Objectifs pédagogiques 12 (connaissances de rang A)

  • Évaluer une déficience cognitive : principe d'évaluation, échelles et exemples d'une déficience cognitive.
  • Connaître la définition des principales fonctions cognitives : attention, mémoire, langage, praxies, gnosies, fonctions exécutives et comportementales.
  • Savoir évaluer la mémoire : MMS, 5 mots.
  • Connaître les différents temps de l'évaluation du langage : évaluation de l'expression spontanée, dénomination, répétition, compréhension, lecture, écriture.
  • Savoir reconnaître une négligence spatiale unilatérale.

Hiérarchisation des connaissances


Appliqué aux fonctions cognitives, un processus pathologique entraîne une déficience13 (déficit) qui correspond aux symptômes (une aphasie, une apraxie, par exemple). L'évaluation cognitive explore schématiquement des domaines cognitifs distincts (attention, fonctions exécutives, mémoire, langage, praxies, capacités visuospatiales, gnosies). Elle repose sur l'utilisation d'images, de dessins, de listes de mots et de phrases, et de questionnaires globaux ou spécifiques (cf. annexes 21.1 à 21.6). Son interprétation doit tenir compte de divers facteurs, notamment socio-éducatifs, culturels et motivationnels. Elle peut être limitée par la présence de troubles de l'attention, du langage ou du comportement. 
Une limitation d'activité (anciennement : incapacité) traduit la conséquence fonctionnelle dans une situation spécifique (par exemple, conduire, téléphoner, s'habiller).
La restriction de participation (anciennement : handicap) exprime le retentissement dans la vie sociale (perte du statut professionnel, modification des relations familiales, dépendance pour la conduite automobile, etc.).


I. Anamnèse

 Lors de l'évaluation, un temps important est dévolu à l'interrogatoire du patient et de son entourage. L'évaluation, menée avec tact, est adaptée :

  • à la situation médicale : épisode aigu, diagnostic initial ou bilan évolutif d'une pathologie chronique connue;
  • à la plainte : une évaluation trop difficile met inutilement le patient en échec; trop facile, elle sous-estime une difficulté débutante;
  • au contexte social et culturel.

La première étape est la reconstitution de l'histoire clinique, afin de préciser :

  • la nature des premiers symptômes (par exemple, un trouble de la mémoire ou du langage) ; leurs modalités d'installation (brutale ou insidieuse) et d'évolution (rapide ou lente, progressive, par paliers, ou fluctuante);
  • l'existence de signes d'accompagnement somatiques, neurologiques et extra-neurologiques ;
  • l'existence de modifications comportementales;
  • le traitement suivi, les modifications thérapeutiques récentes ;
  • les antécédents personnels et familiaux;
  • les limitations fonctionnelles (incapacités/limitations d'activité), sociales et professionnelles (handicap/restriction de participation).

13La distinction des trois niveaux (déficience, incapacité, handicap) correspond à celle établie par l'OMS (1988). Dans la classification de 2001, la notion d'incapacité fait place à celle de limitation d'activité, et celle de handicap à celle de restriction de participation.

II. Attention

A. Définition

C'est la fonction qui permet la sélection et le maintien d'une information dans le champ de la conscience. Les troubles de l'attention constituent un motif fréquent de consultation, car ils sont susceptibles d'infléchir les performances dans divers domaines cognitifs (par exemple, la mémorisation d'information ou la réalisation de tâches complexes dans son quotidien).

B. Évaluation

L'attention s'évalue par des épreuves simples, qui imposent au patient de produire et maintenir un effort cognitif, telles que l'énumération des mois de l'année (à l'endroit puis à rebours), l'épellation orale de mots, le comptage à rebours de 20 à 0, la soustraction de 7 en 7 à partir de 100.

III. Mémoire

A. Définitions

1. Mémoire à court terme, mémoire de travail

  • La mémoire à court terme est une mémoire de stockage bref des informations et de capacité limitée (par exemple, retenir un numéro de téléphone avant de le noter).
  • La mémoire de travail correspond à la capacité à manipuler les informations maintenues en mémoire à court terme.

2. Mémoire à long terme

La mémoire à long terme est une mémoire dont la capacité est en théorie illimitée, qui se divise en deux composantes :

  • la mémoire non déclarative, dont la mémoire procédurale, qui engage des processus inconscients (implicites); c'est la mémoire du «savoir-faire» : un exemple est la mémoire des habiletés motrices (faire du vélo, jouer d'un instrument de musique); en pratique cli- nique courante, la mémoire procédurale n'est pas évaluée ;
  • la mémoire déclarative, qui engage des processus d'accès conscient (explicites) à l'information et qui comprend :
    • la mémoire épisodique se référant à des expériences s'intégrant dans un contexte spatial, temporel et affectif particulier (mémoire du «Où? Quand? Comment?»; par exemple, un repas d'anniversaire qui a eu lieu avec tels protagonistes, à telle date et à tel endroit);
    • la mémoire sémantique se référant à des faits, des savoirs (mémoire du « Quoi ? » ; par exemple, la Manche est un nom de mer, le kangourou est un animal vivant en Australie, etc.) connus de la majorité ou partagés par un groupe culturel (profession, loisirs, religion, etc.).

3. Amnésie rétrograde et antérograde

Une amnésie est rétrograde quand elle concerne des informations acquises avant l'événement causal (par exemple, un traumatisme crânien, un AVC) et antérograde quand elle concerne l'acquisition et la restitution d'informations acquises depuis cet événement.

B. Évaluation

1. Interrogatoire

L'interrogatoire évalue les plaintes et le retentissement des troubles, ainsi que différents domaines de la mémoire rétrograde, par l'évocation d'informations personnelles datées et localisées (mémoire épisodique) et de connaissances (mémoire sémantique) :

  •  mémoire autobiographique :
    • mémoire des événements personnels : voyages, événements marquants récents,
    • chronologie des lieux d'habitation, des emplois, histoire familiale (prénoms et noms des apparentés), dates et lieux d'événements importants (mariage, naissances, voyages) ;
  • mémoire sémantique : connaissances générales selon le contexte culturel du sujet (par exemple : « Quelle est la capitale de l'Italie ? », « Quel est le sens du mot igloo ? ») ; connaissances acquises en fonction du métier, des intérêts (par exemple, les noms des outils utilisés par un mécanicien, les ingrédients d'une recette utilisés par une cuisinière) ; mémoire chronologique publique (par exemple, la succession des présidents de la République, des maires de la ville, d'événements sportifs ou culturels) ;
  • mémoire de l'actualité récente (événements relatés dans les médias).

2. Évaluation de la mémoire antérograde14

a. Principes généraux
  •  Schématiquement, la mémorisation à long terme d'une information perçue engage successivement l'encodage, puis le stockage en mémoire, pour pouvoir être ultérieurement évoquée par le rappel ou la reconnaissance.
  • Le rappel immédiat permet de s'assurer que l'information a été correctement encodée (par exemple, trois mots «pomme», «bus», «tabouret»).
  • Le rappel différé (après quelques minutes) évalue les capacités de stockage et de récupération de l'information.
  • Les rappels peuvent être facilités par un indice (par exemple, «Un moyen de transport?») ou par la reconnaissance, qui consiste à identifier l'information apprise au sein d'une liste à choix multiples (par exemple, «voiture, train, vélo, bus»).

b. Évaluation de la mémoire antérograde verbale
  • Énoncer une liste de mots à voix haute, les faire rappeler immédiatement (encodage) puis après une tâche interférente (par exemple, test des trois mots du Mini Mental State, cf. annexe 21.2).

14 En pratique, l'évaluation porte essentiellement sur la mémoire à long terme, l'examen de la mémoire à court terme et de la mémoire de travail relevant de l'évaluation neuropsychologique.

  • Présenter une liste de mots sur une entrée visuelle, puis tester les rappels libre et indicé (par exemple, test des cinq mots, cf. annexe 21.3)15.
c. Évaluation de la mémoire antérograde visuelle (non verbale)
  • Faire dénommer des images, puis tester le rappel et la reconnaissance.
  • Copier trois dessins sans signification, puis tester le rappel et la reconnaissance.

C. Anatomie

1. Cortex préfrontal

Le cortex préfrontal dorsolatéral sous-tend la mémoire de travail ainsi que les stratégies d'apprentissage et de récupération de la mémoire déclarative (en situation de test, sa lésion peut se traduire par un trouble de l'encodage et/ou par un déficit en rappel libre, avec amélioration des performances par l'indiçage et/ou la reconnaissance).

2. Circuit de Papez

Le circuit de Papez est le principal réseau neural cortico-diencéphalique sous-tendant la mémoire déclarative. Il comprend l'hippocampe qui se projette, via le fornix, sur les corps mamillaires, puis les noyaux antérieurs du thalamus et le cingulum. Les lésions bilatérales du circuit de Papez entraînent une amnésie antérograde par déficit de stockage (en situation de test : déficit en rappel libre peu ou pas amélioré par l'indiçage et/ou la reconnaissance) associée à une amnésie rétrograde variable. Cette amnésie est pure dans les lésions temporales internes (bi-hippocampiques) et s'accompagne parfois de fabulations et de fausses reconnaissances (syndrome de Korsakoff) dans les localisations diencéphaliques. Une lésion unilatérale de ce circuit cause un déficit mnésique prédominant en modalité verbale ou visuelle, selon sa localisation gauche ou droite.

D. Causes des amnésies et déficits amnésiques

1. Causes principales selon la topographie des lésions

a. Temporales internes (bi-hippocampiques)

Infectieuses (par exemple, encéphalite herpétique), vasculaires (artères cérébrales postérieures), post-anoxiques, dysimmunes (encéphalites limbiques paranéoplasiques et non paranéoplasiques), dégénératives (maladie d'Alzheimer débutante).

b. Fornix

Tumeurs du troisième ventricule.

c. Corps mamillaires et thalamus

Lésions cellulaires par carence en vitamine B1 (Korsakoff), vasculaires (uni- ou bi-thalamiques).

15 En cas de difficultés à l'interrogatoire et aux tests élémentaires et/ou de retentissement dans la vie quotidienne, la réalisation d'une évaluation neuropsychologique par un(e) neuropsychologue permet de préciser la nature et l'importance des troubles mnésiques et de juger si d'autres fonctions cognitives sont altérées.

d. Cingulaires

Tumeurs frontales internes, lésions vasculaires (notamment lors d'une rupture d'anévrisme de la communicante antérieure).

e. Préfrontales dorsolatérales

Tumeurs frontales externes, vasculaires (artères cérébrales moyennes), dégénératives (dégénérescence lobaire frontotemporale).

2. Causes principales selon les modalités évolutives

a. Amnésies aiguës
Ictus amnésique

Il survient typiquement chez le sujet de plus de 50 ans et de moins de 70 ans. Il se caractérise par une amnésie antérograde (durée entre 1 heure et 24 heures, mais typiquement de 4 à 8 heures), qui laisse une amnésie lacunaire de l'épisode et une amnésie rétrograde limitée (quelques heures). Les signes associés sont les suivants : perplexité anxieuse, questions répétitives, désorientation uniquement temporelle. L'examen somatique est normal, le bilan étiologique négatif, la cause inconnue16. L'existence d'un autre signe exclut le diagnostic d'ictus amnésique et fait rechercher d'autres causes.

Autres causes d'amnésies aiguës

Il peut s'agir d'un traumatisme crânien avec perte de connaissance, d'une crise épileptique (notamment à point de départ temporal interne), d'une prise de psychotropes (par exemple, benzodiazépines), d'une intoxication aiguë (par exemple, éthylique), d'une encéphalite infectieuse (notamment herpétique), d'un accident vasculaire cérébral (par exemple, par lésions bi-thalamiques) ou d'une encéphalite limbique (symptomatologie plutôt subaiguë). Enfin, un événement source de traumatisme psychique et/ou physique (par exemple, une agression) peut être associé à une amnésie rétrograde isolée de survenue brutale, parfois massive avec amnésie d'identité.

b. Amnésies chroniques
Pathologies neurodégénératives

Les déficits mnésiques sont habituels dans ce cadre, notamment par l'atteinte des structures temporales internes (maladie d'Alzheimer) ou préfrontales (par exemple, dégénérescence lobaire frontotemporale).

Iatrogénie

Les traitements qui fragilisent les capacités attentionnelles de façon directe (par exemple, benzodiazépines) ou indirecte (par exemple, effet métabolique, hyponatrémie) sont susceptibles d'altérer l'efficience mnésique.

Troubles du sommeil

Le trouble peut être qualitatif ou quantitatif et relever de causes psychologiques ou organiques (par exemple, syndrome d'apnées du sommeil).

Psychogènes

Une plainte mnésique associée à des tests normaux (ou faiblement perturbés) est fréquemment observée en cas d'anxiété et de dépression.

16 Pendant l'ictus, des études en TEP-scan au 18 FDG ont montré des hypométabolismes temporaux internes. Des circonstances favorisantes sont souvent retrouvées (émotion, exposition au froid, rapport sexuel, manœuvre de Valsalva, etc.).

IV. Langage

A. Définitions

Les aphasies sont des troubles acquis du langage secondaires à des lésions cérébrales :

  • le terme de paraphasie définit les productions anormales du langage oral. En prenant comme exemple «tabouret» [tabure], les paraphasies sont qualifiées :
    • de phonémiques quand le phonème attendu est substitué, omis, déplacé ou répété ([tature] [rature]),
    • de sémantiques quand existe un lien de sens (par exemple, «chaise» ou «fauteuil»),
    • en l'absence de proximité phonémique ou sémantique identifiable, la production sera qualifiée de paraphasie verbale s'il s'agit d'un mot de la langue [tarte] ou de néologisme dans le cas contraire [puirte];
  • dans la modalité écrite, les erreurs sont qualifiées de paragraphies ;
  • circonlocutions ou périphrases [pour s'assoir] sont parfois utilisées par le patient pour pallier le manque du mot;
  • le trouble de la syntaxe peut être un agrammatisme, avec une omission des mots grammaticaux et une simplification des phrases (« une mère, un enfant, de l'eau, inondation »), ou une dysyntaxie, avec un usage incorrect des mots grammaticaux (« il y aurait de l'eau, mais l'enfant vont tomber dans la cuisine»).

Les autres éléments sémiologiques d'un trouble de la communication verbale sont :

  • la perte de cohérence, ou trouble de la conduite du discours (par exemple, en cas de confusion mentale ou d'épisode psychotique), qui ne concerne pas le code linguistique mais l'organisation de la pensée;
  • les dysarthries, qui sont des troubles de la parole par atteinte des organes buccophonatoires ou de leur contrôle (atteinte pyramidale, extrapyramidale, cérébelleuse, des nerfs périphériques ou des muscles);
  • le trouble de la prosodie (par exemple, timbre de voix monocorde), qui concerne l'intonation dans sa fonction linguistique (par exemple, pour marquer une phrase interrogative) ou émotionnelle (tristesse, colère, etc.).

B. Évaluation

1. Examen

L'entretien évalue le débit de l'expression spontanée, indépendamment du contenu. Ce débit est qualifié de non fluent (diminué) ou de fluent (normal, augmenté, voire logorrhéique). La dénomination orale d'images sert à quantifier le manque du mot17. La compréhension des mots est explorée par la désignation d'une image parmi plusieurs appartenant ou non à une même catégorie (par exemple, «Montrez le fauteuil parmi ces images de meubles»). La compréhension de phrases élémentaires peut s'évaluer par l'exécution d'ordres (par exemple, «Avec la main gauche, touchez l'épaule droite, puis le nez»), et de phrases complexes par la désignation d'une image d'action parmi plusieurs (par exemple, «Montrez l'image où le garçon est tiré par le chien»).

17 En utilisant des images représentant des items fréquents comme un pain, un lit, etc. (items utiles pour l'épreuve de mémoire) et des items moins fréquents (par exemple, un zèbre, un chou-fleur) ou des composants d'un ensemble (par exemple, parties d'une montre, d'un vélo, d'une voiture, parties du corps) pour révéler des troubles plus discrets ou spécifiques.

 La répétition utilise des mots puis des phrases de longueur croissante («lit», «autobus», «déménagement», «l'argument de l'avocat l'a convaincu») pour révéler des troubles de la boucle audio-phonatoire et des paraphasies phonémiques.
L'exploration du langage écrit consiste à faire lire, écrire et épeler des mots réguliers (par exemple, «café», «table»), irréguliers (par exemple, «baptême», «examen», «oignon») et des non-mots (ou logatomes, qui ne peuvent être lus/écrits que par une application des règles de transcription graphème/phonème : «churin», «sorpichon», par exemple).

2. Syndromes

 Ce sont principalement les aphasies de Broca, de Wernicke, de conduction et globale (cf. tableau 21.1 dans annexe 21.4).
 Les autres syndromes concernés sont : l'alexie sans agraphie (en général après un AVC du territoire de l'artère cérébrale postérieure gauche) ; les aphasies sous-corticales (les aires corticales sont associées aux noyaux gris centraux et au thalamus par différentes boucles cortico-sous-corticales; des lésions profondes touchant le thalamus, le putamen, le striatum ou la substance blanche sont susceptibles d'entraîner des aphasies qui, en fonction du siège lésionnel, empruntent une sémiologie proche).

Le syndrome de Gerstmann est défini par l'association d'une agraphie (en lien avec un trouble de l'épellation), d'une acalculie, d'une indistinction entre la droite et la gauche et d'une agnosie digitale (incapacité du patient à dénommer et/ou désigner ses doigts et/ou ceux de l'examinateur). La mise en évidence de ces symptômes oriente vers une lésion pariétale inférieure gauche.

3. Évaluation des déficiences et du handicap

 Elle porte sur l'intelligibilité, le contenu du langage, la compréhension. Les déficits permettent-ils de téléphoner, faire des courses, remplir les documents administratifs ? L'évaluation considère les différences entre consultation et situations réelles (bruits, interlocuteurs multiples, etc.), les conséquences psychologiques (dépression), familiales (par exemple, éducation des enfants), sur les activités de loisirs (par exemple, lecture) et le statut professionnel. Les objectifs de la rééducation orthophonique peuvent ainsi être définis.

Tableau 21.1.  Aphasies : classification des principaux syndromes.

C. Anatomie fonctionnelle

 Concernant les aires et circuits du langage (cf. tableau 21.1 dans l'annexe 21.4), une conception schématique fait débuter le circuit du langage au sein de l'hémisphère dominant (le plus souvent gauche ) par l'aire de Wernicke qui a pour fonction un décodage phonologique du message acoustique traité par le gyrus de Heschl. Le traitement sémantique de l'information est assuré par les régions temporales antérieures. Lors de la production, le transfert des informations acoustiques est pris en charge par un faisceau de fibres associatives longitudinales (le faisceau arqué). La programmation phonologique est assurée par l'aire de Broca (pied de la 3e circonvolution frontale ascendante), qui adresse ensuite des informations au cortex moteur primaire codant les programmes moteurs nécessaires à la réalisation des mouvements bucco-phonatoires (réalisation phonétique). Le thalamus et les noyaux gris centraux participent à ces différentes étapes de contrôle et de programmation par des boucles les reliant aux aires corticales du langage. L'initiation du langage et son adaptation au contexte nécessitent l'intégrité du cortex préfrontal, notamment du cortex cingulaire et de l'aire motrice supplémentaire.

D. Causes

 On peut citer les lésions vasculaires, tumorales, traumatiques, infectieuses ou dégénératives18 des aires du langage.

V. Praxies

A. Définition

Le geste est un acte moteur finalisé (c'est-à-dire avec un but).
Les apraxies gestuelles sont les perturbations des gestes non expliquées par une atteinte motrice, sensitive ou intellectuelle.

B. Évaluation

L'interrogatoire peut être évocateur : lenteur, erreurs dans l'utilisation d'ustensiles nouveaux (ménagers, outils de bricolage) ou requérant des séquences complexes (par exemple, machine à laver, préparation d'un plat) ; difficultés pour se vêtir, se chausser, se laver, se raser. Dans les pathologies chroniques, les troubles praxiques entraînent une diminution voire un abandon des activités. Ils sont parfois méconnus de l'entourage, qui les interprète comme un moindre intérêt ou des signes de dépression.

L'examen consiste en :

  • l'imitation de gestes sans signification uni ou bimanuels (mains croisées par les pouces, les auriculaires, anneaux), la réalisation de séquences motrices digitales ou palmaires (paume/ poing/tranche) (apraxie motrice);
  • la réalisation de pantomimes uni-manuelles (par exemple, se brosser les dents, se peigner), ou bimanuelles (tordre une serviette humide, enfoncer un clou), de gestes symboliques (par exemple, signifier que ça sent mauvais, que quelque chose vaut cher, que quelqu'un est ennuyeux) (apraxie idéomotrice);
  • l'utilisation réelle d'objets (apraxie idéatoire) (couverts, mettre une lettre dans une enveloppe, une ampoule dans une douille);
  • mettre et boutonner une veste (apraxie de l'habillage).

18 Un trouble du langage progressif peut être la manifestation initiale d'une pathologie neurodégénérative (aphasie progressive primaire). Trois formes principales s'individualisent : les formes non fluentes/agrammatiques et fluentes (ou « démence sémantique ») sont le plus souvent révélatrices d'une dégénérescence frontotemporale, et les formes « logopéniques » correspondent le plus souvent à une forme atypique de maladie d'Alzheimer.

C. Anatomie

  •  L'apraxie motrice, trouble de la programmation de séquences gestuelles, traduit une lésion préfrontale. Ce type d'apraxie est généralement controlatéral à la lésion.
  • L'apraxie idéomotrice concerne les gestes sans objet (pantomimes, symboliques) et signe une lésion pariétale gauche. Ce type d'apraxie est généralement bilatéral.
  • L'apraxie idéatoire concerne la manipulation des objets et témoigne d'une lésion du carrefour temporo-pariétal gauche.
  • L'apraxie de l'habillage oriente vers une lésion pariétale, uni ou bilatérale.

D. Causes

 Elles peuvent être vasculaires, traumatiques, tumorales, infectieuses ou dégénératives.

VI. Fonctions visuospatiales et visuomotrices

A. Apraxie constructive

L'apraxie constructive ne relève pas à proprement parler d'un trouble du geste mais d'un trouble de la relation du geste à l'espace. Elle est évaluée par la copie d'une figure géométrique (pentagones, cube, horloge, figure de Rey, cf. annexe 21.6) et témoigne d'une lésion préfrontale (programmation) ou pariétale.

B. Négligence spatiale unilatérale, ou héminégligence

C'est l'incapacité de rendre compte de, de répondre à ou de s'orienter vers les stimuli controlatéraux à une lésion, non expliquée par un déficit sensoriel ou moteur. Du fait de la compétence de l'hémisphère droit dans le traitement des informations spatiales, l'héminégligence concerne le plus souvent l'hémi-espace gauche (corporel et/ou extracorporel), en relation avec une lésion hémisphérique droite.
Le syndrome d'Anton-Babinski est caractérisé par la présence d'une héminégligence gauche, d'une hémiasomatognosie (impression de non-appartenance de l'hémicorps gauche) et d'une anosognosie de l'hémiplégie.

1. Évaluation

a. Interrogatoire

Il recherche les défauts d'exploration du côté gauche du corps (par exemple, toilette, rasage, habillage) et de l'espace extracorporel gauche (aliments, objets, interlocuteurs, heurts lors des déplacements).

b. Examen

Il comporte :

  • la recherche d'une extinction visuelle ou sensitive : le patient, lors de la stimulation bilatérale, ne perçoit pas le stimulus du côté gauche, alors qu'il est perçu correctement lors de la stimulation unilatérale;
  • la recherche d'une héminégligence visuelle par diverses épreuves : dessin spontané et sur copie (par exemple, horloge, marguerite), bissection de lignes, repérage de symboles répartis sur une feuille (épreuves de barrage), dénomination d'images (omission de la partie gauche de l'item), lecture et dictée de phrases et de mots (omission de la partie gauche de la feuille et/ou de la partie gauche des mots).

2. Anatomie

 Les régions anatomiques concernées par l'héminégligence sont le lobule pariétal inférieur et le cortex temporal supéro-externe (gyrus temporal supérieur) de l'hémisphère droit; plus rarement, le cortex préfrontal dorsolatéral, le thalamus et le noyau caudé.
La mise en évidence d'un syndrome d'Anton-Babinski signe généralement une lésion étendue fronto-pariétale droite, le plus souvent d'origine vasculaire ou tumorale.

C. Syndrome de Balint

1. Définition

Le syndrome de Balint constitue la manifestation la plus complète et sévère des troubles visuospatiaux et visuomoteurs. Les patients qui en sont affectés deviennent «aveugles pour l'espace ». Il est caractérisé par l'association :

  • d'une ataxie optique, qui désigne l'incapacité à atteindre une cible sous contrôle visuel (par exemple, préhension d'un objet), en l'absence de tout autre déficit du contrôle moteur ;
  • d'une apraxie oculaire, ou « paralysie psychique du regard », qui désigne l'incapacité à orienter volontairement son regard vers un stimulus situé dans son champ visuel périphérique ;
  • d'une simultagnosie, qui désigne l'incapacité à interpréter une scène visuelle dans sa globalité (l'analyse se fait «détail par détail»). Son évaluation repose sur des épreuves de dénombrement d'items ou de description de scènes complexes.

2. Anatomie

Le syndrome de Balint fait généralement suite à des lésions bilatérales occipito-pariétales postérieures.

3. Causes

Elles peuvent être vasculaires (notamment au cours d'infarctus jonctionnels postérieurs), traumatiques, tumorales, infectieuses et dégénératives (notamment dans le cas de rares formes de maladie d'Alzheimer).

D. Perte de l'orientation topographique

Elle définit l'incapacité à reconnaître l'environnement et à s'y orienter. Plusieurs stratégies cognitives sont utilisées pour naviguer dans l'environnement. Les troubles de l'orientation topographique peuvent ainsi résulter de mécanismes divers, comme d'un trouble de l'analyse visuelle de l'espace, de la reconnaissance des repères saillants de l'environnement (agnosie topographique : par exemple, places, monuments) ou de la perte de la mémoire des trajets (dans le cadre d'un syndrome amnésique).
L'orientation spatiale repose sur un réseau anatomique complexe latéralisé à droite, qui inclut les régions pariétales, temporo-basales (gyrus parahippocampique) et hippocampiques. Un trouble de l'analyse visuelle de l'espace indique une dysfonction pariétale, de la reconnaissance des lieux une dysfonction du gyrus parahippocampique, alors qu'une perte de la mémoire des trajets est liée à une dysfonction hippocampique.

VII. Gnosies

A. Définition

 L'agnosie est un trouble de la reconnaissance dans une modalité sensorielle (par exemple, visuelle, tactile) en l'absence de trouble perceptif élémentaire, d'aphasie et non expliqué par un déficit intellectuel. La prosopagnosie est l'incapacité à identifier visuellement le visage de personnages connus ou familiers. L'agnosie topographique est un trouble de la reconnaissance des lieux (cf. supra).

B. Examen

Il consiste à s'assurer de l'absence de trouble perceptif élémentaire, puis à dénommer et identifier des stimuli présentés dans différentes modalités (tactile, visuelle).

C. Anatomie

 La prosopagnosie témoigne d'une atteinte temporo-basale bilatérale ou unilatérale droite (gyrus fusiforme). L'agnosie topographique témoigne également d'une atteinte tempo-robasale bilatérale ou unilatérale droite (gyrus parahippocampique). Les agnosies visuelles d'objet sont généralement en lien avec une atteinte temporo-occipitale bilatérale.

VIII. Fonctions exécutives cognitives et comportementales

A. Définition

 Le terme de «fonctions exécutives» recouvre l'ensemble des processus de contrôle qui permettent l'adéquation à son environnement et l'adaptation à des situations nouvelles : formulation d'un but, d'une hypothèse, anticipation, planification et sélection des séquences permettant d'atteindre ce but, inhibition d'autres solutions possibles, surveillance du déroulement de ce plan et flexibilité en fonction des réponses obtenues (adaptation, correction des erreurs). Les fonctions exécutives dépendent du cortex préfrontal.

B. Anatomie du cortex préfrontal

 Le cortex préfrontal a un rôle d'intégration à la fois des comportements et des fonctions cognitives (par exemple, dans la communication verbale ou la mémoire). Les connexions afférentes et efférentes du cortex préfrontal concernent l'ensemble des cortex associatifs rétrorolandiques, le cortex limbique, les noyaux gris centraux et les thalami. Les dysfonctions observées peuvent résulter de l'atteinte du cortex préfrontal lui-même ou des circuits le reliant aux autres structures. Trois circuits impliquant des régions distinctes du cortex préfrontal sont identifiés, leur lésion entraînant des altérations comportementales ou cognitives évocatrices :

  • le cortex frontal interne et cingulaire antérieur, dont l'atteinte entraîne une réduction des activités auto-initiées et une indifférence affective (tableau «pseudo-dépressif»);
  • le cortex orbitofrontal, dont l'atteinte entraîne désinhibition, irritabilité, labilité de l'humeur, des modifications des conduites alimentaires, des comportements d'utilisation et d'imitation (tableau «pseudo-psychopathique»);
  • le cortex dorsolatéral, dont l'atteinte entraîne des troubles des fonctions exécutives cognitives (ainsi que de la mémoire de travail et de la mémoire à long terme).

C. Évaluation

1. Interrogatoire

 Les lésions préfrontales ont de nombreuses conséquences sur l'adaptation familiale, sociale et professionnelle du sujet. L'interrogatoire et l'observation lors de l'entretien recherchent :

  • désinhibition, perte des convenances/règles sociales : familiarité excessive (propos/gestes), modification du comportement lors des repas (gloutonnerie), impulsivité, irritabilité, grossièretés ;
  • absence d'initiative, adynamie (à ne pas confondre avec un syndrome dépressif, car manquent ici la douleur morale, la tristesse), aspontanéité de la mimique, des gestes et du langage, réalisant au maximum un mutisme akinétique ;
  • trouble du comportement alimentaire : modification quantitative (boulimie) ou qualitative (sélectivité alimentaire), ingestion d'entités non comestibles (végétaux, objets) ;
  • émoussement des affects, voire indifférence affective, réaction inappropriée (par exemple, lors d'un événement familial, heureux ou triste) ;
  • comportement sexuel : indifférence ou désinhibition;
  • comportement d'urination : mictions effectuées dans un lieu inadapté ;
  • réduction de l'hygiène corporelle, de la propreté du logement, vestimentation négligée ou inadaptée (absence d'harmonie, inadéquation avec le contexte social, la température) ;
  • stéréotypies idéiques et comportementales : instauration de routines, rituels, achats stéréotypés, collectionnisme (par exemple, prospectus);
  • perte de l'autocritique, de l'évaluation des conséquences de ses actes ou propos ;
  • troubles du jugement, erreurs de gestion, inadéquation des décisions au contexte (par exemple, achat, changement d'orientation professionnelle, d'habitation).

2. Examen

Les difficultés aux épreuves suivantes sont évocatrices si le déficit n'est pas explicable par une perturbation cognitive plus élémentaire (par exemple, un trouble du langage) et si la consigne est bien comprise et maintenue en mémoire. Certaines des épreuves contenues dans cette section font partie de la batterie rapide d'efficience frontale (BREF, cf. annexe 21.5).

a. Langage

Le langage spontané peut être réduit (réponses laconiques) ou logorrhéique (et difficile à canaliser). Les épreuves de fluence verbale (nommer le plus possible de mots appartenant à une même catégorie, par exemple, noms d'animaux, mots commençant par une lettre donnée, en un temps donné, par exemple 2 minutes), qui évaluent les stratégies de recherche active d'information, peuvent être altérées.

b. Mémoire

Les fonctions exécutives étant nécessaires à la mise en place de stratégies d'encodage et de récupération de l'information, les épreuves de mémoire à long terme sont déficitaires (cf. supra). Les performances amnésiques s'améliorent par la présentation d'indices et/ou la reconnaissance.

c. Conceptualisation

Par exemple, épreuve des similitudes : «Qu'y a-t-il de commun...?», «En quoi se ressemblent...?» («banane/poire», «poème/statue»).

d. Stratégies

Par exemple : « Que faites-vous pour contacter quelqu'un dont vous avez oublié l'adresse et le numéro de téléphone?», «Que faites-vous si vous trouvez dans la rue une lettre timbrée?».

e. Jugement

Par exemple : «À votre avis, pourquoi paie-t-on des impôts?» (ou autre demande d'opinion sur un événement connu du patient).

f. Résolution de problèmes

Par exemple : « Un piéton va à la gare en 45 minutes. Un cycliste va trois fois plus vite. Combien de temps met-il?»

g. Consignes conflictuelles

Par exemple : demander au patient de taper deux fois quand on tape une fois et une fois quand on tape deux fois (en tapant avec l'index ou le stylo sur la surface du bureau).

h. Go/No go

Demander au patient de taper une fois quand on tape une fois et de ne pas taper quand on tape deux fois.

i. Flexibilité mentale

Évalue la capacité d'un sujet à passer d'une tâche cognitive à une autre. Par exemple, deman- der au patient d'alterner oralement chiffre et alphabet (1, A, 2, B, 3, C...), alternance de figures géométriques (ronds et carrés, frises alternant des créneaux et des pointes).

j. Dépendance à l'environnement
  • Comportement d'imitation : doit être suggéré par l'examinateur, qui se positionne en face du sujet (par exemple, croise les bras puis porte la main au menton).
  • Comportement d'utilisation : le patient se saisit spontanément d'objets disposés sur le bureau de l'examinateur et les utilise.

D. Causes

Ce sont les pathologies du cortex préfrontal ou des circuits sous-cortico-préfrontaux : tumeurs, AVC hémorragiques ou ischémiques (branches antérieures de l'artère cérébrale moyenne), lacunes touchant les noyaux gris centraux, sclérose en plaques, traumatismes crâniens, pathologies dégénératives touchant les cortex préfrontaux (dégénérescence frontotemporale) et/ou les circuits sous-cortico-préfrontaux (par exemple, paralysie supranucléaire progressive, maladie de Huntington).

IX. Nature psychogène d'un déficit cognitif

A. Évaluation

Sont évocateurs : le contexte (par exemple, réactionnel), les antécédents, la sémiologie psychiatrique associée, la variabilité des performances, la discordance entre les performances et la difficulté des tests.

B. Dépression

Une plainte amnésique, en relation avec un ralentissement cognitif, des troubles attentionnels et du maintien de l'effort intellectuel, peut évoquer une dépression. Sont également évocateurs : la rapidité d'installation, le retentissement quotidien plus sévère que ne le laisse supposer l'évaluation, une prédominance de réponses du type «Je ne sais pas» (traduisant le ralentissement et les troubles de la recherche active d'information), une fluctuation des performances.

C. Anxiété

Des difficultés attentionnelles peuvent également être l'expression d'une anxiété qui associe des troubles émotionnels à des manifestations somatiques et végétatives. L'anxiété est un trait majeur de différentes pathologies psychiatriques (par exemple, stress post-traumatique, troubles obsessionnels compulsifs, phobies).

D. Troubles psychiques et pathologies neurologiques

Ne pas oublier que dépression, anxiété, troubles obsessionnels compulsifs, troubles comportementaux sont parfois l'expression initiale et/ou prévalente de pathologies neurodégénératives (par exemple, maladie d'Alzheimer, maladie de Huntington, dégénérescence frontotemporale) ou secondaires à des lésions non évolutives (par exemple, post-AVC, post-traumatiques).

X. Évaluation du handicap

À l'issue de l'évaluation, il est possible de déterminer la nature des incapacités et des handicaps qui retentissent sur l'autonomie du patient. Différentes mesures d'aides seront ainsi adaptées aux problèmes spécifiques : allocation aux adultes handicapés (AAH19), prestation de compensation du handicap (PCH20), allocation personnalisée d'autonomie (APA21). Des prescriptions de rééducation fonctionnelle (orthophonie, ergothérapie, kinésithérapie) auront pour objectif de pallier des incapacités déterminées (par exemple, un trouble de la communication verbale). Des conseils d'aménagement du domicile (alarme, éclairage, toilettes, sanitaires, cuisinière à gaz) seront formulés et, dans les pathologies évolutives, réévalués en fonction de l'évolution de la perte d'autonomie. Un avis sur l'aptitude à la conduite automobile sera clairement explicité au patient et soigneusement consigné dans le dossier médical22. Les décisions d'hospitalisation (en centre de rééducation fonctionnelle ou en hôpital de jour) ou d'accueil institutionnel (accueil de jour, séjour temporaire ou définitif en EHPAD) seront adaptées au contexte socio-familial et à la nature et l'origine du déficit. Enfin, des mesures de protection juridiques s'avéreront parfois nécessaires (sauvegarde de justice, curatelle, tutelle).


19 L'AAH est attribuée par la CDAPH (Commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées) des maisons départementales des personnes handicapées (MDPH) jusqu'à l'âge minimum légal de départ à la retraite (moins de 60 ans).
20 La PCH est une aide destinée à financer les besoins liés à la perte d'autonomie des personnes handicapées. Cette prestation couvre les aides humaines, matérielles (aménagement du logement et du véhicule), voire animalières.
21 L'APA est attribuée par le Conseil Départemental pour financer un projet d'accompagnement médico-social des sujets âgés (plus de 60 ans) ayant perdu leur autonomie (groupes iso-ressources [GIR 1 à 4]).
22 En qualité de médecin, le secret professionnel s'oppose à toute déclaration ou signalement auprès des autorités administratives. L'existence d'un risque, même élevé, ne constitue pas une dérogation au secret professionnel. La commission médicale primaire départementale est chargée de statuer sur l'aptitude médicale à conduire. Seul le patient lui-même (ou sa famille) peut saisir cette autorité compétente, au moyen d'un certificat médical remis en main propre à cette fin.


Annexes

Annexe 21.1 – Activités instrumentales de la vie quotidienne

Annexe 21.2 – Mini Mental State Examination (MMSE)23

Matériel nécessaire : un crayon et une montre, une feuille comportant écrit en gros caractères «FERMEZ VOS YEUX» et une feuille comportant deux pentagones entrecoupés.

Orientation
  • « Je vais vous poser quelques questions pour apprécier comment fonctionne votre mémoire. Les unes sont très simples, les autres un peu moins. Vous devez répondre du mieux que vous pouvez.»
    • «Quelle est la date complète d'aujourd'hui?»

Si la réponse est incorrecte ou incomplète, posez les questions dans l'ordre suivant :

1. «En quelle année sommes-nous?»
2. «En quelle saison?»
3. «En quel mois?»
4. «Quel jour du mois?»
5. «Quel jour de la semaine?»

Pour ces items, seules les réponses exactes sont prises en compte. Cependant, lors de changement de saison ou de mois, permettre au sujet de corriger une réponse erronée en lui demandant : « Êtes-vous sûr ? » Si le sujet donne deux réponses, lui demander de choisir et ne tenir compte que de la réponse définitive.

Cotation : Chaque réponse juste vaut un point.

  • « Je vais vous poser maintenant quelques questions sur l'endroit où nous nous trouvons. »

6. «Quel est le nom de l'hôpital où nous sommes?»
7. «Dans quelle ville se trouve-t-il?»
8. «Quel est le nom du département dans lequel est située cette ville?»
9. «Dans quelle province ou région est situé ce département?»
10. «À quel étage sommes-nous ici?»

Pour ces items, n'accepter que la réponse exacte.
Question 6 : lorsque le sujet vient d'une autre ville, on peut se contenter de l'hôpital de la ville lorsqu'il n'existe qu'un seul hôpital dont le nom peut n'être pas connu du patient. Si l'examen est réalisé au cabinet, demander le nom du cabinet médical ou de la rue où il se trouve. Question 8 : Lorsque le nom de la ville et celui du département sont identiques (Paris) ou ceux du département et de la région (Nord), il faut s'assurer que le sujet comprend l'emboîtement des structures administratives. Le numéro du département n'est pas admis. Si le sujet le donne, il faut lui demander de préciser le nom correspondant.

Cotation : chaque réponse juste vaut 1 point ; accorder un délai maximum de 10 secondes. Sous-score : __ /10

Apprentissage
  • « Je vais vous dire trois mots ; je voudrais que vous me les répétiez et que vous essayiez de les retenir, car je vous les redemanderai tout à l'heure. » 

11. « Citron » (« Cigare »). 
12. « Clé » (« Fleur »). 
13. « Ballon » (« Porte »). 

« Répétez les trois mots. »

Donner les trois mots groupés, un par seconde, face au malade en articulant bien. Accorder 20 secondes pour la réponse.
Cotation : compter 1 point par mot répété correctement au premier essai.
Si le sujet ne répète pas les trois mots au premier essai, les redonner jusqu'à ce qu'ils soient répétés correctement dans la limite de six essais. En effet, l'épreuve de rappel ne peut être analysée que si les trois mots ont été enregistrés.
Sous-score : _ /3

23 Version GRECO (https://www.site-greco.net/).

Attention et calcul
  • « Maintenant, je vais vous demander de compter à partir de 100 en retirant 7 à chaque fois jusqu'à ce que je vous arrête.»

Il est permis d'aider le patient en lui présentant la première soustraction. «100 – 7, combien cela fait-il?» Et ensuite : «Continuez.»
Cotation : on arrête après cinq soustractions et on compte 1 point par soustraction exacte, c'est-à-dire quand le pas de 7 est respecté, quelle que soit la réponse précédente (par exemple, « 100, 92, 85 » : le point n'est pas accordé pour la première soustraction, mais il l'est pour la seconde).

14. 100 – 7.
15. 93 – 7.
16. 86 – 7.
17. 79 – 7.
18. 72 – 7.

Si le sujet demande au cours de la tâche, «Combien faut-il retirer?», il n'est pas admis de répéter la consigne (dire : «Continuez comme avant»). S'il paraît, néanmoins, indispensable de redonner la consigne, il faut repartir de la consigne initiale («Comptez à partir de 100 en retirant 7 à chaque fois»). Lorsque le sujet ne peut effectuer les cinq soustractions, il est nécessaire (tâche interférente) de lui demander d'épeler le mot « monde » à l'envers (cf. infra). Sous-score : _ /5

  • Pour tous les sujets, même pour ceux qui ont obtenu le maximum de points, demander : «Pouvez-vous épeler le mot “monde” à l'envers en commençant par la dernière lettre?»
    Toutefois, lorsque le patient a des difficultés manifestes dans le compte à rebours, il est préférable de lui demander d'épeler le mot «monde» à l'endroit avant de lui demander de l'épeler à l'envers pour le remettre en confiance. Dans tous les cas, le résultat à cette épreuve n'est pas pris en compte. 
Rappel
  • «Quels étaient les trois mots que je vous ai demandé de répéter et de retenir tout à l'heure ? »

19. Citron (Cigare).
20. Clé (Fleur).
21. Ballon (Porte).

Accorder 10 secondes pour répondre.
Cotation : compter 1 point par mot correctement restitué. Sous-score : _ /3

Langage 
  • Montrer un crayon.

22. «Quel est le nom de cet objet?»

  • Montrer une montre.

23. «Quel est le nom de cet objet?»

Sous-score : _ /2

Aucune autre réponse que «crayon» n'est admise. Le sujet ne doit pas prendre les objets en main.

  • «Écoutez bien et répétez après moi.»

24. «PAS DE MAIS, DE SI, NI DE ET»

La phrase doit être prononcée lentement à haute voix, face au malade. Si le patient dit ne pas avoir entendu, ne pas répéter la phrase. Si l'examinateur a un doute, il peut être admis de vérifier en répétant la phrase à la fin du test.

Sous-score : _ /1

  • Poser une feuille de papier blanc sur le bureau et la montrer au sujet en lui disant : « Écoutez bien et faites ce que je vais vous dire. »

25. «Prenez mon papier dans la main droite.»

26. «Pliez-le en deux.»

27. «Jetez-le par terre.»

Sous-score : _ /3

  • Cotation : compter 1 point par item correctement exécuté. Si le sujet arrête et demande ce qu'il doit faire, ne pas répéter la consigne, mais dire : « Faites ce que je vous ai dit de faire. »
  •  Montrer la feuille de papier sur laquelle est écrit en gros caractères « FERMEZ LES YEUX » et

dire :

28. «Faites ce qui est marqué.»

Sous-score : _ /1

Cotation : compter 1 point si l'ordre est exécuté. Le point n'est accordé que si le sujet ferme les yeux. Il n'est pas accordé s'il se contente de lire la phrase.

  • Montrer une feuille de papier et un stylo, en disant :

29. « Voulez-vous m'écrire une phrase, ce que vous voulez, mais une phrase entière. » Sous-score : _ /1

Cotation : Donner 1 point si la phrase contient au minimum un sujet et un verbe, sans tenir compte des erreurs d'orthographe ou de syntaxe.

Praxies constructives
  • Montrer la feuille de papier (ci-dessous) et lui demander :

Praxies

Fig. 21.1.

30. « Voulez-vous recopier ce dessin. »
Sous-score : _ /1 
Cotation : Compter 1 point si tous les angles sont présents et si les figures se coupent sur les deux côtés différents. On peut autoriser plusieurs essais et accorder un temps d'une minute.

Score total

Score total : __ /30

Seuils pathologiques selon le niveau socioculturel pour la classe d'âge 50–79 ans

  • Certificat d'étude primaire non obtenu : 22.
  • Certificat d'étude primaire : 23.
  • Brevet : 25.
  • Bac et plus : 26.
Annexe 21.3 – Test des cinq mots24

L'épreuve consiste à faire apprendre au patient une liste de cinq mots et à en étudier la restitution. L'épreuve comporte deux temps :

  • le premier temps consiste en l'apprentissage de la liste. Il permet de s'assurer que l'information a bien été mémorisée par le patient (encodage) ;
  • le second temps, après 5 minutes, est constitué par le rappel différé. Il permet d'évaluer la mémoire à long terme. Une amélioration du score par l'indiçage évoque une dysfonction sous-cortico-frontale, alors qu'une non-amélioration par l'indiçage évoque une dysfonction temporale interne.
Montrer la liste

Faire lire la liste au patient : « Lisez cette liste de mots à voix haute et essayez de la retenir, je vous la redemanderai tout à l'heure.»

  • Musée
  • Limonade
  • Sauterelle
  • Passoire
  • Camion
Interroger le patient 

«Pouvez-vous me dire en regardant la liste, quel est le nom de la boisson, l'ustensile de cuisine, le véhicule, le bâtiment, l'insecte?»

Retourner la liste et interroger à nouveau le patient 

«Pouvez-vous me redonner les mots que vous venez de lire?»

Pour les mots non rappelés et seulement ceux-ci demander 

«Quel était le nom de : ......» en fournissant l'indice correspondant.

Compter le nombre de bonnes réponses : score d'apprentissage
  • Si score = 5, l'enregistrement a été effectif, passer à l'étape suivante.
  • Si score < 5, remontrer la liste et indiquer du doigt les mots non rappelés, puis retourner la liste et demander au patient les mots non rappelés en réponse à leurs indices. Le but est de s'assurer que le patient a bien enregistré tous les mots.
Poursuivre la consultation médicale et faire d'autres tests

Le but est de détourner l'attention du patient pendant 3 à 5 minutes. Par exemple, en explorant ses capacités visuoconstructives ou son orientation temporospatiale. 

Interroger à nouveau le patient

«Pouvez-vous me donner les cinq mots que vous avez lus tout à l'heure?» Pour les mots non rappelés et seulement ceux-ci demander :
«Quel était le nom de : ......» en fournissant l'indice correspondant.

Compter le nombre de bonnes réponses : score de mémoire

Le score obtenu doit être égal à 5 (rappel libre + rappel indicé), aussi bien sur les phases d'encodage que de rappel différé.
Le score de mémoire doit donc être égal à 10, tout score se situant en dessous étant considéré comme pathologique.

Annexe 21.4 – Représentation schématique des principales aires du langage chez le sujet droitier

(Figure 21.2)

Similitudes

Fig. 21.2.  Hémisphère gauche, vue latérale. 
(Source : CEN, 2019.)

Annexe 21.5 – Batterie rapide d'efficience frontale (BREF)25
Similitudes

« En quoi se ressemblent :

  • une banane et une orange ? » [aider le patient en cas d'échec total (« Elles ne se ressemblent pas ») ou partiel (« Elles ont toutes les deux une peau »), en disant : « Une orange et une banane sont toutes les deux des… » ; ne pas aider le patient pour les deux items suivants] ;une table et une chaise ? »
  • une tulipe, une rose et une marguerite ? » 
    Sous-score : _ /3 
    Cotation : seules les réponses catégorielles (fruits, meubles, fleurs) sont considérées comme correctes. Trois réponses correctes = 3 ; deux réponses correctes = 2 ; une réponse correcte = 1 ; aucune réponse = 0
Évocation lexicale

« Nommez le plus possible de mots différents, par exemple des animaux, des plantes, des objets, mais ni prénoms, ni noms propres, commençant par la lettre S. » 
Si le patient ne donne aucune réponse pendant les cinq premières secondes, lui dire : « par exemple : serpent ». Si le patient fait des pauses de plus de 10 secondes, le stimuler après chaque pause en lui disant « n'importe quel mot commençant par la lettre S ». 
Sous-score : _ /3 
Cotation : le temps de passation est de 60 secondes ; les répétitions de mots, les variations sur un même mot (sifflet, sifflement), les noms et les prénoms ne sont pas comptés comme des réponses correctes. Plus de 10 mots = 3 ; de 6 à 10 mots = 2 ; de 3 à 5 mots = 1 ; moins de 3 mots = 0.

Comportement de préhension

L'examinateur est assis en face du patient dont les mains reposent sur les genoux, paumes ouvertes vers le haut. L'examinateur approche doucement les mains et touche celles du patient, pour voir s'il va les saisir spontanément. Si le patient les prend, lui demander : « Maintenant, ne prenez plus les mains. » 
Sous-score : _ /3 
Cotation : le patient ne prend pas les mains de l'examinateur = 3 ; le patient hésite ou demande ce qu'il doit faire = 2 ; le patient prend les mains sans hésitation = 1 ; le patient prend les mains de l'examinateur, après que celui-ci lui a demandé de ne pas le faire = 0.

Séquences motrices

« Regardez attentivement ce que je fais. »

L'examinateur assis en face du patient exécute trois fois avec sa main gauche la séquence de Luria tranche-poing-paume. « Maintenant, vous allez exécuter avec votre main droite cette séquence, d'abord en même temps que moi, puis seul. » L'examinateur effectue alors trois fois la séquence avec sa main gauche en même temps que le patient, puis lui dit : « Continuez. » 
Sous-score : _ /3 
Cotation : le patient exécute seul six séquences consécutives correctes = 3 ; le patient exécute seul au moins trois séquences consécutives correctes = 2 ; le patient échoue seul, mais exécute trois séquences consécutives correctes en même temps que l'examinateur = 1 ; le patient ne peut exécuter trois séquences consécutives correctes, même avec l'examinateur = 0.

Consignes conflictuelles

« Lorsque je tape une fois, vous devez taper deux fois. » Pour s'assurer que le patient a bien compris la consigne, l'examinateur lui fait réaliser une séquence de trois essais : 1-1-1. 
« Lorsque je tape deux fois, vous devez taper une fois. » Pour s'assurer que le patient a bien compris la consigne, l'examinateur lui fait réaliser une séquence de trois essais : 2-2-2. 
La séquence proposée est la suivante : 1-1-2-1-2-2-2-1-1-2. 
Sous-score : _ /3 
Cotation : aucune erreur = 3 ; une ou deux erreurs = 2 ; plus de deux erreurs = 1 ; le patient tape le même nombre de coups que l'examinateur au moins quatre fois consécutives = 0.

Go/No go

« Lorsque je tape une fois, vous devez taper une fois. » Pour s'assurer que le patient a bien compris la consigne, l'examinateur lui fait réaliser une séquence de trois essais : 1-1-1. 
« Lorsque je tape deux fois, vous ne devez pas taper. » Pour s'assurer que le patient a bien compris la consigne, l'examinateur lui fait réaliser une séquence de trois essais : 2-2-2. 
La séquence est la suivante : 1-1-2-1-2-2-2-1-1-2. 
Sous-score : _ /3 
Cotation : aucune erreur = 3 ; une ou deux erreurs = 2 ; plus de deux erreurs = 1 ; le patient tape le même nombre de coups que l'examinateur au moins quatre fois consécutives = 0. 
Score total : __ /18

Seuils pathologiques selon le niveau socioculturel 

  • Sujets scolarisés jusqu'au niveau du collège : un score inférieur à 16 est considéré comme pathologique.
  • Sujets de niveau inférieur : le seuil pathologique est à 15.
Annexe 21.6 – Copie de la figure de Rey

(Figure 21.3)