésion complète du nerf optique gauche.
C. Hémianopsie latérale droite de l'oeil gauche par compression latérale du chiasma.
D. Hémianopsie bitemporale par lésion chiasmatique.
E. Hémianopsie latérale homonyme droite par atteinte de la bandelette optique gauche.
F. Quadranopsie latérale homonyme droite supérieure par atteinte des radiations optiques gauches inférieures.
G. Quadranopsie latérale homonyme droite inférieure par atteinte des radiations optiques gauches supérieures.
H. Hémianopsie latérale homonyme droite par atteinte du cortex occipital gauche.
(Ce que le patient ne voit pas est représenté en noir.) (Source : CEN, 2019, illustration de Carole Fumat.)

Fig. 2.3.  Cécité monoculaire transitoire d'origine embolique (amaurose fugace).
A. Embole de cholestérol visible au fond d'œil. B. Sténose athéromateuse serrée de l'artère carotide interne au cou en angioscanner.
(Source : CEN, 2019.)

  • Causes :
    • sténose ou occlusion carotidienne athéromateuse, qui peuvent être responsables d'épisodes répétitifs de cécité monoculaire transitoire homolatérale; il y a indication à un examen des vaisseaux du cou en urgence (écho-doppler, angio-IRM ou angioscanner) ;
    • après 50 ans, il faut systématiquement évoquer une maladie de Horton et faire pratiquer en urgence VS et CRP;
    •  la cécité monoculaire transitoire peut relever d'une origine cardioembolique, justifiant la réalisation d'un bilan complémentaire (ECG, échocardiographie, holter-ECG).

2. Œdème papillaire de stase par hypertension intracrânienne (HTIC) (figure 2.4)

  • Clinique :
    • éclipses visuelles à type de flou visuel uni- ou bilatéral, durant quelques secondes, sur venant lors des changements de position;
    • les autres signes d'HTIC sont habituellement associés.
  • Imagerie cérébrale à réaliser en urgence.
  •  Causes variées : tumeur cérébrale, hémorragie cérébrale ou méningée, méningite, thrombose veineuse cérébrale, formes idiopathiques d'HTIC chez la femme jeune et obèse.

3. Phénomène d'Uhthoff

  • Clinique : flou visuel durant quelques minutes, survenant lors de l'effort physique ou de l'exposition à la chaleur.
  • Mécanisme et causes : traduit une séquelle de neuropathie optique, le plus souvent inflammatoire (sclérose en plaques-SEP-).

Fig. 2.4.  Œdème papillaire de stase.
(Source : CEN, 2019.)

4. Crise aiguë de fermeture de l'angle irido-cornéen

  •  Clinique : cause trompeuse d'amaurose transitoire lorsqu'elle ne s'accompagne pas de douleurs.
  • Facteur favorisant classique : hypermétropie, médicament atropinique.

B. Atteinte visuelle monoculaire persistante

1. Œil rouge douloureux

  • Cette situation correspond à une urgence ophtalmologique.
  • Causes à évoquer : crise aiguë de fermeture de l'angle irido-cornéen,  glaucome néovasculaire, uvéite antérieure aiguë, kératite aiguë (notamment herpétique), traumatisme oculaire (plaie cornéenne), endophtalmie (contexte post-opératoire).

2. Œil blanc

a. Atteintes vasculaires (rétine, nerf optique)

Occlusion de l'artère centrale de la rétine (OACR)

  • Clinique : déficit visuel massif et indolore.
  • Fond d'œil caractéristique : artères grêles, rétine diffusément pâle sauf dans la région maculaire, d'aspect rouge cerise.
  • Causes : athérome carotidien, cardiopathie emboligène, maladie de Horton (à évoquer systématiquement).

Occlusion de la veine centrale de la rétine (OVCR)

  • Clinique : baisse visuelle rapidement progressive, indolore.
  • Fond d'œil caractéristique : hémorragies rétiniennes, veines dilatées, œdème papillaire.
  • Causes : athérosclérose, plus rarement syndrome d'hyperviscosité.

Neuropathie optique ischémique antérieure aiguë (NOIA)
Cf. infra Neuropathies optiques.

b. Neuropathies optiques

Devant une baisse d'acuité visuelle unilatérale non expliquée par les anomalies du fond d'œil, la présence d'un déficit pupillaire afférent relatif est un signe sensible et spécifique de neuropathie optique unilatérale (cf. encadré ci-dessous).

Neuropathie optique ischémique antérieure aiguë (NOIA)

  • Clinique :
    • déficit visuel brutal et indolore, souvent au réveil, de sévérité variable ;
    • amputation altitudinale du champ visuel caractéristique (figure 2.5) ;
    • déficit pupillaire afférent relatif constant si elle est unilatérale (cf. encadré supra).
  • Fond d'œil : œdème papillaire, hémorragies papillaires.
  • Mécanisme : ischémie aiguë de la tête du nerf optique par occlusion dans le territoire des artères ciliaires postérieures (branches de l'artère ophtalmique).
  • Causes : dans 90 % des cas, la NOIA relève de la maladie athéromateuse (présence de facteurs de risque vasculaire) et, dans 10 % des cas, d'une maladie de Horton où un traitement corticoïde précoce empêche alors la bilatéralisation du déficit visuel.

 

Fig 2.5.  Amputation altitudinale inférieure du champ visuel de l'œil gauche secondaire à une neuropathie optique ischémique antérieure aiguë (examen du champ visuel automatisé).
(Source : CEN, 2019.)

Neuropathie inflammatoire (névrite optique)

  • Clinique :
    • baisse d'acuité visuelle monoculaire douloureuse s'installant en quelques heures ou jours ;
    • chez l'adulte jeune;
    • un déficit pupillaire afférent relatif est quasiment constant si elle est unilatérale (souvent seul signe d'examen objectif au stade initial).
  • Fond d'œil : papille normale (70 % des cas : névrite optique rétrobulbaire, NORB) ou modérément œdémateuse (30 % des cas : névrite optique antérieure).
  • Champ visuel : déficit le plus souvent central ou diffus.
  • Les potentiels évoqués visuels (allongement de l'onde P100) et/ou l'IRM orbitaire (hypersignal et prise de contraste du nerf optique) confirment le diagnostic.
  • Causes :
    • SEP : une névrite optique isolée évolue dans la moitié des cas vers une SEP (cf. chapitre 14) ;
    • neuromyélite optique ;
    • causes infectieuses (Lyme, Syphilis, Bartonellose, VIH).
  • Récupération spontanée dans plus de 90 % des cas dans les névrites optiques idiopathiques ou associés à la SEP.

c. Atteintes du segment postérieur de l'œil
  •  Ces affections sont détaillées dans le référentiel du Collège des ophtalmologistes universitaires de France.
  • Causes à évoquer :
    • décollement de rétine (phosphènes et flou visuel d'apparition brutale ; le fond d'œil fait le diagnostic, permettant un traitement en urgence) ;
    • décollement du vitré (myodésopsies);
    • hémorragie intravitréenne ;
    • atteinte maculaire (dégénérescence maculaire liée à l'âge...).

V. Atteinte visuelle binoculaire

A. Atteinte visuelle binoculaire transitoire

1. Migraine avec aura visuelle

  •  Clinique:
    • flou visuel avec scotome scintillant, qui s'étend en quelques minutes du centre vers la périphérie (ou inversement), en affectant l'un des deux hémichamps homonymes (hémianopsie latérale homonyme) ou l'ensemble du champ visuel (flou visuel global) ;
    • l'évolution est régressive en 15 à 20 minutes, laissant la place à une céphalée pulsatile, volontiers hémicrânienne et controlatérale;
    • le caractère récidivant des épisodes depuis l'enfance ou l'adolescence, la normalité de l'examen neurologique et ophtalmologique après la crise sont nécessaires au diagnostic ;
    • parfois, le scotome scintillant est isolé, sans céphalée.
  •  Imagerie cérébrale indiquée en cas d'atypies (âge tardif de début, durée, fréquence et chronologie des crises).

2. Accident ischémique transitoire

  • Souvent dans le territoire vertébrobasilaire, plus rarement dans le territoire sylvien superficiel.
  •  Clinique:
    •  hémianopsie ou quadranopsie latérale homonyme le plus souvent (figure 2.2) ;
  •  Imagerie cérébrale et des artères cervicales et intracrâniennes à réaliser en urgence.

3. Crise épileptique focale

  •  Clinique:
    • trouble visuel paroxystique durant quelques secondes;
    • une altération partielle ou totale de la conscience et d'autres manifestations cliniques peuvent faire suite au trouble de vision, selon que la crise demeure partielle ou se généralise.
  • EEG et imagerie cérébrale à réaliser.

4. Hypertension intracrânienne

  • Clinique : outre les épisodes transitoires d'éclipses visuelles décrits au début de ce chapitre, l'HTIC peut être responsable d'un flou visuel persistant. Une diplopie binoculaire peut sur- venir par paralysie du VIe nerf crânien.
  • Fond d'œil : œdème papillaire bilatéral de stase.
  • Imagerie cérébrale à réaliser en urgence.

B. Atteinte visuelle binoculaire persistante

 Devant une atteinte visuelle binoculaire persistante au moment de l'examen clinique initial, l'évaluation de la vision œil par œil et celle du champ visuel sont essentielles pour définir la localisation lésionnelle (figure 2.2) :  rétrochiasmatique le plus souvent, plus rarement préchiasmatique bilatérale, chiasmatique, voire supracorticale.

1. Atteinte oculomotrice

  •  Clinique:
    • il ne s'agit pas d'une baisse d'acuité visuelle mais d'une diplopie, parfois perçue comme un flou visuel dans les formes frustes ;
    • le diagnostic est affirmé par le fait que le trouble visuel disparaît lorsque la vision se fait œil par œil (cf. chapitre 12);
    • si l'examen oculomoteur ne permet pas de localiser le déficit musculaire, le bilan orthoptique et l'examen coordimétrique permettent de préciser le déficit et de guider l'imagerie.
  • Imagerie orbitaire et cérébrale à réaliser en urgence (ne pas méconnaître un accident vasculaire cérébral – AVC – du tronc cérébral).

2. Atteinte rétrochiasmatique

  •  Clinique (figure 2.2) :
    • hémianopsie latérale homonyme (HLH, figure 2.6) ou quadranopsie latérale homonyme (QLH) controlatérales à la lésion cérébrale, plus rarement cécité corticale (HLH bilatérale associée à une conservation du réflexe photomoteur) ;
    • acuité visuelle conservée en cas d'HLH ou de QLH.
  • Fond d'œil normal.
  •  Imagerie cérébrale à réaliser en urgence.

Fig. 2.6.  Hémianopsie latérale homonyme droite (examen du champ visuel automatisé).
(Source : CEN, 2019.)

  •  Causes:
    • infarctus cérébral (artère cérébrale postérieure, plus rarement artère cérébrale moyenne) ;
    • hématome intraparenchymateux;
    • une atteinte bilatérale est nécessaire pour la cécité corticale (accident vasculaire cérébral).

3. Atteinte préchiasmatique bilatérale simultanée

  • Situation moins fréquente.
  • Importance du fond d'œil.

4. Atteinte chiasmatique

  • Rarement brutale.
  • Clinique : céphalée en «coup de tonnerre», hémianopsie bitemporale (figure 2.2).
  • Imagerie cérébrale à réaliser en urgence.
  • Cause : adénome hypophysaire compliqué d'une apoplexie pituitaire.

5. Atteinte fonctionnelle (psychogène)

Elle est à évoquer devant une cécité bilatérale ou un rétrécissement concentrique du champ visuel en l'absence d'anomalie de l'examen clinique et des examens complémentaires (OCT, IRM, ERG, PEV). Une grande prudence est de mise : il doit s'agir d'un diagnostic d'élimination.