Objectifs pédagogiques

  • Diagnostiquer un malaise, une perte de connaissance, une crise comitiale chez l'adulte.
  • Identifier les situations d'urgence et planifier leur prise en charge préhospitalière et hospitalière (posologies).

Hiérarchisation des connaissances


I. Pour comprendre

La perte de connaissance transitoire est une perte de conscience spontanée avec récupération complète touchant entre un quart et la moitié de la population à un moment de sa vie. Cette perte de connaissance a plusieurs causes dont les plus fréquentes sont les désordres cardiovasculaires (de l'arythmie cardiaque aux syncopes vasovagales), l'épilepsie et les crises non épileptiques psychogènes.
Les syncopes sont des pertes de connaissance brèves, de quelques minutes, avec une perte du tonus postural, spontanément résolutives, et un retour rapide à l'état de conscience normal, sur place et souvent avant l'arrivée des secours. Elles sont dues à une hypoperfusion cérébrale globale et passagère, de début soudain ou rapidement progressif et de durée brève (en moyenne 12 secondes). Le mécanisme des lipothymies est le même, mais la durée de l'hypoperfusion cérébrale est trop brève pour entraîner une perte de connaissance complète. Leur prévalence est d'environ 40 % considérant une vie de 70 ans et une incidence annuelle d'environ 6 %. L'incidence des syncopes augmente après 70 ans. Parmi les causes des syncopes : les syncopes vasovagales, aussi connues comme neurocardiogéniques à médiation neurale, sont les plus fréquentes, représentant environ un tiers de l'ensemble des causes et conduisant les patients dans deux tiers des cas aux urgences. Le diagnostic de syncope peut être fait grâce à l'interrogatoire, l'examen clinique et un électrocardiogramme dans 50 % des cas. L'histoire de la maladie, les antécédents personnels et familiaux sont d'une grande aide diagnostique. L'examen clinique doit comporter la mesure de la pression artérielle en position couchée puis debout (3 minutes après le lever).
Les crises d'épilepsie sont dues à une décharge hypersynchrone de neurones. Si la décharge a lieu dans les deux hémisphères simultanément, il peut s'agir d'une absence (perte de contact de quelques dizaines de secondes) ou d'une crise généralisée tonicoclonique (CGTC), avec perte de connaissance prolongée une dizaine ou quelques dizaines de minutes (cette durée incluant la crise elle-même [environ 3 minutes] et la confusion post critique, de sorte que les malades reprennent conscience dans le camion du SAMU ou aux urgences).
Les crises non épileptiques psychogènes sont la 3e cause de malaise avec perte de connaissance. Les manifestations cliniques ressemblent à une crise d'épilepsie associant une modification du comportement soudaine et paroxystique, néanmoins sans modification électrique concomitante. Elles sont d'origine psychogène.

II. Conditions générales du diagnostic d'une perte de connaissance

  • Le diagnostic est essentiellement clinique (parfois en assistant à la perte de connaissance mais, le plus souvent, après) et repose donc quasi exclusivement sur l'interrogatoire très précis du patient et/ou d'un témoin (y compris en joignant un témoin par téléphone).
  • Il faut proscrire les bilans systématiques (ECG, EEG, doppler, holter, scanner, etc.), le plus souvent inutiles autant que coûteux et, parfois, sources d'erreurs.
  • En pratique courante, le problème diagnostique est de distinguer syncope et crise d'épilepsie généralisée. Le critère diagnostique majeur est la durée de l'épisode ; celle-ci est souvent mal évaluée par les témoins et impossible à évaluer par le patient.

III. Syncopes et lipothymies

La distinction entre syncope et lipothymie repose sur l'existence ou non d'une réelle perte de connaissance. En cas de simple lipothymie, le malade garde le souvenir de ce qu'il a entendu autour de lui pendant son malaise. Mais le fait que la perte de connaissance soit complète (syncope), partielle ou inexistante (lipothymie) ne doit pas modifier l'orientation diagnostique : une même affection peut se traduire soit par une syncope, soit par une lipothymie, selon l'importance et la durée de la baisse du débit sanguin cérébral.

A. Diagnostic

Arguments majeurs du diagnostic de syncope :

  • brièveté de la perte de connaissance (quelques secondes à 3 minutes) ;
  • état de mort apparente durant la perte de connaissance : pâleur extrême, hypotonie globale, pouls imprenable;
  • reprise immédiate, sur place, d'une conscience claire.

Éléments parfois présents mais n'invalidant pas le diagnostic de syncope :

  • chute traumatisante (par chute du tonus postural) ;
  • perte d'urines (relâchement du tonus sphinctérien si vessie pleine) ;
  • morsure du bout de la langue (et non du bord latéral) secondaire à la chute ;
  • survenue de quelques secousses cloniques limitées aux membres supérieurs, par hypoxie neuronale très transitoire : syncope convulsivante, possible source d'erreur diagnostique avec une crise d'épilepsie généralisée. Mais les clonies sont ici peu nombreuses et la perte de connaissance reste brève, sans confusion post-critique.

B. Étiologie des syncopes (tableau 29.1)

1. Syncopes réflexes

a. Syncopes vasovagales

De loin les plus fréquentes et les plus bénignes des syncopes.
Encore appelées syncopes « neurocardiogéniques » ou « à médiation neurale », leur physiopathologie est complexe et encore mal connue : très schématiquement, une diminution du retour veineux ou une émotion vive activent une boucle réflexe neurocardiogénique faisant relais dans le tronc cérébral, entraînant une inhibition sympathique (responsable d'une chute tensionnelle) et une hyperactivité vagale (à l'origine d'une bradycardie). Chute tensionnelle et bradycardie entraînent une baisse du débit sanguin cérébral (d'où l'ischémie cérébrale diffuse et la syncope).

Tableau 29.1. Causes fréquentes de syncope.

27 Le syndrome de Brugada est une maladie génétique rare caractérisée par un sus-décalage du segment ST au niveau des dérivations précordiales droites V1, V2 et V3, et un aspect de bloc de branche droit à l'électrocardiogramme, associés à un risque élevé d'arythmie ventriculaire pouvant entraîner syncope et mort subite, sur un cœur structurellement sain. La transmission se fait sur un mode autosomique dominant et la pénétrance est variable.

Arguments généraux du diagnostic

(En dehors de ceux de toute syncope : cf. supra.)

  • Circonstances de survenue : atmosphère confinée, chaleur, fin de repas (syncopes post- prandiales), émotions vives, «vue du sang», douleur aiguë, station debout prolongée.
  • Prodromes (lipothymie) : pendant quelques secondes à quelques minutes, apparition de sensation de tête vide, sueurs, nausées, palpitations, vue brouillée (« voile noir »), éloignement des sons et acouphènes, jambes flageolantes – ce sont des symptômes d'ischémie vertébrobasilaire diffuse (noyaux vestibulaires, formation réticulée, lobe occipital); cette phase prodromale peut (rarement) être absente.
  • Asthénie intense pouvant durer une ou plusieurs heures après la syncope, inconstante mais très évocatrice (de physiopathologie non connue).
Investigations

Les investigations sont inutiles dans la majorité des cas, sauf :

  • en cas de doute diagnostique avec une syncope cardiaque (cf. infra), notamment en l'absence de prodromes;
  • dans les formes atypiques et/ou invalidantes par leur répétition; un tilt-test (cf. infra) peut alors être indiqué.
Mesures thérapeutiques

Des explications et des conseils simples (s'allonger au moindre malaise, jambes surélevées, où que le sujet se trouve, et surtout ne pas se lever) suffisent le plus souvent.

b. Autres syncopes réflexes (beaucoup plus rares)
  • Syncopes sino-carotidiennes, dues à une hypersensibilité du sinus carotidien, qui surviennent le plus souvent chez un homme de plus de 60 ans, en position debout, parfois lorsque le sujet se rase ou tourne la tête. Mais ces circonstances de survenue sont très inconstantes. Si les épisodes se répètent, proposer un massage carotidien en milieu cardiologique. Un stimulateur cardiaque sentinelle peut être mis en place.
  • Syncopes tussives (ou ictus laryngé), survenant à l'acmé d'une quinte de toux chez le bronchiteux chronique.
  • Syncopes mictionnelles, principalement nocturnes, chez l'homme âgé, le plus souvent liées à l'hypotension orthostatique (cf. infra).

2. Syncopes par hypotension orthostatique

a. Arguments généraux du diagnostic
  • Sujet âgé.
  • Même sémiologie que la syncope vasovagale avec phase prodromale, chute possible, état de mort apparente, reprise immédiate d'une conscience claire, ou parfois simple lipothymie si le sujet se rassoit.
  • Survenue à l'orthostatisme, dès les premières secondes ou minutes du lever (par exemple, syncope mictionnelle nocturne), station debout prolongée, période post-prandiale (cumul de la séquestration splanchnique et de l'orthostatisme).
  • Démonstration d'une hypotension orthostatique par la mesure de la PA en position couchée puis de manière répétée debout : baisse tensionnelle d'au moins (≥) 20 mm Hg pour la systolique ou d'au moins (≥) 10 mm Hg pour la diastolique, pendant les 3 premières minutes au moins (et jusqu'à 10 minutes en cas de doute) ou une diminution d'une pression artérielle systolique ≤ 90 mm Hg qui reproduisent les symptômes spontanés. Lorsque les symptômes sont présents lors de cette baisse, le diagnostic de syncope par hypotension orthostatique est certain; lorsque ces symptômes sont absents, le diagnostic est probable lorsque l'histoire est évocatrice (cf. supra).
b. Recherche d'une ou de plusieurs causes
  • Médicaments, cause de loin la plus fréquente et à évoquer systématiquement, surtout chez le sujet âgé : antihypertenseurs (notamment en cas de bi- ou trithérapie), antiparkinsoniens, tricycliques, neuroleptiques, etc.
  • Déshydratation, anémie.
  • Beaucoup plus rarement dysautonomie liée à une affection neurologique : neuropathie diabétique, atrophie multisystématisée (cf. chapitre 16, item 106, «Maladie de Parkinson»). Dans les cas de dysautonomie (atteinte du système nerveux végétatif), le pouls ne s'accélère pas alors que la PA chute : c'est une hypotension orthostatique asympathicotonique.
  • Hypotension post-prandiale : cause fréquente de syncope chez le sujet âgé. Elle survient par définition dans les 2 heures suivant un repas. Les facteurs favorisants sont les vasodilatateurs, des aliments très chauds, une atmosphère très chaude et un régime riche en glucides.
c. Traitement
  • Traitement de la ou des causes (suppression des médicaments hypotenseurs +++).
  • Conseils posturaux : éviter les stations debout prolongées, levers en plusieurs temps.
  • Contractions isométriques des muscles des membres supérieurs ou inférieurs (figure 29.1) : croisement des jambes (en contractant tous les muscles des membres inférieurs, de l'abdomen et des fesses), serrement maximal d'une balle en caoutchouc d'environ 4-5 cm pendant la durée maximale tolérée, tirement maximal des deux mains jointes et avant-bras en abduction (manœuvre de Jendrassik) jusqu'à disparition des symptômes.
  • Bas de contention.
  • Vasoconstricteurs agonistes alpha tels que la midodrine ou l'étilefrine en cas d'échec des mesures précédentes.
  • Fludrocortisone (pas d'AMM).

Fig. 29.1. Contractions isométriques des muscles des membres supérieurs ou inférieurs.
(Source : Brignole M., et al. Practical Instructions for the 2018 ESC Guidelines for the diagnosis and management of syncope. European Heart Journal, 2018 ; 39 (21) : e43-e80. © The European Society of Cardiology 2018. All rights reserved.)

3. Syncopes cardiaques

Plus rares que les deux précédentes, elles sont aussi beaucoup plus graves, en raison de leur risque vital (encadré 29.1).
L'hypoperfusion cérébrale globale est due à une réduction de l'éjection ventriculaire gauche, soit par un trouble de la conduction ou par un trouble du rythme ventriculaire, soit par obstacle à l'éjection ou au remplissage ventriculaire.

a. Arguments généraux du diagnostic
  • Syncopes à l'emporte-pièce, de début et de fin extrêmement soudains, typiquement sans aucun prodrome (mais des palpitations ou un bref malaise peuvent exister).
  • Sujet de plus de 60 ans le plus souvent.
  • Antécédents cardiologiques : cardiopathie ischémique, traitement antiarythmique, etc.
  • Survenue à l'effort.
b. Étiologie
Par troubles de la conduction et du rythme (encadré 29.2)

Blocs auriculoventriculaires (BAV)

  • C'est le type même de la syncope cardiaque, à l'emporte-pièce.
  • La perte de connaissance peut être tellement brève que le sujet se retrouve à terre et peut se relever aussitôt. Il faut donc l'évoquer lors des chutes inexpliquées du sujet âgé.
  • Investigations :
    • lorsque le BAV est permanent, le diagnostic se fait sur l'ECG standard ;
    • si le BAV est paroxystique, l'enregistrement ECG sur 24 heures (holter) peut le détecter; sinon, la démonstration en revient à l'exploration électrophysiologique endocavitaire du faisceau de His.
  •  Traitement :
    • en urgence, en présence d'une importante bradycardie permanente, le sulfate d'atropine IV, l'isoprénaline et, en cas de troubles de conscience prolongés, un massage cardiaque externe sont indiqués ; le transfert rapide en unité de soins intensifs cardiologiques s'impose;
    • la mise en place d'un stimulateur cardiaque constitue le seul traitement de fond efficace.

Blocs sino-auriculaires paroxystiques

  • Habituellement plus lipothymiques que syncopaux.
  • Survenant préférentiellement après 70 ans.
  • ECG de surface le plus souvent normal.
  • Diagnostic sur le holter-ECG de 24 heures, l'enregistrement endocavitaire, voire sur le holter implantable.
  • Traitement : stimulateur cardiaque.

Tachycardies supraventriculaires et ventriculaires

  • La fibrillation et le flutter auriculaires sont très rarement syncopaux.
  • La tachycardie ventriculaire est grave (risque de fibrillation ventriculaire).
  • Diagnostic sur l'ECG : rythme rapide, QRS larges et dissociation auriculoventriculaire.
  • Traitement en urgence : choc électrique externe par un défibrillateur externe en cas de mauvaise tolérance hémodynamique (hypotension sévère, troubles de vigilance) ou antiarythmiques.

Torsades de pointes

  • Graves (risque de fibrillation ventriculaire) et reconnues sur l'ECG, elles peuvent compliquer une bradycardie, un traitement antiarythmique ou révéler une hypokaliémie, une hypercalcémie. Le syndrome du QT long congénital est exceptionnel.
  • Traitement : injection IV de magnésium et correction d'un trouble métabolique (recharge potassique, etc.) ou traitement de la bradycardie.
Par obstacle à l'éjection ou au remplissage ventriculaire
  • Rétrécissement aortique serré et cardiomyopathie obstructive.
  • Syncopes d'effort, avec dyspnée et souffle éjectionnel.
  • Tamponnade, myxome de l'atrium (syncopes aux changements de position).
  • Diagnostic : échographie cardiaque.

4. Syncopes inexpliquées

En cas de diagnostic hésitant entre les différents types de syncope ou entre syncope et autres types de malaise ou pertes de connaissance ou quand les épisodes se reproduisent, il peut être utile de recourir à un tilt-test : après une période de repos de 10 minutes en décubitus, le patient est verticalisé sur une table basculante, à un angle de 70° pendant 30 minutes. La pression artérielle (PA) et la fréquence cardiaque (FC) sont régulièrement enregistrées. Le test est considéré comme étant positif s'il permet de reproduire la symptomatologie, synchrone de modifications de la PA et de la FC. Il est ainsi possible de faire la preuve d'un mécanisme neurocardiogénique (vasovagal) quand la PA et/ou la FC chutent de manière significative.
En cas de syncopes récurrentes inexpliquées, y compris après test d'inclinaison, massage carotidien et exploration endocavitaire, on peut être amené à proposer l'implantation d'un enregistreur ECG (holter implantable) permettant de suivre la fréquence cardiaque jusqu'à 18 mois si besoin.

IV. Crises d'épilepsie généralisées et crises psychogènes non épileptiques

A. Crises d'épilepsie généralisées tonicocloniques (CGTC)

1. Arguments généraux du diagnostic

  • Début soudain sans prodromes (les prodromes sont possibles s'il s'agit d'une crise focale secondairement généralisée).
  • Perte de connaissance prolongée : plusieurs dizaines de minutes, incluant la crise elle même (environ 3 minutes) et le coma puis la confusion post-critique; d'où une reprise de conscience progressive dans le camion du SAMU ou aux urgences.
  • Séquence en trois phases :
    • tonique (hypertonie en extension des quatre membres, avec cyanose) ;
    • clonique (secousses régulières puis espacées);
    • résolutive (hypotonie et respiration bruyante).

2. Éléments inconstants

  • Morsure du bord latéral de la langue, lors de la phase tonicoclonique.
  • Aura épileptique : prodromes correspondant à une crise focale secondairement généralisée.
  • Chute traumatisante et perte d'urines (relâchement du tonus sphinctérien si vessie pleine) n'ont pas de valeur diagnostique particulière.

3. Investigation et traitement

(Pour plus de details : cf. chapitre 15, item 105.)

  • L'EEG n'est pas nécessaire lorsque le malade est épileptique connu (ce qui constitue en soi un argument). En cas de crise inaugurale, un EEG doit pouvoir être réalisé dans les premières 24 heures afin d'identifier des éléments diagnostiques en faveur d'une épilepsie focale ou généralisée sous-jacente (avec risque de récidives de crises). Il permettra égale- ment d'orienter le diagnostic étiologique de cette crise (signes d'encéphalite, signes d'hématome sous-dural...). L'apport diagnostique de l'EEG réalisé après la crise d'épilepsie est d'autant plus grand qu'il est réalisé dans les 24 heures suivant la crise. Un EEG normal n'exclut en rien le diagnostic.
  • Pendant la crise généralisée tonicoclonique : éviction des objets contondants, protéger le patient d'éventuels chutes et traumatismes, position latérale de sécurité, oxygénothérapie si possible, ne rien mettre dans la bouche, surveillance.
  • Au décours de la crise : aucun traitement urgent ne s'impose; si une deuxième crise sur- vient sans reprise d'un état neurologique normal du patient, injection de 1 mg IV de clonazépam (Rivotril®).
  • Si le malade est épileptique connu : chercher un facteur déclenchant (manque de sommeil, alcoolisation, fièvre), une mauvaise observance thérapeutique et, si besoin, réévaluer le traitement.
  • Si première crise généralisée tonicoclonique, isolée ou non : réaliser un bilan biologique usuel, un EEG et un scanner cérébral (ou une IRM si l'examen est accessible) ; l'imagerie cérébrale doit être réalisée en urgence si des symptômes évocateurs d'une crise focale secondairement généralisée (céphalées, déficits) sont associés, même en cas de crise « circonstancielle », notamment une alcoolisation. Pour plus de précisions sur le traitement, cf. chapitre 15.

B. Crises psychogènes non épileptiques

1. Arguments généraux du diagnostic

  • Perte de connaissance de durée variable (brêve voir prolongée de plusieurs heures).
  • Les symptomes cliniques associés sont variables mais si présents, évocateurs :
    • mouvements des membres anarchiques, corps arc-bouté (opisthotonos), mouvements du bassin, prise de postures dystoniques et mouvements anarchiques et asynchrones des membres, hyperventilation, cris. Absence de séquence tonicoclonique ;
    • fluctuations de l'intensité des symptômes pendant la crise ; 
    • résistance à l'ouverture des yeux et éviction des traumatismes; absence, habituellement, de blessure ou de perte d'urines mais cela peut s'observer ; 
    • les malaises surviennent en règle générale de manière brutale et d'emblée se répètent de manière très fréquente. Cette fréquence induit des conséquences sociales, professionnelles et scolaires d'emblée importantes et conduit à de multiples prises en charge aux urgences. 
  • Il faut noter que les crises psychogènes non épileptiques peuvent mimer un état de mal épileptique. Un EEG doit pouvoir être réalisé dans ce cadre avant une intensification thérapeutique délétère. 
  • Contexte biographique et antécédents psychiatriques : contexte traumatique fréquent : abus sexuels dans l'enfance, conflit familial, conjugal ou scolaire et professionnel. 

2. Investigations et traitement

  • Éviter les actes invasifs (intubation, etc.) et les examens complémentaires itératifs.
  • Annonce diagnostique.
  • Psychothérapie, notamment prise en charge du traumatisme.
  • Traitement psychotrope antidépresseur si dysthymie associée.

Le diagnostic différentiel avec celui de crises d'épilepsie peut être parfois difficile. C'est particulièrement le cas lorsque ces crises psychogènes non épileptiques s'intègrent dans une maladie épileptique connue (association des deux manifestations fréquentes). Le recours à la vidéo-EEG (avec épreuves d'activation : hyperpnée, stimulation lumineuse intermittente) peut s'avérer très utile. Les crises psychogènes non épileptiques sont très facilement enregistrées lors de ces enregistrements et l'absence d'anomalie électroencéphalographique lors de la sur- venue de la crise pose le diagnostic avec certitude.

V. Autres malaises et pertes de connaissance

Situations fréquentes aux urgences.

A. Malaises sans véritable perte de connaissance

1. Attaques de panique

  • Épisodes de plusieurs dizaines de minutes, sans perte de connaissance vraie.
  • Vive anxiété, sensation de mort imminente.
  • Symptômes somatiques : oppression thoracique, «tête vide», palpitations, striction laryngée, sueurs, tremblements, vue brouillée, etc. L'hyperventilation, des paresthésies des extrémités et péribuccales (parfois latéralisées), et un spasme carpopédal (« main d'accoucheur ») réalisent la classique « crise de tétanie ». Une injection de benzodiazépine apaise rapidement la symptomatologie.

2. Éthylisme aigu

  • Agitation et agressivité, somnolence ou coma.
  • Diagnostic facile (haleine, habitus, contexte, alcoolémie).
  • Systématiquement évoquer une hypoglycémie, une intoxication médicamenteuse, un traumatisme crânien associés.
  • Une crise d'épilepsie généralisée peut survenir lors d'une alcoolisation aiguë ou lors d'un sevrage.

3. Hypoglycémie

  • Elle n'est jamais syncopale.
  • «Malaise hypoglycémique» : sensation de faim, sueurs, céphalées, troubles visuels, pouvant régresser spontanément ou évoluer vers une confusion mentale, un trouble de la vigilance (somnolence, obnubilation, coma) et des convulsions épileptiques.
  • Il s'agit le plus souvent d'un diabétique connu et traité. Le dosage de la glycémie est systématique devant tout malaise atypique ou inexpliqué.

4. Accident ischémique transitoire vertébrobasilaire

Il peut comporter des sensations de malaise au contenu variable (vertiges ou déséquilibre, céphalées postérieures, nausées, troubles visuels) mais pas de perte de connaissance isolée.

B. Malaises avec perte de connaissance

1. Traumatisme crânien

Une syncope simple ou convulsivante, une crise d'épilepsie généralisée tonicoclonique peuvent survenir au décours immédiat d'un traumatisme crânien. En l'absence de circonstances accidentelles, la question d'un traumatisme crânien secondaire à une syncope ou à une crise d'épilepsie généralisée tonicoclonique peut se poser, mais n'est généralement pas soluble et ne modifie pas la prise en charge pratique : surveillance pendant 24 heures et scanner cérébral ou autres explorations au moindre doute d'une étiologie non traumatique.

2. Perte de connaissance et douleur thoracique

Formes syncopales d'angor, d'embolie pulmonaire.

C. Autres situations plus rares

1. Crises d'épilepsie focales

Parmi les crises focales comportant un trouble de conscience ou du contact, l'une des mieux connues est la crise d'épilepsie temporale : d'une durée de 2 à 3 minutes, elle est stéréotypée pour un même malade et comporte une sensation épigastrique ascendante, un arrêt d'activité avec rupture de contact, fixité du regard, mouvements de mâchonnement ou de déglutition, activité gestuelle simple (frottement, etc.).

2. Ictus amnésique

Ce n'est pas une perte de connaissance stricto sensu mais un oubli à mesure de plusieurs heures, pendant lesquelles le sujet pose les mêmes questions de façon itérative, tout en gardant un comportement par ailleurs adapté.

3. Narcolepsie-cataplexie

Elle est très rare, mais doit être identifiée : il s'agit de brusques accès de sommeil irrépressibles, pluriquotidiens, associés ou non à des chutes par hypotonie (cataplexie) (cf. chapitre 20, item 110, «Troubles du sommeil de l'enfant et de l'adulte»).