Objectifs pédagogiques

  • Diagnostiquer une maladie de Parkinson.
  • Connaître les médicaments susceptibles d'induire un syndrome parkinsonien.
  • Décrire les principes de la prise en charge.

Hiérarchisation des connaissances


I. Pour comprendre

  •  La maladie de Parkinson est la cause la plus fréquente de syndrome parkinsonien, définie par l'association d'une bradykinésie (ralentissement à l'exécution d'un mouve- ment et décrément de la vitesse), associée potentiellement à une réduction d'amplitude – hypokinésie – et à un défaut d'initiation – akinésie –, avec au moins une rigidité dite plastique ou un tremblement de repos. Un élément clé du diagnostic est l'absence d'autres signes que le syndrome parkinsonien (drapeaux rouges), la réponse positive et prolongée des signes moteurs au traitement dopaminergique et la survenue de dyskinésies induites par la lévodopa. Le terme akinésie est aussi utilisé pour indiquer l'absence de mouvement.
  • L'existence d'un syndrome parkinsonien témoigne d'un déficit dopaminergique.
  • Le déficit dopaminergique peut être la conséquence d'un processus neurodégénératif (maladie de Parkinson) mais aussi d'une impossibilité de la dopamine d'exercer son action (les neuroleptiques «bloquent» les récepteurs dopaminergiques).

II. Conditions générales du diagnostic de maladie de Parkinson

La réalisation d'examens complémentaires (IRM cérébrale, par exemple) est indiquée en cas d'atypie clinique (signes d'alerte ou « drapeaux rouges ») faisant douter du diagnostic de maladie de Parkinson.

III. Maladie de Parkinson

A. Éléments physiopathologiques

  • Perte progressive des neurones dopaminergiques de la voie nigro-striatale.
  • Perte de 50 à 60 % des neurones nécessaire avant la survenue des signes moteurs de la riade parkinsonienne.
  • Le processus neurodégénératif dépasse la voie nigro-striatale, expliquant la survenue d'autres signes moteurs (les signes axiaux, par exemple) et non moteurs (les troubles cognitifs, par exemple) résistant au traitement dopaminergique.
  • Présence de corps de Lewy (inclusions intraneuronales contenant des agrégats anormaux d'alpha-synucléine) (figure 16.1).
  • Étiologie inconnue, mais plusieurs facteurs génétiques et environnementaux sont identifiés.
  • L'âge est le facteur de risque principal. À un moindre degré, des études épidémiologiques ont mis en évidence un risque plus élevé chez des sujets exposés aux pesticides. Plusieurs mutations de transmission autosomique récessive et autosomique dominante ont été identifiées. Ces mutations comptent pour environ 15 % des patients atteints de maladie de Parkinson (50 % des patients avec un début de maladie avant 40 ans).

Fig 16.1

Fig. 16.1.  Plusieurs corps de Lewy (flèches noires) sont observés dans des neurones dopaminergiques de la substance noire compacte chez ce patient atteint d'une maladie de Parkinson.
(Source : CEN, 2019.)B. Symptomatologie initiale

1. Triade parkinsonienne

 La manifestation des signes de la triade parkinsonienne est unilatérale ou asymétrique. L'asymétrie persiste tout au long de la maladie.

a. Tremblement de repos 

(Vidéos 16.1 et 16.2)

  • Présent au repos et disparaissant lors du mouvement.
  • Lent (4–6 Hz).
  • Touchant les membres, les lèvres ou le menton.
  • Unilatéral ou asymétrique.
  • Aggravé par les émotions et le calcul mental.

Le tremblement de repos est pathognomonique, mais pas obligatoire pour le diagnostic (absence chez un tiers des patients). Il peut être présent dans d'autres syndromes parkinsoniens, en particulier iatrogènes.

b. Rigidité de type plastique

(vidéo 16.3 )

Mode de révélation

Raideur des extrémités ou de la nuque.

À l’examen

Résistance constante à la mobilisation passive, cède par à-coups, phénomène de roue dentée, sensibilisation par la manœuvre de Froment.

c. Akinésie/bradykinésie/hypokinésie 

(vidéo 16.4 )

Pour la bradykinésie, voir la définition ci-dessus. L'akinésie est définie par un ralentissement à l'initiation d'un mouvement et l'hypokinésie par une diminution de l'amplitude d'un mouvement.

Mode de révélation

Gêne à l'écriture (réduction de la taille des lettres, ou micrographie), à la réalisation des activités de la vie quotidienne (se raser, couper la viande...), troubles de la marche.

À l’examen

Hypomimie, ralentissement des gestes alternatifs rapides (opposition pouce-index, battre la mesure avec le pied), perte du ballant du bras avec, parfois, une lenteur de la marche (à petits pas), pauvreté de mouvements spontanés (clignement des yeux...), voix monocorde et monotone.

2. Autres signes révélateurs

  • En l'absence de tremblement de repos, le syndrome akinéto-rigide peut prendre des aspects trompeurs rhumatologiques (raideur d'un membre, périarthrite scapulo-humérale. fréquente dans la maladie de Parkinson) ou neuropsychiques (ralentissement évoquant une dépression).
  • D'autres formes de début ont été rapportées plus récemment sous forme d'un déficit de l'odorat par atteinte du noyau du nerf olfactif ou de troubles du comportement en sommeil paradoxal (il s'agit de véritables rêves animés et/ou cauchemars qui peuvent être responsables d'actes auto ou hétéro-agressifs). Ces symptômes, ainsi que la constipation, peuvent précéder les troubles moteurs de plusieurs années.

C. Signes non moteurs

 Les signes non moteurs sont fréquents dans la maladie de Parkinson, notamment dans les stades avancés; la prise en charge doit en tenir compte. Ces signes peuvent, comme les troubles moteurs, être fluctuants :

  • troubles cognitifs (syndrome dysexécutif, d'une atteinte cognitive légère au stade de démence) et comportementaux (hallucinations, délire);
  • apathie, dépression et anxiété; 
  • douleurs ;
  • dysautonomie (constipation, urgenturies, hypotension orthostatique);
  • troubles du sommeil et de la vigilance.

D. Examen clinique

 L'objectif est :

  • d'authentifier l'existence d'un syndrome parkinsonien asymétrique non iatrogène ;
  • de différencier une maladie de Parkinson d'une autre cause de syndrome parkinsonien par a recherche de «drapeaux rouges».l

E. Arguments principaux du diagnostic et investigation

  •  Arguments principaux :
    • apparition progressive d'une bradykinésie, associée à une rigidité et/ou un tremblement de repos caractéristique;
    • asymétrie de la symptomatologie parkinsonienne;
    • normalité du reste de l'examen neurologique (absence de «drapeaux rouges»);
    • absence de facteurs iatrogéniques explicatifs.
  • Le diagnostic est clinique. Aucun examen complémentaire n'est justifié, sauf chez les sujets de moins de 40 ans.
  • Le diagnostic est confirmé cliniquement par l'observation d'une nette réduction des signes moteurs à l'instauration du traitement dopaminergique. Cette sensibilité aux traitements est prolongée au-delà de 5 ans et la majorité des patients développe des dyskinésies induites par la lévodopa et les autres traitements dopaminergiques au cours de leur maladie.

F. Différentes classes de médicaments antiparkinsoniens et traitement initial

 Le traitement vise à restaurer la transmission dopaminergique (cf. encadré 16.1).

1. Avant 65–70 ans

  • Agoniste dopaminergique LP en monothérapie (retardement de l'apparition des complications motrices) ou inhibiteur de la monoamine oxydase B (IMAO-B). Ces deux thérapeutiques peuvent être associées. Cependant, en cas d'antécédent d'addiction, la prescription des agonistes dopaminergiques doit être évaluée avec beaucoup de prudence (risque potentiel de troubles du contrôle des impulsions).
  • Si contrôle insatisfaisant, progression posologique de l'agoniste dopaminergique. Si contrôle insatisfaisant ou mauvaise tolérance, association avec la L-dopa ou IMAO-B.
  • Possibilité de débuter d'emblée le traitement par la L-dopa avec inhibiteur de la DDC, sur- tout en cas de handicap moteur et d'altération de la qualité de vie, qui doivent être évalués au cas par cas. Proposer progressivement 3 à 4 prises par jour (car 1⁄2 vie courte) avant les repas pour faciliter l'absorption et l'efficacité.
  • En cas de nausées ou de vomissements, un traitement par dompéridone peut être prescrit (diminution des effets secondaires à la stimulation des récepteurs dopaminergiques périphériques; contre-indication en cas d'allongement du temps QTc) en limitant la prescription à la durée de traitement la plus courte (usuellement 7 jours maximum).
  • Anticholinergiques : quasi obsolètes (cf. encadré 16.1).

2. Après 65–70 ans

  • L-dopa avec inhibiteur de la DDC d'emblée en monothérapie ou IMAO-B.
  • Si contrôle insatisfaisant, progression posologique de la L-dopa ou association avec IMAO-B.
  • Coprescription de domperidone selon les préconisations mentionnées ci-dessus.

G. Les mesures thérapeutiques non-médicamenteuses

Elles doivent être discutées précocemment.

  • Demande d'ALD.
  • Demande de reconnaissance professionnelle chez les sujets exposés aux pesticides.
  • Éducation thérapeutique du patient et aidant.
  • Incitation d'une activité physique et si le patient le souhaite d'une activité sportive.
  • Rééducation adaptée au différents stades de la maladie, notamment sous forme de séances d'orthophonie (rééducation de la dysarthrie et des troubles de déglutition) et de kinésithérapie (enseignement de la gymnastique quotidienne, prévention des complications musculo-squelettiques par l'entretien de la souplesse et de la force musculaire, travail de l'équilibre postural, apprentissage des transferts, etc.). Pour plus de détails, cf. référentiel de Médecine physique et réadaptation.
  • Associations de patients (information pour les patients et les aidants).

H. Évolution

Comme dans toute affection neurodégénérative, les lésions progressent, traduisant une majoration des signes cliniques. On distingue les phases suivantes :

1. phase diagnostique;

2. phase du bon contrôle des signes sous traitement, Qualifiée parfois de «lune de miel»;

3. phase des complications motrices du traitement dopaminergique :

  • les complications motrices apparaissent en moyenne 4 à 5 ans après le début de la maladie,
  • l'âge jeune du début de la maladie, la durée d'évolution, la dose de L-dopa sont des facteurs de risque pour l'apparition précoce des complications motrices,
  • on distingue fluctuations d'efficacité du traitement et dyskinésies (cf. encadré 16.2) ;

4. phase du déclin moteur et du déclin cognitif : ces déclins ne sont pas ou peu sensibles aux traitements dopaminergiques :

  • signes moteurs axiaux :
    • dysarthrie (et dysphagie), hypersialorrhée en raison de la diminution de la déglutition spontanée avec risque de fausses routes et de pneumopathie,
    • troubles de la marche avec risque de chutes vers l'avant :
    • enrayement cinétique (freezing) : les pieds restent « collés au sol » à l'initiation de la marche ou au demi-tour,
    • festination : brutal emballement de la marche qui devient incontrôlable,
    • troubles de la posture : triple flexion, camptocormie (flexion du tronc en avant), syndrome de Pise (flexion latérale du tronc),
    • troubles de l'équilibre postural avec chutes en arrière ;
  • troubles cognitifs et comportementaux :
    • syndrome dysexécutif, évoluant vers une démence (30 % des patients, 80 % après 15 à 20 ans d'évolution),
    • le traitement dopaminergique peut provoquer des hallucinations, voire un véritable délire (notamment paranoïaque). La survenue de ces troubles peut être indicatrice d'une évolution de la maladie vers un état démentiel ;
  • troubles dysautonomiques :
    • ils s'accentuent avec le temps, associant selon les cas : constipation, hypotension artérielle orthostatique, troubles vésico-sphinctériens (impériosités mictionnelles).

I. Traitement dans les stades avancés

1. Fluctuations motrices

  •  Fractionnement de la L-dopa (rapprochement avec augmentation du nombre de prises).
  • • Agoniste dopaminergique si le traitement reposait sur la L-dopa seule ou renforcement des doses d'agoniste dopaminergique selon la tolérance.
  • Injection d'apomorphine (agoniste dopaminergique) par stylo en cas de blocage sévère.
  • ICOMT en association avec la L-dopa.
  • IMAO-B.

2. Dyskinésies

  • Réduction des posologies de la L-dopa en cas de dyskinésies de milieu de dose avec, en général, un plus grand fractionnement sur la journée.
  • Amantadine

3. Fluctuations et/ou dyskinésies sévères non contrôlées par les traitements ci-dessus

  • La stimulation à haute fréquence du noyau sous-thalamique ou du pallidum interne peut être proposée chez des patients de moins de 70 ans présentant des complications motrices sévères ou un tremblement handicapant malgré un traitement bien conduit, en l'absence de troubles sévères cognitifs ou du comportement.
  • Deux autres alternatives sont possibles en cas de complications motrices sévères : la pompe d'apomorphine (agoniste dopaminergique appliqué en continu en sous-cutané) et l'administration intraduodénale continue de la L-dopa via une gastrostomie.

4. Signes non moteurs

  • Hallucinations, délire : suppression progressive des traitements antiparkinsoniens en dehors de la L-dopa ; si persistance, traitement par clozapine ou quétiapine.
  • Démence : anticholinestérasique (non remboursé).
  • Dépression : antidépresseurs.
  • Dysautonomie : hypotension orthostatique (mesures hygiéniques, bas de contention; si insuffisant : midodrine ou fludrocortisone), impériosités mictionnelles (anticholinergiques de type chlorure de trospium ou oxybutinine).
  • Troubles du sommeil : somnifères si nécessaire ; clonazépam si troubles sévères du comportement en sommeil paradoxal.

IV. Syndromes parkinsoniens

A. Syndromes parkinsoniens iatrogènes

1. Les médicaments susceptibles d'induire un syndrome parkinsonien

  •  Principalement induits par les neuroleptiques (antipsychotiques) ou neuroleptiques «cachés» (antinauséeux comme le métoclopramide et le métopimazine, sédatifs comme l'alimémazine), qu'il faudra méticuleusement rechercher à l'interrogatoire.
  • Des inhibiteurs calciques de type flunarizine (traitement de fond de la migraine) et des antidépresseurs sont plus rarement responsables d'un syndrome parkinsonien.

2. Caractéristiques cliniques

  • Syndrome parkinsonien plutôt symétrique (caractéristique inconstante).
  • Plus fréquemment un tremblement postural ou d'action qu'un authentique tremblement de repos.
  • Présence potentielle de dyskinésies bucco-linguo-faciales.
  • Absence de réponse au traitement dopaminergique.

B. Syndromes parkinsoniens atypiques

  • Contrairement à la maladie de Parkinson, les signes moteurs des syndromes parkinsoniens atypiques répondent peu ou pas au traitement dopaminergique.
  • La progression des signes est plus rapide et la durée de survie est diminuée par rapport à la maladie de Parkinson.
  • Le syndrome parkinsonien s'associe à d'autres symptômes (cf. supra, « Drapeaux rouges »).

1. Maladie à corps de Lewy

(Cf. chapitre 18, item 132.)

  •  Syndrome parkinsonien asymétrique.
  • Troubles cognitifs et démence précoces avec hallucinations spontanées et fluctuations de la vigilance.
  • Hypersensibilité aux neuroleptiques.

Compléments en ligne

Des compléments numériques sont associés à cet ouvrage. Ils sont indiqués dans la marge par un pictogramme qui renvoient vers les vidéos ou enregistrements sonores.
Pour accéder à ces compléments, connectez-vous sur www.em-consulte.com/complement/477437 et suivez les instructions pour activer votre accès.

Vidéo 16.1. Tremblement de repos du membre supérieur.
Vidéo 16.2. Tremblement de repos du membre inférieur.
Vidéo 16.3. Signe de la roue dentée (rigidité).
Vidéo 16.4. Akinésie.

Pour en savoir plus

Le liste des actes et prestations – ALD n° 16, «Maladie de Parkinson » (2017) –, le guide du parcours de soin (2016) et des précisions sur la prise en charge non médicamenteuse (2016 et 2019) sont consultables sur le site de la HAS : https://www.has-sante.fr/jcms/c_546220/fr/ald-n16-maladie-de-parkinson
Maladie de Parkinson et syndromes apparentés : techniques et modalités de la prise en charge non médicamenteuse des troubles moteurs (2016) est consultable sur le site de la HAS :
https://www.has-sante.fr/jcms/c_2038173/fr/maladie-de-parkinson-et-syndromes-apparentes-techniques-et-modalites-de-la-prise-en-charge-non-medicamenteuse-des-troubles-moteurs.
Parkinson : prise en charge non médicamenteuse des troubles moteurs (2019) est consultable sur le site de la HAS : https://www.has-sante.fr/jcms/pprd_2974326/fr/par-kinson-prise-en-charge-non-medicamenteuse-des-troubles-moteurs.