Objectifs pédagogiques

Item 95. Radiculalgie et syndrome canalaire
  • Savoir diagnostiquer une radiculalgie et un syndrome canalaire.
  • Identifier les situations d'urgence et planifier leur prise en charge.

Item 96. Neuropathies périphériques

  • Connaître les différentes formes de neuropathies périphériques et connaître l'orientation étiologique.
  • Connaître l'urgence du diagnostic et de la prise en charge des mononeuropathies multiples.

Item 97. Polyradiculonévrite aiguë inflammatoire (syndrome de Guillain-Barré)

  • Diagnostiquer un syndrome de Guillain-Barré.
  • Identifier les situations d'urgence et connaître les grands principes de prise en charge.

Hiérarchisation des connaissances


L'atteinte du système nerveux périphérique est définie par l'ensemble des manifestations cliniques, électriques, biologiques et histologiques résultant d'une atteinte du neurone périphérique.

Le système nerveux périphérique est composé (figures 7.1 et 7.2) :

  • de fibres motrices efférentes : le corps cellulaire est situé dans la corne antérieure de la moelle spinale; l'axone quitte la moelle spinale par la racine antérieure et chemine jusqu'au muscle strié squelettique où il tient sous sa dépendance une centaine de fibres (unité motrice) ;
  • de fibres sensitives afférentes : le corps cellulaire est situé dans le ganglion spinal de la racine postérieure ; leur destinée médullaire les oppose en trois groupes :
    • lemniscales, dont les fibres cheminent dans les cordons postérieurs homolatéraux et véhiculent la sensibilité épicritique et proprioceptive consciente ;
    • spinothalamiques, dont les fibres, qui décussent au niveau du métamère médullaire, véhiculent de façon controlatérale le tact grossier et la thermoalgie ;
    • spinocérébelleuses, dont les fibres décussent au niveau du métamère médullaire pour le membre supérieur et empruntent une voie directe pour le membre inférieur, véhiculant la proprioception inconsciente;
  • de fibres végétatives (voies efférentes sympathiques et parasympathiques) : le corps cellulaire du neurone préganglionnaire est situé dans le tronc cérébral ou la moelle spinale; l'axone quitte le système nerveux central par le trajet des nerfs crâniens (III, VII, IX, X) ou des racines antérieures médullaires pour faire un relais avec le neurone post-ganglionnaire innervant muscles lisses et glandes. 
    Les fibres nerveuses sont constituées d'axones (cellules nerveuses), de cellules de Schwann (myéline) et de tissus de soutien (vaisseaux et conjonctif). Les lésions élémentaires des fibres nerveuses sont :
  • la dégénérescence wallérienne : désintégration progressive myélino-axonale puis bouquets de régénérescence axonale (clusters);
  • la démyélinisation segmentaire : mise à nu progressive des axones par destruction de la myéline au niveau des nœuds de Ranvier qui s'élargissent anormalement.

Au plan anatomique, le système nerveux périphérique débute à l'émergence des radicelles ventrales et dorsales à partir de la moelle épinière. Ces radicelles fusionnent en racines ventrales et dorsales. Ces paires de racines se rejoignent pour former un nerf spinal (souvent appelé à tort «racine nerveuse») au niveau du trou de conjugaison intervertébral. Le nerf spinal quitte le canal vertébral à travers le foramen intervertébral. Ce nerf est court et se divise presque immédiatement en un rameau dorsal et ventral. Les rameaux ventraux cervicaux, lombaires et sacrés vont former des plexus. Par exemple, le plexus cervical est formé de l'union des rameaux ventraux des nerfs spinaux (appelés à tort « racines ») C5 à D1. Les inter- connexions qui s'effectuent dans le plexus résultent en la formation de trois troncs nerveux importants (radial, médian, ulnaire) et d'autres nerfs moins importants au membre supérieur (figure 7.3).

Fig. 7.1. Système nerveux périphérique : émergence du nerf spinal de la moelle spinale.
(Source : CEN, 2019, illustration de Carole Fumat.)

Fig. 7.2. Système nerveux périphérique : fibres sensitives, nerf spinal et voies ascendantes.
(Source : CEN, 2019.)

Item 95 – Radiculalgies et syndromes canalaires

I. Mononeuropathies : syndromes canalaires et compressions posturales
II. Radiculopathies
III. Atteintes plexiques (plexopathies)

I. Mononeuropathies : syndromes canalaires et compressions posturales

  • Les syndromes canalaires sont liés à des compressions des nerfs périphériques dans des zones anatomiques étroites pour le cheminement du nerf.
  • Les compressions dites posturales surviennent dans des zones anatomiques localisées où le nerf est superficiel et donc vulnérable à une compression externe.
  • La symptomatologie est importante à connaître pour établir le diagnostic différentiel avec les radiculalgies (tableau 7.1, figures 7.4 et 7.5).

Fig.7.3. Organisation anatomique de l'émergence des radicelles, des racines nerveuses et du plexus brachial.
(Source : )

Fig. 7.4. Territoires tronculaires.
(Source : CEN, 2019, illustration : Hélène Fournié.)

Fig. 7.5. Territoires radiculaires.
(Source : CEN, 2019, illustration : Hélène Fournié.)

  • Le trouble initial est lié à un blocage de la propagation de l'influx secondaire à la compression (bloc de conduction).
  • Lorsque la compression est sévère et prolongée, les lésions initiales se compliquent d'une dégénérescence axonale.
  • L'ENMG montre le bloc de conduction et établira l'importance de la perte axonale éventuelle (cf. infra figure 7.12) ; schématiquement :
    • l'atteinte initiale se traduit par un ralentissement ou un blocage de la conduction nerveuse ;
    • la dégénérescence axonale se traduit par une diminution de la réponse motrice ou sensitive en aval du site lésionnel avec des signes de dénervation des fibres musculaires (tracé neurogène) (cf. infra figure 7.10).

A. Clinique

  • Le plus souvent, atteinte de troncs nerveux sensitivo-moteurs (nerfs mixtes).
  • Plus rarement, la symptomatologie est purement sensitive ou à prédominance sensitive (paresthésies).
  • Une atteinte purement motrice doit conduire à remettre le diagnostic en cause (cf. infra item 96).
  • L'examen objective le territoire anatomique du déficit moteur et sensitif.
  • Une amyotrophie traduit l'existence d'une atteinte axonale déjà évoluée (figure 7.6).

Fig. 7.6. Amyotrophie sévère du muscle court abducteur du pouce en cas de syndrome du canal carpien évolué.
(Source : CEN, 2019.)

B. Examens complémentaires

1. Électroneuromyographie

(Vidéo 7.1)

L'ENMG est fondamental au double plan diagnostique et pronostique.

  • L'électromyogramme proprement dit (examen de détection) :
    • précise la topographie tronculaire de l'atteinte motrice ;
    • décèle des signes neurogènes dans les muscles atteints ;
    • détecte des signes d'activités spontanées de dénervation en faveur d'une dégénérescence axonale;
    • suit la récupération (augmentation de l'amplitude du potentiel moteur, diminution du pourcentage de bloc de conduction, amélioration de la vitesse de conduction).
  • L'étude de la conduction nerveuse (examen de stimulodétection) évalue sur les fibres motrices :
    • ralentissement localisé ou bloc de conduction, diminution d'amplitude du potentiel d'action distal (atteinte axonale et perte en fibres) ;
    • diminution d'amplitude du potentiel d'action sensitif.
  • Cette atteinte localisée définit le site de la compression :
    • nerf médian au canal carpien;
    • nerf ulnaire au coude;
    • nerf fibulaire au col du péroné.
  • Une exploration élargie aux autres nerfs permet quelquefois de déceler des atteintes infra- cliniques dans d'autres sites canalaires ou de mettre en évidence une neuropathie diffuse (diabète, neuropathie par susceptibilité à la pression).

2. Autres examens

Le plus souvent aucun autre examen n'est nécessaire. Un bilan biologique simple peut être effectué, comprenant :

  • glycémie à jeun;
  • numération formule sanguine avec vitesse de sédimentation (augmentée en cas de vascularite).

Et, selon le contexte, toujours dans un second temps :

  • recherche d'une délétion du gène de la PMP22 ;
  • recherche d'une hypothyroïdie;
  • recherche d'une mutation du gène de la transthyrétine ;
  • recherche de dépôts de substance amyloïde sur une biopsie des glandes salivaires ;
  • à part, car contexte évident, bêta-HCG au cours de la grossesse.

C. Signes de gravité

1. Clinique

  • La présence d'un déficit moteur constitué.
  • L'apparition d'un déficit moteur.
  • Une amyotrophie constituée ou se développant.
  • La douleur est tant que telle n'est pas un signe de gravité.

2. Neurophysiologie

  • L'existence de signes d'activités spontanées de dénervation en faveur d'une dégénérescence axonale.
  • La diminution de l'amplitude du potentiel moteur.

D. Diagnostics différentiels

  • Une mononeuropathie, forme débutante de mononeuropathie multiple, secondaire à une vascularite. Une mononeuropathie douloureuse aiguë est suspecte de vascularite. Un électroneuromyogramme à la recherche de signes en faveur d'une mononeuropathie multiple est urgent, pour une prise en charge thérapeutique urgente.
  • Une radiculopathie. L'existence d'un trouble sensitif ou de douleurs dépassant le territoire tronculaire, ou d'un déficit moteur proximal permettront d'évoquer le diagnostic. L'ENMG rétablira le diagnostic de radiculopathie en montrant une normalité du potentiel sensitif et des signes neurogènes dans le territoire atteint.
  • Une neuropathie motrice à blocs de conduction persistants. L'atteinte est motrice pure et associée à la présence d'anticorps anti-GM1 dans plus de la moitié des cas. Le bloc de conduction se situe en dehors des zones de rétrécissement anatomique.
  • Une forme débutante de maladie du motoneurone (sclérose latérale amyotrophique). L'atteinte est motrice pure. La topographie du déficit moteur n'est pas tronculaire.

E. Grands syndromes

1. Nerf médian au canal carpien (le plus fréquent)

(Vidéo 7.2)

a. Symptômes et signes sensitifs
  • Paresthésies, souvent douloureuses, nocturnes, systématisées dans le territoire du nerf médian (trois premiers doigts) et affectant préférentiellement le côté dominant.
  • Hypoesthésies à tous les modes de la face palmaire des trois premiers doigts.
  • Fréquent signe de Tinel (dysesthésies dans les doigts lors de la percussion du canal carpien) et un signe de Phalen (reproduction de l'engourdissement et des paresthésies lors de la flexion forcée du poignet).
b. Symptômes et signes moteurs
  • Faiblesse de la main, lâchage d'objets, difficulté pour mettre les boutons ou tourner une clé dans une serrure.
  • Déficit des muscles de la partie latérale de l'éminence thénar (court abducteur du pouce, opposant).
  • Tardivement, amyotrophie thénarienne.
c. Causes
  • Le plus souvent mécanique (hyperactivité, travail manuel).
  • Penser aux causes plus rares :
    • neuropathie amyloïde (y penser en cas de découverte ou d'une association à une polyneuropathie axonale avec dysautonomie);
    • hypothyroïdie ;
    • grossesse.
d. Traitement
  • Parfois spontanément résolutif si peu sévère et à prédominance sensitive.
  • Dans un premier temps, infiltration de corticoïdes en suspension dans le canal carpien.
  • En cas d'échec : chirurgie (section du ligament transverse du carpe).

2. Nerf ulnaire au coude

a. Symptômes et signes sensitifs
  • Paresthésies des 4e et 5e doigts.
  • Hypoesthésie du territoire du nerf à la main.
b. Symptômes et signes moteurs
  • Déficit moteur des muscles intrinsèques de la main (interosseux) et respect du muscle fléchisseur ulnaire du carpe.
  • Amyotrophie des espaces interosseux (surtout le premier espace) et de l'éminence hypothénar.
c. Causes
  • Compression dans la gouttière épitrochléo-olécrânienne, notamment lors de l'appui prolongé (exemple le coude appuyé sur une table).
  • Ou compression par un cal osseux ancien consécutif à une fracture du coude.
d. Traitement
  • Immobilisation du coude par attelle de repos dans un premier temps.
  • Traitement chirurgical, si nécessaire (transposition du nerf ulnaire de la gouttière épitro-chléo-olécrânienne à la partie antéromédiale de l'avant-bras).

3. Nerf radial dans la gouttière humérale

a. Symptômes et signes sensitifs
  • Peu ou pas présents.
  • Territoire : 1er espace interosseux dorsal.
b. Symptômes et signes moteurs
  • Déficit moteur de l'ensemble du territoire sous-jacent (muscle brachioradial et extenseurs des doigts et du poignet) responsable d'une main tombante.
  • Respect du muscle triceps et du réflexe tricipital.
c. Causes
  • Fractures de l'humérus.
  • Lors de compression externe prolongée du nerf dans la gouttière humérale (paralysie posturale : bras comprimé sous une tête ou le corps en décubitus latéral).
d. Traitement

La compression externe prolongée est le plus souvent spontanément résolutive, mais la chirurgie peut être nécessaire en cas de fracture humérale.

4. Nerf fibulaire

a. Symptômes et signes sensitifs
  • Déficit sensitif discret intéressant une zone cutanée du dos du pied (cou-de-pied).
  • Pouvant s'étendre sur la face latérale de la jambe.
b. Symptômes et signes moteurs
  • Déficit des muscles de la loge antérolatérale de jambe (fibulaire, tibial antérieur, long extenseur des orteils, long extenseur de l'hallux, court extenseur des orteils).
  • L'ensemble réalise un steppage lors de la marche.
c. Causes
  • Compression externe aiguë indolore : paralysie posturale :
    • appui prolongé sur la région de la tête de la fibula ;
    • position assise jambes croisées;
    • position allongée et amaigrissement (séjour en réanimation) ;
    • travail en position agenouillée.
  • Vascularite : paralysie aiguë douloureuse.
d. Traitement
  • Abstention en cas d'atteinte posturale aiguë.
  • Chirurgie en cas de formes progressives ou si une cause locale de compression a été trouvée (kyste synovial articulaire de la fosse poplitée).

II. Radiculopathies

Les radiculopathies sont les pathologies de la racine nerveuse, zone du système nerveux périphérique située entre l'émergence de la moelle épinière et le foramen intervertébral (cf. figure 7.1).

A. Complications neurologiques de la pathologie rachidienne lombaire

Ces complications sont dues le plus souvent à des lésions dégénératives osseuses acquises (arthrosiques) et/ou discales (conflit discoradiculaire), responsables d'une sténose progressive du canal vertébral. Plus rarement, il peut s'agir d'une cause tumorale, telles les lésions intradurales (tumeurs radiculaires : neurinomes ; du filum : épendymomes) et les lésions épidurales (métastases ostéo-épidurales), ou infectieuses (spondylodiscites).
Aux membres inférieurs, les radiculopathies L5 et S1 sont improprement appelées «sciatiques» . Le nerf sciatique étant le principal tronc nerveux du membre inférieur, son atteinte ne correspond pas à une radiculopathie.

1. Symptômes cliniques

La symptomatologie comporte :

  • des douleurs rachidiennes lombaires pouvant être aiguës (lumbago responsable d'une contracture réflexe), volontiers à l'issue d'un effort de soulèvement, ou chroniques évoluant de façon insidieuse;
  • une douleur radiculaire (radiculalgie) :
    • unilatérale, partant de la région lombaire basse et adoptant le trajet correspondant à la racine concernée jusqu'au pied :
      • L5 : dessus du pied (cou-de-pied) jusqu'au gros orteil,
      • S1 : dessous du pied,
    • ce trajet peut être tronqué, c'est-à-dire limité à une zone du trajet radiculaire complet, par exemple jusqu'au genou ou uniquement à la jambe et au pied; la douleur est typiquement mécanique, accentuée par les efforts, la station debout, calmée par le décubitus ; elle peut être impulsive à la toux ou aux efforts de défécation :
      • radiculalgie S1 : face postérieure de la fesse, de la cuisse, du mollet jusqu'au talon, plante du pied et 5e orteil,
      • radiculalgie L5 : partie postéro-latérale de la cuisse, face latérale de jambe jusqu'au dos du pied et aux premiers orteils ; quelquefois trajet inguinal associé,
      • radiculalgie L4 : face antérolatérale de la cuisse, bord antérieur de la jambe, malléole médiale, rarement gros orteil,
      • radiculalgie L3 : partie postéro-médiale puis antéromédiale de la cuisse, sans dépasser le genou;
  • un déficit moteur :
    • mineur ou modéré, fréquemment observé, correspondant aux muscles innervés par la racine correspondante,
    • complet et aigu en cas de sciatique paralysante.

2. Examen clinique

Il comporte un examen du rachis lombaire et un examen neurologique.

a. Signes rachidiens

Ils sont soit spontanés (effacement de la lordose lombaire, inflexion latérale du côté opposé à la douleur), soit responsables d'une limitation des mouvements (flexion antérieure du tronc : mesure de la distance doigts-sol ou de l'indice de Schöber ; inflexions latérales).

b. Signes radiculaires
  • Signe de Lasègue (en décubitus dorsal, l'élévation du membre inférieur va reproduire la douleur radiculaire L4, L5 ou S1 à partir d'un certain angle par rapport au plan du lit).
  • Signe de Léri (en décubitus ventral, l'hyperextension de la cuisse sur le bassin, membre inférieur en extension, peut reproduire une douleur L3 ou L4).
  • Signes moteurs déficitaires du territoire radiculaire correspondant.
  • Troubles de la sensibilité dans le territoire radiculaire.
  • Anomalie des réflexes tendineux (cf tableau 7.1) :
    • abolition du réflexe calcanéen (achilléen) signant l'atteinte radiculaire S1 ;
    • abolition du réflexe patellaire (rotulien) lors des atteintes L3 ou L4 ;
    • à noter : pas de perte de réflexe en cas d'atteinte L5.

c. Atteinte pluriradiculaire par atteinte de la queue de cheval
  • Interrogatoire : troubles urinaires (perte ou rétention d'urines), anaux (constipation, perte des selles) et sexuels (troubles de l'érection).
  • Examen : insensibilité périnéale.
  • Une compression pluriradiculaire (par exemple, par une hernie discale) doit être recherchée en urgence.

3. Examens complémentaires

  • Pas d'exploration systématique en raison de l'extrême fréquence de la lombalgie et des radiculopathies, en particulier aux membres inférieurs («sciatique»).
  • Un bilan complémentaire est demandé devant une aggravation des symptômes et des signes cliniques ou leur persistance (figures 7.7 et 7.8).
  • IRM lombaire :
    • en cas de persistance des symptômes, malgré un traitement médical bien conduit au delà de 6 semaines et/ou d'un déficit neurologique franc ;
    • l'IRM permettra de confirmer le diagnostic de radiculopathie liée à une pathologie discale ou rachidienne dégénérative, mais elle a également pour objectif de visualiser l'ensemble de la queue de cheval à la recherche d'autres causes plus rares de radiculopathies :
      • les lésions intradurales (tumeurs radiculaires : neurinomes ; du filum : épendymomes) et les lésions épidurales (métastases ostéo-épidurales),
      • un débord discal venant au contact du sac dural souvent latéralisé du côté symptomatique responsable d'un conflit (effet de masse) avec la racine passant en regard du disque (par exemple, hernie discale postéro-latérale L5 en regard du disque L4-L5), voire plusieurs racines,
      • une hernie foraminale qui comprime la racine sus-jacente (L4 pour le disque L4-L5).
  • Scanner lombaire, moins fréquent, sans et avec injection de produit de contraste :
    • les fenêtres osseuses montrent l'arthrose des apophyses articulaires postérieures et le retentissement sur la partie latérale du canal rachidien (canal déformé «en feuille de trèfle ») ;
    • il montre également la hernie discale et ses rapports avec le canal vertébral.

Fig. 7.7. Hernie discale L2-L3 avec protrusion médiane ascendante réalisant une compression focale des racines de la queue de cheval à cet étage.
Coupes sagittales : délimitation de la hernie par les flèches blanches.
Coupes transversales : T1 : hernie médiane (flèches blanches) et fourreau dural repoussé (têtes de flèches blanches). T2 : hernie médiane (flèches noires) et fourreau dural repoussé (têtes de flèches rouges).
(Source : création de l'auteur)

Fig. 7.8. Hernie postéro-latérale gauche L5-S1 en hypersignal modéré (potentiellement exclue), conflictuelle avec l'émergence durale de la racine S1 gauche (flèches blanches).
(Source : création de l'auteur)

4. Traitement

Traitement médical dès le début des symptômes sur les seuls éléments cliniques.

B. Complications neurologiques de la pathologie rachidienne cervicale

Les manifestations sont consécutives à une hernie discale, apparue le plus souvent sans cause déclenchante, ou aux lésions uncodiscarthrosiques des vertèbres cervicales rétrécissant le foramen vertébral.

1. Symptômes et examen clinique

  • Symptômes : douleur exacerbée par les mouvements du rachis, les efforts de toux et parfois le décubitus.
  • Examen clinique :
    • limitation douloureuse des mouvements du rachis cervical ;
    • contracture des muscles cervicaux;
    • la mobilisation peut réveiller la douleur radiculaire.
  • Recherche d'un déficit moteur, sensitif, d'une modification (diminution ou abolition) d'un réflexe tendineux.
  • Atteinte radiculaire (névralgie cervicobrachiale) : la cervicalgie intéresse la nuque, la douleur se poursuit sur l'épaule puis le membre supérieur en suivant une topographie orientant vers le niveau radiculaire :
    • douleur C5 : face latérale du moignon de l'épaule et du bras ;
  • douleur C6 : antérieure à l'épaule, au bras, au coude, à l'avant-bras pour se terminer dans les deux premiers doigts de la main (pouce) ;
    • douleur C7 : postérieure au bras, au coude, à l'avant-bras et à la main et irradiante dans les trois doigts moyens (index-médius);
    • douleur C8 : bord médial du membre supérieur, se terminant dans les deux derniers doigts ;
    • douleur T1 : face médiale du bras.
  • Myélopathie cervicale : il convient de dépister une souffrance médullaire éventuellement associée (atteinte pyramidale, troubles sensitifs et sphinctériens, signe de Lhermitte).

2. Examens complémentaires

L'IRM est l'examen essentiel. Elle objective l'ensemble du rachis cervical et définit le diamètre sagittal du canal rachidien. Elle apprécie l'effacement des espaces sous-arachnoïdiens et d'éventuelles anomalies du signal intramédullaire sur les séquences pondérées en T2, témoignant d'une souffrance médullaire.

3. Traitement

a. Traitement médical

Le traitement médical (repos, anti-inflammatoires, antalgiques, voire corticothérapie par voie orale à raison de 1 mg/kg durant 10 à 15 jours, collier cervical) est toujours préconisé en première intention.
La plupart des névralgies cervicobrachiales guérissent en 4 à 6 semaines.

b. Traitement chirurgical

Le traitement chirurgical, d'indication rare, consiste en l'exérèse de la hernie discale (hernie molle généralement post-traumatique) ou, plus rarement, en une décompression de la racine dans le foramen rétréci par un ostéophyte de l'uncus (voie antérieure, un ou plusieurs niveaux selon les données de la clinique et de l'imagerie).
Ce traitement est parfois indiqué en urgence, en cas d'atteinte déficitaire sévère.
En cas d'atteinte médullaire associée, la chirurgie rapide permet une stabilisation des troubles neurologiques anciens et, parfois, des améliorations des déficits récents.

C. Diagnostic différentiel
  • Une mononeuropathie – syndrome canalaire – lorsque la radiculopathie est tronquée. La douleur est alors limitée à une partie du territoire de la radiculopathie. Par exemple, douleur de la face postérieure de la cuisse au cours d'une radiculopathie S1, douleur du cou-de-pied et de l'espace entre le 1er et le 2e orteil dans une radiculopathie L5.
  • Une méningoradiculite, infectieuse ou infiltrative (cf. ci-dessous).
  • Une plexopathie si les douleurs et le déficit est d'allure pluriradiculaire (cf. ci-dessous).
D. Méningoradiculites après morsure de tique

Borrelia burgdorferi, spirochète vecteur de la maladie de Lyme transmis par une tique (Ixodes), peut être responsable de manifestations dermatologiques (l'erythema chronicum migrans) à la phase initiale de l'infection.
L'absence de traitement par bêtalactamines ou cyclines peut être suivie :

  • de lésions viscérales polymorphes quelques mois après l'infestation initiale : arthrite, récidive d'erythema chronicum migrans, voire bloc auriculoventriculaire ;
  • et d'une méningoradiculite :
    • définie par l'association d'une méningite et d'une atteinte radiculaire,
    • touchant 10 à 20 % des patients.
1. Clinique

Elle est caractérisée par :

  • des douleurs radiculaires très intenses, diurnes et nocturnes, volontiers pluriradiculaires et asymétriques, associées à un déficit sensitivo-moteur dans les territoires atteints, à proximité du site de la morsure;
  • une atteinte faciale, parfois bilatérale, dans près de 50 % des cas (surtout chez l'enfant). Le syndrome méningé est souvent au second plan et se traduit avant tout par des céphalées.
2. Explorations
  • L'examen du LCS montre une augmentation du nombre de cellules à prédominance lym-phocytaire, une hyperprotéinorachie, alors que la glycorachie est normale. L'isoélectrofocatisation des protéines du LCS montre une répartition oligoclonale des protéines (bandes).
  • L'ENMG montre des tracés neurogènes dans les muscles innervés par les racines intéressées.
3. Diagnostic

Posé par :

  • une sérologie positive dans le sang et le LCS (après avoir écarté une sérologie croisée avec le tréponème) avec synthèse intrathécale d'anticorps spécifiques ;
  • un résultat positif par une technique ELISA (dépistage) doit être confirmé par un résultat positif en western blot.
4. Diagnostic différentiel en cas de méningoradiculite non infectieuse

Infiltration méningée au cours d'une pathologie hématologique ou d'une méningite carcinomateuse.

5. Traitement

L'antibiothérapie parentérale par ceftriaxone (2 g par jour pendant 15 à 21 jours consécutifs) permet une régression rapide des manifestations, principalement des douleurs dans un premier temps.

E. Méningoradiculites infiltratives
  • Leucémie et lymphomes peuvent être révélés par une atteinte radiculaire avec infiltration méningée.
  • Le diagnostic sera évoqué sur l'atteinte rapidement progressive et étagée : atteinte radiculaire asymétrique des membres inférieurs, des membres supérieurs et des nerfs crâniens.
  • Le diagnostic est confirmé sur l'étude en cytométrie de flux des cellules du LCS et par un bilan systémique de l'hémopathie.

III. Atteintes plexiques (plexopathies)

Les plexopathies sont les lésions des plexus nerveux. Les atteintes du plexus brachial sont les plus fréquentes.
Elles sont diagnostiquées sur une atteinte clinique et neurophysiologique non systématisable en termes de troncs nerveux ou d'atteinte radiculaire.

A. Syndrome de Parsonage-Turner

1. Clinique

  • Elle est dominée par une douleur de l'épaule, permanente et insomniante, à type de brûlures, d'arrachement, accrue par la mobilisation de l'articulation et rebelle aux antalgiques.
  • Elle précède de quelques jours une paralysie qui devient rapidement amyotrophique. Ce déficit est en général contemporain d'une régression des douleurs.
  • Il concerne surtout les muscles innervés par les branches du plexus brachial supérieur (del-toïde, dentelé antérieur, infra et supra-épineux, parfois le diaphragme), en particulier les nerfs axillaire, suprascapulaire.
  • Il n'y a pas habituellement de fasciculations ; les réflexes sont normaux, parfois diminués ou abolis.
  • Les troubles sensitifs sont en général discrets, localisés au moignon de l'épaule (nerf axillaire).
  • Les signes sont généralement unilatéraux, mais une bilatéralisation n'est pas rare.

2. Explorations

  • L'ENMG précise l'étendue de l'atteinte (tracés neurogènes dans les muscles intéressés) et la normalité des conductions motrices et sensitives des nerfs le plus communément étudiés (radial, ulnaire et médian) car rarement atteints dans cette pathologie. Il est décrit un allongement de certaines latences pour les nerfs proximaux (axillaire, nerf fibulaire superficiel, suprascapulaire).
  • Le LCS est le plus souvent normal ; son examen révèle parfois une discrète hyperprotéinorachie. Il n'est pas systématique.

3. Traitement

  • L'évolution n'est pas toujours favorable, mais doit être évaluée sur une longue période (3 ans).
  • Le traitement repose sur la rééducation.
  • La corticothérapie n'a qu'une action antalgique.

B. Autres atteintes du plexus brachial

1. Plexopathie infiltrative

Le syndrome de Pancoast-Tobias correspond à la compression et l'infiltration du plexus cervical inférieur par une tumeur de l'apex pulmonaire. Elle est responsable d'une atteinte prédominant sur les territoires C8-T1, avec douleurs importantes, et d'un signe de Claude Bernard-Horner.

2. Plexopathies post-radiques

Elles surviennent plusieurs années après une irradiation sus-claviculaire ou axillaire dans les cancers ORL, du sein et les lymphomes, hodgkiniens ou non. Elles sont d'évolution lentement progressive, indolores, asymétriques le plus souvent, avec un déficit sensitif et moteur à prédo minance motrice, avec une aréflexie ostéotendineuse.


Item 96 – Neuropathies périphériques

I. Diagnostiquer les différentes formes de neuropathies périphériques et connaître l'orientation étiologique
II. Distinguer cliniquement une neuropathie périphérique et une sclérose latérale amyotrophique

I. Diagnostiquer les différentes formes de neuropathies périphériques et connaître l'orientation étiologique

L'arbre décisionnel de la figure 7.9 fait la synthèse de cette démarche.
En matière d'introduction, rappelons la classification et la définition des neuropathies périphériques :

  • mononeuropathie : atteinte d'un tronc nerveux;
  • mononeuropathie multiple : atteinte de plusieurs troncs nerveux (multinévrite) ;
  • polyneuropathie : atteinte de toutes les fibres nerveuses, en fonction de leur longueur (atteinte longueur-dépendante);
  • polyradiculoneuropathie : atteinte de l'ensemble des racines nerveuses sensitives et motrices et des troncs nerveux (exemple du syndrome de Guillain-Barré) ;
  • neuronopathie : atteinte du corps cellulaire du neurone (moteur ou sensitif).

A. Diagnostic positif

1. Clinique

Le diagnostic repose sur l'association plus ou moins complète de trois ordres de signes.

a. Signes moteurs

Les signes moteurs associent :

  • une paralysie (déficit complet), ou une parésie (déficit incomplet), flasque ; elle est cotée de 0 à 5 (testing musculaire)3 ;
  • une amyotrophie (retardée de 3 semaines par rapport à la lésion nerveuse en cas d'atteinte aiguë) ;
  • des fasciculations (spontanées ou provoquées par la percussion ou l'exposition au froid); traduisant l'activité spontanée d'une unité motrice, elles sont en faveur d'une lésion proche de la corne antérieure (motoneurone, racine);
  • des crampes au repos;
  • une diminution ou une abolition des réflexes tendineux.
b. Signes sensitifs

Les signes sensitifs sont souvent les premiers à apparaître.

Signes subjectifs
  • Ces sensations anormales sont :
    • des paresthésies (picotements, fourmillements, engourdissements spontanés);
    • des dysesthésies (déclenchées par le tact);
    • des douleurs (brûlures, décharges électriques, striction).
  • La topographie des manifestations douloureuses ou non peut être longueur-dépendante (polyneuropathie) ou tronculaire :
    • la manifestations symétriques distales (aux pieds puis ascendantes) dans le cadre d'une polyneuropathie ;
    • les manifestations tronculaires (d'un nerf mixte) sont limitées au territoire du tronc nerveux, le plus souvent sur une zone limitée de la main ou du pied, sans dépasser le poignet ou la cheville.
  • À différencier des manifestations radiculaires :
    • la douleur radiculaire a un trajet traçant le long d'un membre, augmentée par les manœuvres élevant la pression du LCS (toux, éternuement) et celles étirant la racine (Lasègue, mouvements du cou) en cas d'atteinte mécanique; les signes objectifs sont absents ou discrets;
Atteinte sensitive objective
  • Les troubles concernent les sensibilités superficielle (au tact, ou sensibilité épicritique; à la température et à la piqûre, ou sensibilité thermoalgique) et proprioceptive (altération du sens de position des segments de membre, avec ataxie et signe de Romberg).
  • L'ataxie est évocatrice d'une neuropathie démyélinisante.

3 0 = Pas de contraction. 1 = Contraction faible sans déplacement. 2 = Déplacement faible si pesanteur éliminée. 3 = Déplacement possible contre pesanteur. 4 = Déplacement possible contre résistance. 5 = Force normale ; la réponse idiomusculaire est conservée.

c. Signes neurovégétatifs

Il s'agit :

  • des signes vasomoteurs (œdème, cyanose);
  • des troubles trophiques (peau sèche, squameuse et atrophique) et des phanères (chute de poils, ongles cassants);
  • d'une hypotension orthostatique;
  • d'une impuissance ;
  • des troubles digestifs (diarrhée, constipation, gastroparésie), d'une incontinence urinaire ;
  • d'un trouble de la motilité pupillaire.

d. Autres signes

Ils comportent la recherche de gros nerfs et d'un signe de Tinel (douleur projetée sur le trajet du nerf lors de la percussion de celui-ci).

2. Examens complémentaires

a. Électrophysiologie neuromusculaire (ou électroneuromyographie)

L'électroneuromyographie (ENMG) confirme la nature neurogène du trouble. Elle détermine le mécanisme démyélinisant, axonal ou neuronal.
L'examen comporte deux temps distincts.

Électromyogramme (détection)

L'électromyogramme (analyse à l'aiguille des tracés de repos et en cours de contraction des différents muscles étudiés) montre le caractère neurogène des anomalies : potentiels de fibrillation au repos, appauvrissement du nombre d'unités motrices, accélération de la fréquence des potentiels individualisés (sommation temporelle) et, au maximum, potentiel à fréquence élevée (tracé simple) lors de la contraction (figure 7.10). 
Il donne une indication topographique (tronculaire, radiculaire, diffuse) en fonction des muscles touchés et confirme l'absence de signes myogènes (richesse exagérée des tracés pour un faible effort de contraction, potentiels de faible amplitude très polyphasiques).

Fig. 7.10. Tracé neurogène de dénervation chronique : potentiel polyphasique se répétant à une fréquence élevée (sommation temporelle).
(Source : CEN, 2019.)

Mesure de la conduction nerveuse (examen de stimulodétection)

Elle reflète le mécanisme physiopathologique :

  • neuropathies démyélinisantes :
    • ralentissement des vitesses de conduction motrices (fig. 7.11),
    • allongement des latences des ondes F,
    • allongement des latences distales motrices,
    • dispersion des potentiels d'action,
    • blocs de conduction motrice (rapport diminué entre l'amplitude obtenue par stimulation proximale et celle obtenue par stimulation distale), sans augmentation de la durée du potentiel : on peut les observer au cours des polyradiculonévrites, des neuropathies à blocs de conduction persistants et des neuropathies canalaires (figure 7.12) ;
  • neuropathies axonales :
    • vitesses normales (ou modérément ralenties),
    • baisse d'amplitude du potentiel d'action de la réponse motrice,
    • baisse d'amplitude du potentiel d'action de la réponse sensitive ;
  • neuronopathies sensitives :
    • baisse d'amplitude ou abolition diffuse (aux quatre membres) du potentiel d'action sensitif,
    • normalité des paramètres moteurs;
  • neuronopathies motrices :
    • baisse d'amplitude du potentiel d'action moteur, de topographie variable suivant la cause,
    • normalité des paramètres sensitifs.
b. Liquide cérébrospinal
  • Hyperprotéinorachie isolée dans les polyradiculonévrites, le diabète.
  • Réaction cellulaire dans certaines affections paranéoplasiques.
  • Véritable méningite en cas de pathologies néoplasiques et hématologiques.

Fig. 7.11. Vitesse de conduction ralentie (CV à 18 m/s) et allongement de la latence distale (Lat A1 = 14,7 ms) dans le nerf fibulaire.
(Source : CEN, 2019.)

c. Biopsie du nerf sensitif
  • La biopsie de nerf sensitif permet dans certains cas difficiles de confirmer le mécanisme de la neuropathie (démyélinisation segmentaire, dégénérescence axonale) et oriente le diagnostic étiologique.
  • Elle conduit à amputer un nerf sensitif. Elle n'est donc jamais pratiquée en première intention.
  • Elle est réalisée le plus souvent sur un nerf sensitif de la jambe (branche sensitive du nerf fibulaire ou nerf sural).
  • Elle permet de mettre en évidence des arguments diagnostiques :
    • occlusion artérielle en cas de vascularite et perte axonale fasciculaire ;
    • dépôts d'amylose en cas de neuropathie amyloïde ;
    • lésions inflammatoires et démyélinisation/remyélinisation d'une polyneuropathie inflammatoire démyélinisant chronique.

Fig. 7.12. Aspect de bloc de conduction (vitesse de conduction motrice) proximal du nerf ulnaire dans une neuropathie motrice multifocale.
(Source : CEN, 2019.)

B. Diagnostic différentiel

Il est développé au chapitre 5 (Item 92), ainsi que dans la partie II «Distinguer cliniquement une neuropathie périphérique et une sclérose latérale amyotrophique » (cf. infra).

1. Paralysies centrales

Il s'agit de paralysies spastiques, non amyotrophiantes.

2. Atteintes myogènes

Ce sont des atteintes motrices pures proximales, avec abolition de la réponse idiomusculaire (éléments du diagnostic : données électromyographiques, élévation du taux des enzymes musculaires).

3. Sclérose latérale amyotrophique

Cf. partie II «Distinguer cliniquement une neuropathie périphérique et une sclérose latérale amyotrophique ».

C. Orientation du diagnostic étiologique

1. Classification électroclinique

  • Mononeuropathie : atteinte d'un tronc nerveux (nerf médian, nerf ulnaire, nerf fibulaire) responsable d'une atteinte sensitivo-motrice
  • Mononeuropathie multiple : atteinte de plusieurs troncs nerveux.
  • Polyneuropathie :
    • atteinte de toutes les fibres nerveuses en fonction de leur longueur (atteinte longueur- dépendante, c'est-à-dire commençant par une atteinte distale des membres inférieurs, aux fibres les plus longues);
    • à prédominance sensitive;
    • d'évolution souvent chronique;
    • ataxiante lorsqu'elle est démyélinisante.
  • Polyradiculoneuropathie :
    • atteinte de l'ensemble des racines nerveuses sensitives et motrices et des troncs nerveux (c'est l'exemple du syndrome de Guillain-Barré, cf. infra item 97) ;
    • atteinte relativement symétrique;
    • sensitive et motrice;
    • avec une composante proximale;
    • une aréflexie diffuse en général;
    • une augmentation de la protéinorachie;
    • pouvant être aiguë ou chronique.
  • Neuronopathie :
    • atteinte du corps cellulaire du neurone (moteur ou sensitif) ;
    • les neuronopathies sensitives peuvent avoir plusieurs présentations; la plus caractéristique est l'association de :
      • troubles sensitifs asymétriques non longueur-dépendants touchant les membres (de façon caractéristique, simultanément les membres supérieurs et les membres inférieurs), le tronc ou la face,
      • aréflexie diffuse,
      • ataxie,
      • hyperprotéinorachie aux réactions cellulaires en cas d'origine paranéoplasique,
      • elles peuvent prendre le masque d'une polyneuropathie sur le plan clinique, le diagnostic étant attesté par le LCS et surtout l'abolition diffuse des potentiels sensitifs sur l'examen neurophysiologique,
      • les neuronopathies motrices sont souvent asymétriques ; elles sont souvent un mode d'entrée dans la sclérose latérale amyotrophique et ont alors une distribution qui n'est ni tronculaire ni radiculaire mais plutôt métamérique (cf. infra II « Distinguer cliniquement une neuropathie périphérique et une sclérose latérale amyotrophique »).

2. Orientation étiologique

Elle nécessite au préalable :

  • une démarche clinique :
    • la recherche de formes familiales,
    • la recherche des prises médicamenteuses neurotoxiques;
  • un examen neurophysiologique (ENMG);
  • parfois un examen du LCS;
  • une approche biologique minimale comprenant : NFS, VS-CRP, glycémie à jeun et 2 heures après la prise de 75 g de glucose per os, ionogramme, bilan hépatique, hémostase, immuno-fixation des immunoglobulines du sérum à la recherche d'une gammapathie monoclonale.

D. Polyneuropathies axonales longueur-dépendantes

Elles résultent d'une atteinte diffuse et symétrique intéressant les extrémités distales des fibres nerveuses.

Une polyneuropathie débute donc aux pieds. Lorsqu'elle atteint les genoux, les manifestations touchent alors les mains. Lorsqu'elle atteint les coudes, les fibres de l'abdomen (plastron) et du scalp (atteinte en calotte) sont touchées à leur tour (figure 7.13).

1. Clinique

a. Troubles sensitifs

Souvent initiaux, les troubles subjectifs (paresthésies permanentes, dysesthésies, brûlures), touchant les extrémités des membres inférieurs sont permanents, diurnes et volontiers nocturnes. L'atteinte des grosses fibres myélinisées se traduit par des troubles de la sensibilité profonde (ataxie).

b. Troubles moteurs

Au début, difficultés à la marche, fatigabilité anormale; puis s'installe un steppage (déficit symétrique des releveurs du pied). Il n'y a pas d'atteinte des muscles respiratoires ni des nerfs crâniens. Il existe parfois des crampes (mollets, plante des pieds).

c. Troubles végétatifs

Ils sont liés à une atteinte des petites fibres amyéliniques : hypotension artérielle orthostatique, troubles vésicosphinctériens, sexuels (impuissance), troubles digestifs (diarrhée, constipation), dépilation et troubles vaso-moteurs distaux. Leur présence évoque certaines causes telles que le diabète et l'amylose.

Fig. 7.13. Topographie des manifestations neurologiques dans les polyneuropathies.
A. Forme initiale de polyneuropathie. Atteinte distale symétrique des fibres les plus longues aux pieds. B. Atteinte longueur dépendante, distale et symétrique. Typiquement, les troubles commencent à atteindre les mains lorsque, aux membres inférieurs, les troubles s'étendent aux genoux. C. Extension de la polyneuropathie, les fibres plus courtes sont atteintes, responsables d'une atteinte en plastron (abdomen et face antérieure du thorax) et en calotte (scalp).
(Source : CEN, 2019.)

d. Examen clinique

Il confirme l'atteinte symétrique, à prédominance distale, des membres inférieurs : abolition des réflexes calcanéens (achilléens), déficit moteur affectant les releveurs du pied, amyotrophie, déficit sensitif qui peut être discret, atteinte végétative (peau et phanères, hypotension).

e. Démarche étiologique

Elle dépend de nombreux facteurs :

  • âge : enfant (rare et héréditaire), adulte (très nombreuses causes) ;
  • origine : amylose familiale (dont le foyer géographique est au Portugal) ;
  • circonstances : maladie générale (diabète, insuffisance rénale), médicaments ;
  • mode d'installation : toujours déterminant (aigu, subaigu, chronique)

2. Causes des polyneuropathies axonales

Il faut rechercher une cause générale susceptible d'altérer la physiologie de l'axone. On retiendra donc essentiellement les causes métaboliques et toxiques (dont les causes médicamenteuses), sans oublier l'amylose.

a. Neuropathie diabétique

Le diabète est une des causes les plus fréquentes de neuropathie périphérique. L'incidence est difficile à estimer, pouvant atteindre 60 %, tenant en grande partie à la difficulté de définir la neuropathie diabétique.
Sa répartition est égale dans les deux sexes.
Plusieurs mécanismes sont en cause : facteurs vasculaires (augmentation de la perméabilité capillaire au niveau du nerf), facteurs métaboliques (accumulation de sorbitol), facteurs inflammatoires (infiltrats de lymphocytes et de macrophages dans les fascicules des fibres amyéliniques).
Il existe très probablement un lien entre l'ancienneté de l'hyperglycémie et les neuropathies, qui apparaissent le plus souvent 5 à 10 ans après le début du diabète. De plus, les traitements qui maintiennent une glycémie relativement normale peuvent stabiliser voire améliorer certaines anomalies neurologiques (dans le diabète de type 1).

Polyneuropathie sensitivo-motrice distale
  • Forme la plus souvent observée des neuropathies diabétiques, associée ou non à une atteinte dysautonomique.
  • Survenant généralement chez des patients dont le diabète évolue depuis plus de 5 ans, le début en est généralement lentement progressif. Rarement un début aigu peut être observé (coma diabétique, stress, infection, chirurgie).
  • Il s'agit au début de paresthésies (engourdissements, picotements et brûlures) des pieds. L'examen révèle une aréflexie calcanéenne et une hypoesthésie affectant la sensibilité thermoalgique «en chaussettes» , plus tardivement la sensibilité vibratoire. Les douleurs sont fréquentes (pieds et jambes), à type de constriction, de broiement avec allodynie au frottement à l'examen clinique.
  • Les manifestations dysautonomiques dans les formes plus évoluées comportent des troubles cardiovasculaires (hypotension orthostatique, cardiopathie autonome diabétique), des troubles de la sphère digestive (constipation, douleurs abdominales, nausées, dysphagie, diarrhée et incontinence fécale), des troubles génito-urinaires (impuissance, atonie vésicale), des troubles de la motilité pupillaire et une anhydrose fréquente.
Autres neuropathies diabétiques

Il ne s'agit plus alors de polyneuropathies.

Neuropathies motrices proximales (ou amyotrophie diabétique)

Elles s'installent de façon subaiguë sur quelques jours à semaines : faiblesse musculaire avec amyotrophie des racines des membres inférieurs asymétrique, qui concerne électivement le psoas, les quadriceps, les adducteurs et les muscles postérieurs de cuisse. Des douleurs importantes sont présentes dans les territoires concernés. Les réflexes tendineux sont diminués ou abolis aux membres inférieurs et il n'existe pas ou peu de signes sensitifs déficitaires.

Neuropathies focales et multifocales

Elles comportent :

  • les atteintes des nerfs crâniens (surtout oculomoteurs, nerf facial) ;
  • les atteintes des membres (tous les troncs nerveux, mais surtout le nerf ulnaire, le nerf médian et le nerf fibulaire commun);
  • l'atteinte du nerf fémoral reste la plus évocatrice : début aigu avec douleurs à type d'écrasement et à recrudescence nocturne, déficit quadricipital amyotrophiant, abolition du réflexe rotulien, déficit sensitif dans le territoire du nerf fémoral (correspondant à une forme d'amyotrophie diabétique tronculaire) (cf. supra).

Neuropathies du tronc

Douleurs de la poitrine et/ou de l'abdomen de topographie tronculaire (nerf intercostal).

Traitement

Il repose sur l'équilibre du diabète, le contrôle de la douleur, le traitement de l'hypotension orthostatique ainsi que le contrôle du syndrome métabolique, souvent associé en cas de diabète de type 2.

b. Causes médicamenteuses et toxiques

  • Les causes médicamenteuses sont les plus fréquentes :
    • il s'agit le plus souvent de polyneuropathies sensitives, parfois douloureuses ;
    • les substances le plus souvent incriminées sont :
      • les cytostatiques (notamment la vincristine et les platines : neuronopathies),
      • la thalidomide (nécessitant une surveillance systématique),
      • l'izoniazide,
      • l'amiodarone,
      • la nitrofurantoïne, les antirétroviraux,
      • le disulfirame, la chloroquine, le métronidazole;
    • l'ENMG peut être utilisé pour dépister les manifestations infracliniques, notamment pour permettre la poursuite de certaines prescriptions (thalidomide).
  • Les causes toxiques sont principalement d'origine industrielle, comme le benzène. Elles sont plus rares et peuvent se révéler de manière aiguë.

c. Polyneuropathie toxique alcoolique

  • Deuxième cause de polyneuropathie dans les pays industrialisés après le diabète, elle affecterait plus de 10 % des alcooliques chroniques. Elle est habituellement secondaire à la toxicité directe de l'alcool. L'association à une carence en thiamine (vitamine B1), avec ou sans carence en folates associée, est possible, responsable d'une expression à prédominance motrice de la neuropathie. Elle touche les fibres motrices, sensitives et végétatives. La symptomatologie sensitive est prédominante.
  • S'installant de façon insidieuse et lentement progressive, la polyneuropathie liée à l'alcoolisme chronique se traduit au début par des paresthésies à type de fourmillements des pieds et « en chaussettes », des crampes nocturnes des mollets, une faiblesse motrice s'exprimant par une fatigabilité anormale à la marche. Après un certain temps d'évolution, le patient se plaint de douleurs en étau et surtout de brûlures avec paroxysmes, voire d'une hyperpathie douloureuse, surtout nocturne.
  • Des troubles cutanés et trophiques (dépilation, anhydrose, ongles cassants) sont fréquemment associés.
  • L'examen clinique met en évidence une hypoesthésie symétrique, «en chaussettes», concernant les différentes sensibilités, moins marquée pour la sensibilité proprioceptive.
  • Il révèle une aréflexie calcanéenne, une amyotrophie et un déficit moteur prédominant sur les muscles de la loge antérolatérale de jambe.
  • ENMG : les anomalies sont très précoces, axonales.
  • L'examen du LCS, habituellement non effectué si le contexte clinique et les données ENMG sont compatibles avec le diagnostic, pourrait montrer une discrète hyperprotéinorachie.
Traitement
  • Il associe l'administration parentérale de vitamines, surtout B1, en cas de carence et de sevrage, et un régime riche en protéines.
  • En cas de douleurs importantes, l'utilisation de tricycliques et/ou d'antiépileptiques.
  • Cette thérapeutique, associée à l'arrêt de l'intoxication, permet une amélioration clinique et électrophysiologique, mais celle-ci peut s'étendre sur plusieurs mois.
Autres formes cliniques
  • Une polyneuropathie aiguë, responsable d'une paraparésie flasque amyotrophiante, de troubles sensitifs intéressant toutes les modalités, et d'une aréflexie rapidement ascendante en 24 heures peut survenir chez l'alcoolique dénutri, volontiers à la suite d'un état infectieux en raison d'une carence associée en vitamine B1.
  • Une forme ulcéromutilante comportant un déficit thermoalgique sévère, des maux perforants plantaires avec ostéolyse, arthropathies, a été individualisée.
  • Des formes végétatives, le plus souvent associées à la polyneuropathie axonale, comportant des troubles de sudation, une hypotension orthostatique, une impuissance, des troubles trophiques et digestifs est de pronostic plus réservé, notamment lorsque sont associés des troubles du rythme cardiaque.

d. Amylose héréditaire et primitive (gammapathie)

La polyneuropathie amyloïde est secondaire aux dépôts de substance amyloïde (préalbumine mutée au cours des amyloses héréditaires ou gammapathie monoclonale au cours des amyloses primitives) dans le nerf.

Initialement marquées par un déficit de la sensibilité thermoalgique pouvant s'associer à des douleurs, les manifestations s'étendent ensuite aux membres supérieurs, au tronc avec des manifestations dysautonomiques.
Diagnostic :

  • il est suggéré par le contexte familial (pas toujours présent) ;
  • il est réalisé par la mise en évidence de la substance amyloïde et par le test génétique à la recherche d'une mutation sur le gène de la transthyrétine (préalbumine) ; la plus fréquente est la mutation VAL/MET30 :
    • dans la biopsie des glandes salivaires accessoires, la graisse abdominale ou la biopsie anale,
    • dans la biopsie du nerf sensitif.

e. Vascularite

Vingt à 30 % des vascularites prennent la forme clinique d'une polyneuropathie, même si le mécanisme est vasculaire. Une mononeuropathie multiple est plus évocatrice. Lorsque la neuropathie est évoluée, l'asymétrie disparaît. Il importe de rechercher dans l'histoire clinique un début asymétrique aux membres inférieurs, avec atteinte du nerf fibulaire le plus souvent. Il s'agit d'une polyneuropathie plutôt subaiguë avec composante motrice et douloureuse.

f. Causes infectieuses

Le sida peut entraîner une polyneuropathie sensitive à la phase tardive de l'affection.

g. Autres causes

D'autres causes plus rares de polyneuropathies axonales sont possibles, telles que les dysthyroïdies.

E. Principales polyneuropathies démyélinisantes

1. Neuropathie à IgM monoclonale à activité anti-MAG

  • Neuropathie de la personne de plus de 50 ans.
  • Ataxiante, associée à un tremblement des mains.
  • Peu de déficit moteur au début.
  • Lentement progressive.
  • L'ENMG montre une polyneuropathie démyélinisante à prédominance distale.
  • Biologie : pic d'IgM monoclonale dont le taux est faible, inférieur à 10 g/l (plus rarement supérieur à 10 g/l dans le cadre d'une maladie de Waldenström).
  • Présence d'anticorps anti-MAG (Myelin-Associated Glycoprotein, constituant de la myéline intervenant dans la compaction de cette dernière).

À part, le syndrome POEMS, acronyme en référence aux signes cliniques et biologiques cardinaux de cette affection (Polyneuropathy, Organomegaly, Endocrinopathy, Monoclonal plasma cell disorder, Skin Changes) : la neuropathie prend généralement la forme clinique d'une poly- radiculonévrite chronique. La cause en est un myélome ostéosclérosant ou mixte recherché sur le rachis ou les diaphyses des os longs.

2. Neuropathies héréditaires

Les neuropathies héréditaires sont dominées par les polyneuropathies sensitivo-motrices de Charcot-Marie-Tooth : atrophie des mollets, pieds creux (figure 7.14), atteinte sensitivo-motrice à prédominance motrice. Peu ou pas de symptomatologie sensitive (paresthésies).
Les formes démyélinisantes autosomiques dominantes sont les mieux caractérisées. Le diagnostic est porté par le test génétique : duplication du gène PMP22 sur le chromosome 17 dans les formes dominantes, anomalie du gène de la connexine 32 dans les formes liées à l'X.

 

Fig. 7.14. Pied creux (neuropathie de Charcot-Marie-Tooth).
(Source : CEN, 2019.)

F. Neuronopathies sensitives

1. Présentations cliniques des neuronopathies sensitives

(Vidéo 7.3)

  • Les neuronopathies sensitives correspondent à la dégénérescence du corps cellulaire des neurones sensitifs dans la racine postérieure des nerfs spinaux (figure 7.15).
  • Elles sont caractérisées par des manifestations exclusivement sensitives.
  • L'atteinte est typiquement asymétrique et non systématisée en termes de tronc ou de racines, et concerne les quatre membres voire la face (25 % des cas) de manière synchrone ou asynchrone (figure 7.16).
  • L'ataxie est fréquente.
  • L'aréflexie est diffuse et quasi constante.
  • Les neuronopathies sensitives prédominent, soit sur les grosses fibres (ataxie), soit sur les petites fibres (troubles de la sensibilité thermoalgique).)
  • Suivant les causes, leur évolution est chronique ou subaiguë.
  • Elles ont le plus souvent un mécanisme dysimmunitaire.

2. Diagnostic

  • Il est porté sur l'association d'une atteinte sensitive pure clinique confirmée par une atteinte sensitive pure à l'ENMG : abolition diffuse des potentiels sensitifs sans anomalie des potentiels moteurs.
  • L'analyse du LCS montre :
    • une augmentation de la protéinorachie : < 1 g/l ;
    • une augmentation du nombre de cellules, qui évoque une origine paranéoplasique.
  • Immunologie : la présence d'anticorps anti-Hu est caractéristique d'un syndrome paranéoplasique.

3. Causes

Les neuronopathies ont pour causes principales :

  • le cancer du poumon à petites cellules dans le cadre d'un syndrome paranéoplasique (syndrome anti-Hu) : il convient de rechercher le cancer par les moyens les plus exhaustifs (scanner thoracique, biopsie, TEP-TDM) ; la recherche d'anticorps antineuronaux (dont ceux de type Hu) est systématique au cours de toutes les neuronopathies sensitives ;
  • le syndrome de Gougerot-Sjögren : recherche de syndrome sec oculaire et buccal, biopsie des glandes salivaires accessoires, biologie;
  • une origine dysimmunitaire sans cause;
  • une origine toxique : sels de platine des chimiothérapies.

Fig. 7.15. La lésion au cours des neuronopathies sensitives est située dans le ganglion spinal, correspondant à la localisation des corps cellulaires des neurones sensitifs périphériques.
(Source : CEN, 2019, illustration de Carole Fumat.)

Fig. 7.16. La présentation clinique des neuronopathies sensitives est celle de troubles sensitifs aux quatre membres accompagnés d'ataxie ou de manifestations sensitives multifocales non systématisées en termes de tronc ou de racines.
En rouge : troubles sensitifs ; en noir : traits schématisant l'ataxie.
(Source : CEN, 2019, illustration de Carole Fumat.)

G. Mononeuropathies multiples

Elles correspondent à l'atteinte de plusieurs troncs nerveux. Elles sont liées :

  • aux maladies de système : périartérite noueuse (vascularite de type PAN), sarcoïdose, cryoglobulinémie (devant faire rechercher une infection par le virus de l'hépatite C) ;
  • au diabète (le plus souvent aux zones de compression des nerfs) ; à la lèpre (neuropathie la plus fréquente dans le monde).

1. Clinique

  • Dans un ou plusieurs territoires de troncs nerveux (fibulaire, médian, ulnaire,) touchés par le processus ischémique.
  • Installation aiguë ou subaiguë.
  • Douleurs, paresthésies pénibles, brûlures.
  • Déficit sensitif puis moteur, évoluant vers l'amyotrophie.
  • Évolution extensive, confluente, prenant alors le masque d'une polyneuropathie car devenue symétrique.
  • L'atteinte des nerfs des membres est prédominante. L'atteinte des nerfs crâniens est possible (nerfs trijumeaux, nerfs oculomoteurs), en particulier au cours du diabète.
  • Le nerf le plus fréquemment atteint est le nerf fibulaire commun.
  • Le contexte général oriente vers une maladie de système : fièvre, amaigrissement, arthralgies, myalgies et signes cutanés (livedo, purpura).

2. Examen neurophysiologique

L'examen neurophysiologique :

  • montre l'atteinte pluritronculaire axonale, asymétrique le plus souvent ;
  • dépiste des anomalies infracliniques;
  • guide la biopsie sur le nerf sensitif le plus atteint pour la recherche d'une vascularite.

3. Biologie

À la recherche d'une cause :

  • NFS, VS, CRP, protéinurie des 24 heures ;
  • sérologies : hépatites B et C, VIH ;
  • facteur rhumatoïde, C3, C4, CH50, cryoglobulinémie;
  • autoanticorps anti-noyaux, anticorps anti-ADN, anticorps anti-antigènes solubles (SSA, SSB, SM, centromères...), pANCA et cANCA.

4. Biopsie neuromusculaire

Elle peut montrer une vascularite nécrosante, avec nécrose fibrinoïde, un infiltrat inflammatoire de la paroi des artères de moyen calibre (figure 7.17).

5. Causes

  • Vascularites des vaisseaux moyens : périartérite noueuse.
  • Vascularites des petits vaisseaux :
    • vascularites à ANCA;
    • cryoglobulinémie essentielle.
  • Vascularites associées à une maladie de système :
    • cryoglobulinémie en rapport avec une infection par le virus de l'hépatite C ;
    • lupus systémique ;
    • nfection par le VIH;
    • polyarthrite rhumatoïde (en régression).
  • Vascularites associées à une probable étiologie : vascularite satellite de cancer.
  • La périartérite noueuse peut se manifester par une atteinte isolée des nerfs périphériques.
  • Le diabète ne nécessite pas de biopsie neuromusculaire.
  • La lèpre, responsable de mononeuropathies multiples à grande prédominance sensitive, est une grande cause de neuropathie dans le monde, mais rare en France.

Fig. 7.17. Coupe transversale de biopsie nerveuse : infiltrat inflammatoire de la paroi artérielle avec nécrose fibrinoïde.(Coloration hématoxyline-éosine.)
(Source : CEN, 2019.)

6. Traitement

Le diagnostic et donc le traitement des mononeuropathies multiples est urgent, afin de limiter la perte en fibres nerveuses du nerf atteint par l'ischémie.
Le traitement repose sur les corticoïdes et/ou les immunosuppresseurs.

7. Neuropathies motrices à blocs de conduction persistants

La neuropathie motrice à blocs de conduction persistants est une mononeuropathie multiple motrice pure, dysimmunitaire.

a. Clinique
  • Elle touche habituellement l'homme adulte de moins de 50 ans.
  • Début asymétrique, prédominant aux membres supérieurs, touchant un ou plusieurs troncs nerveux, en particulier le nerf radial.
  • Déficit moteur, fasciculations, amyotrophie dans les territoires atteints (signes d'atteinte du neurone moteur périphérique).
b. Diagnostic

L'ENMG montre des blocs de conduction, en dehors des zones de rétrécissement anatomique, persistants à 3 mois d'intervalle, sur les troncs nerveux touchés. Le degré de perte axonale témoigne de l'évolutivité de l'atteinte.

c. Biologie

Présence d'anticorps anti-GM1 de type IgM.

d. Traitement

Il repose sur les immunoglobulines polyvalentes intraveineuses. Les corticoïdes peuvent aggraver les signes.

e. Diagnostic différentiel

Essentiellement la sclérose latérale amyotrophique (cf. infra).

II. Distinguer cliniquement une neuropathie périphérique et une sclérose latérale amyotrophique

A. Pour comprendre la SLA

La sclérose latérale amyotrophique (SLA), ou maladie de Charcot, ou maladie de Lou Gehrig aux États-Unis, est une affection motrice pure, liée à un processus dégénératif lésant le neurone moteur central (NMc) et le neurone moteur périphérique (NMp) dans le territoire bulbaire et spinal.

Le pronostic est caractérisé par une évolution constamment fatale : la médiane de survie est de 36 mois en l'absence de traitement.
Cette affection se traduit par une paralysie des muscles striés (motricité volontaire) et respecte la sensibilité et la musculature lisse innervée par le système sympathique et parasympathique.

B. Diagnostic

1. Diagnostic clinique de la SLA

a. Principe du diagnostic

La SLA se caractérise cliniquement par un déficit moteur pur, progressif, combinant un syndrome du motoneurone périphérique (MNp) avec un syndrome du motoneurone central (MNc) dans le territoire bulbaire, cervical et lombosacré.
L'âge moyen du début de la maladie est de 63 ans.

b. Éléments clés du diagnostic
  • Le diagnostic de SLA repose essentiellement sur les données cliniques et l'examen neuro-physiologique. Les explorations complémentaires ont plus pour finalité d'exclure les pathologies qui peuvent mimer une SLA.

Il faut, pour le diagnostic d'une SLA, l'association :

  • d'une atteinte du neurone moteur périphérique associant :
    • déficit moteur,
    • amyotrophie,
    • crampes,
    • fasciculations,
    • et une diminution voire une abolition des réflexes tendineux ;
  • d'une atteinte du neurone moteur central associant : réflexes tendineux vifs, diffusés, poly- cinétiques, signe de Babinski et/ou de Hoffmann et/ou d'un réflexe massétérin exagéré, augmentation du tonus de type spastique, élastique. Cette hypertonie est responsable de l'attitude spontanée en flexion-pronation des membres supérieurs et de la marche en fauchant; d'évolution progressive;
  • et l'absence de troubles sensitifs, sphinctériens, cérébelleux, oculomoteurs.

La présence de troubles cognitifs n'exclut pas le diagnostic : en effet, près de 20 % des patients atteints de SLA développent des troubles cognitifs de types fronto-temporaux. Cela se traduit par des troubles du comportement et du langage, des changements dans la personnalité des patients. Il n'y a pas de troubles mnésiques, à la différence de ce qui est constaté dans la maladie d'Alzheimer.

2. Diagnostic positif

Diagnostic de la SLA à l'électroneuromyogramme
L'examen complémentaire clé est l'électroneuromyogramme : il permet de confirmer l'atteinte de la corne antérieure, de préciser l'étendue des lésions et d'exclure une atteinte des troncs nerveux, en particulier une neuropathie motrice multifocale avec blocs de conduction (NMMBC), qui est le diagnostic différentiel principal.
Le diagnostic de SLA sera renforcé par la constatation :

  • d'une diminution des amplitudes des potentiels d'action moteurs et des vitesses de conduction normales ou peu ralenties;
  • de l'absence de blocs de conduction évocateurs d'une NMMBC lors de la stimulation des troncs moteurs;
  • de la normalité de l'exploration neurographique sensitive ;
  • de l'enregistrement de tracés de détection combinant un tracé de dénervation active au repos (potentiels de fibrillations, potentiels lents de dénervation et potentiels de fasciculations) et des tracés neurogènes faits de PUM polyphasiques de grande amplitude, dont la fréquence s'élève avec l'effort;
  • de l'impossibilité de la systématisation de ces anomalies qui ne respectent aucun territoire radiculaire, tronculaire et plexique et qui dépassent un territoire radiculaire, tronculaire et plexique.
    Tout comme l'examen clinique, la normalité de l'exploration sensitive neurographique est un élément clé du diagnostic.

C. Diagnostics différentiels d'une SLA

1. Distinguer une SLA d'une neuropathie

À un stade précoce, l'atteinte motrice peut prédominer sur le NMc ou de façon plus déroutante sur le NMp, conduisant alors à une confusion possible avec une neuropathie périphérique.

  • Le diagnostic différentiel le plus complexe et le plus important est celui d'une neuropathie motrice à blocs de conduction (NMMBC) dont la présentation clinique mime en tous points celle d'une SLA. À la différence de la SLA, l'âge de début est habituellement plus précoce avec une prédominance masculine et une propension à une atteinte initiale asymétrique des membres supérieurs. À la différence de la SLA, le territoire moteur déficitaire est tronculaire (un nerf médian et un nerf radial, par exemple) et non métamérique, le territoire bulbaire est épargné, l'évolution plus lente et il n'y a aucune signe d'atteinte du neurone moteur central. Comme dans la SLA, l'atteinte sensitive est absente. L'élément le plus discriminant est l'ENMG qui objective des blocs de conduction sur les troncs moteurs et une distribution tronculaire de l'atteinte. La présence d'anticorps anti-GM1 de type IgM renforcera le diagnostic. La prescription régulière de cures d'immunoglobulines intraveineuses permet une récupération motrice objective.
  • Les syndromes tronculaires étagés (syndrome du canal carpien et/ou du tunnel ulnaire) seront reconnus sur l'existence de troubles sensitifs, le caractère systématisé du déficit neurologique et les données ENMG.
  • Les neuropathies motrices post-radiques sont le plus souvent constatées aux membres inférieurs. Elles surviennent dans un délai pouvant varier de 3 mois à 20 ans suivant l'irradiation. L'installation du déficit dans un territoire irradié et la présence de myokimies lors de l'examen ENMG confortent le diagnostic.
  • Les neuropathies secondaires à une intoxication au plomb doivent également être évoquées devant un déficit «pseudo-radial» des mains qui «font les cornes» (lors de l'extension des doigts, seuls l'index et l'auriculaire s'étendent à la différence de l'annulaire et du majeur qui restent fléchis). L'existence de douleurs abdominales et d'une anémie renforce cette hypothèse.

2. Pathologies musculaires et de la jonction neuromusculaire

  • Les formes bulbaires de SLA et, de façon plus rare, les formes débutant par un déficit des extenseurs du rachis cervical peuvent conduire à suspecter une myasthénie. L'atteinte oculomotrice caractéristique fait défaut dans cette situation. La confirmation sera apportée par l'examen ENMG, objectivant une atteinte jonctionnelle neuromusculaire et la positivité du titre anticorps anti-récepteurs de l'acétylcholine (++).
  • La myosite à inclusions est l'une des myopathies acquises de l'adulte les plus fréquentes. Il faut évoquer ce diagnostic devant tout tableau de SLA dont l'évolution est très lente ou nulle et réaliser alors une biopsie musculaire. Classiquement, le déficit moteur prédomine sur les quadriceps et les fléchisseurs du carpe.
  • Les myopathies font partie des diagnostic différentiels, parmi lesquels prédominent les dystrophies des ceintures et les dystrophies myotoniques de type II, les maladies métaboliques comme la maladie de Pompe, le déficit en carnitine et les myopathies inflammatoires comme la polymyosite et les maladies mitochondriales.


 

Item 97 – Polyradiculonévrite aiguë inflammatoire (syndrome de Guillain-Barré)

I. Définition
II. Épidémiologie et physiopathologie
III. Aspects cliniques
IV. Examens complémentaires
V. Traitement
VI. Surveillance et pronostic

Synonymes : syndrome de Guillain-Barré (SGB), polyradiculonévrite inflammatoire aiguë.

I. Définition

  • On désigne sous le terme de polyradiculonévrite aiguë une neuropathie périphérique inflammatoire, démyélinisante, multifocale, sensitivo-motrice touchant les racines nerveuses et les nerfs les prolongeant.
  • On désigne sous le terme de neuropathie motrice axonale aiguë une neuropathie périphérique inflammatoire aiguë, médiée par des anticorps au nœud de Ranvier des nerfs myélinisés, responsable d'une atteinte motrice pure aiguë.
  • Dans plus de 50 % des cas, le SGB est précédé d'un épisode infectieux respiratoire ou digestif : cytomégalovirus, virus.

II. Épidémiologie et physiopathologie

  • On estime l'incidence à 1 pour 100 000.
  • Dans plus de 50 % des cas, le SGB est précédé d'un épisode infectieux respiratoire ou digestif : cytomégalovirus, virus d'Epstein-Barr (formes démyélinisantes) et diarrhées à Campylobacter jejuni (formes axonales de type AMAN).
  • Les lésions touchent les racines des nerfs et les troncs nerveux en aval (figure 7.18).

III. Aspects cliniques

(vidéo 7.4)

  •  On différencie deux types de syndrome de Guillain-Barré :
    • le syndrome de Guillain-Barré démyélinisant sensitivo-moteur avec risque d'intubation ;
    • les neuropathies motrices axonales aiguës (AMAN) , motrices pures, secondaires aux diarrhées à Campylobacter jejuni, à nette prédominance motrice, habituellement sans risque d'intubation.
  •  Les deux types évoluent en trois phases : extension, plateau, récupération.
  • Le diagnostic est porté sur la clinique et l'ENMG.
  • L'examen du LCS et l'immunologie sont d'un appoint non indispensable au diagnostic.

Fig 7.15

Fig. 7.18. Polyradiculonévrites aiguës sensitivo-motrices : localisation des lésions.
(Source : CEN, 2019, illustration de Carole Fumat.)

A. Phase d’extension des paralysies

  • La phase d'extension dure par définition moins de 4 semaines, mais elle est souvent de quelques jours (et peut être inférieure à un jour).
  • Les manifestations sont variées (figure 7.19) :
    • sensitives fréquentes et plutôt subjectives (paresthésies, picotements distaux des quatre membres), à évolution ascendante;
    • parésie débutant aux membres inférieurs, touchant rarement les nerfs crâniens (facial, oculomoteur, dysphagie) à la phase initiale ; l'atteinte du cou et du tronc est plus tardive ;
    • douleurs (myalgies, radiculalgies des membres inférieurs évocatrices).
  • L'atteinte motrice est une parésie relativement symétrique, étendue et sévère, qui prédomine en proximal puis touche les extrémités.
  • La gravité de l'atteinte respiratoire (15 à 30 % des patients seront sous ventilation assistée) impose une surveillance attentive en réanimation dès aggravation ou atteinte de la musculature bulbaire (troubles de déglutition ou de phonation).
  • Une atteinte faciale bilatérale et une aggravation rapide sont associées à un risque plus élevé de détresse respiratoire.
  • Une durée courte de la phase d'aggravation dans les formes démyélinisantes est de mauvais pronostic.
  • La phase d'extension est plus rapide au cours de l'AMAN qu'au cours du syndrome de Guillain-Barré démyélinisant.

Fig 7.16

Fig. 7.19. Présentation clinique des polyradiculonévrites aiguës sensitivo-motrices (syndrome de Guillain-Barré).
En jaune : déficit moteur ; en rouge : déficit sensitif ; traits noirs : ataxie.
(Source : CEN, 2019, illustration de Carole Fumat.)

B. Phase de plateau

  • Grossièrement :
    • un tiers des patients garde une capacité à marcher ;
    • un tiers est confiné au lit;
    • un tiers nécessite une assistance respiratoire.
  • Le déficit moteur est d'intensité variable. L'atteinte des nerfs crâniens est fréquente : nerf facial (souvent diplégie) et troubles de déglutition (derniers nerfs crâniens), alors que l'atteinte des nerfs oculomoteurs est plus rare.
  • L'aréflexie tendineuse dans les territoires déficitaires est la règle.
  • Le déficit sensitif prédomine sur la proprioception et est responsable d'ataxie.
  • L'atteinte du système nerveux végétatif est fréquente (tachycardie, hypotension orthostatique, anomalie de la sudation, constipation) dans les formes sévères.
  • La durée du plateau est variable, plus longue dans les formes sévères (jusqu'à plusieurs mois) et dans certaines AMAN.

C. Phase de récupération

  • La récupération se fait dans l'ordre inverse de l'apparition des déficits.
  • Au cours du syndrome de Guillain-Barré démyélinisant, elle peut durer plusieurs mois.
  • Au cours de l'AMAN, la récupération est soit rapide par levée des blocs de conduction sous traitement par immunoglobulines IV, soit très lente sur plusieurs mois en cas de persistance des blocs de conduction distaux et de dégénérescence axonale.
  • L'absence de récupération après 12 à 18 mois peut être considérée comme définitive.
  • Dans les meilleures séries, il existe 5 % de décès ; 15 % des patients gardent des séquelles définitives : déficit moteur, ataxie.

IV. Examens complémentaires

A. Aspects électrophysiologiques

1. Au cours du syndrome de Guillain-Barré démyélinisant

  • Les anomalies sont habituellement retardées par rapport à la clinique.
  • Initialement, allongement de la latence des ondes F et des latences distales en rapport avec l'atteinte radiculaire et distale.
  • À la phase d'état, anomalies démyélinisantes (évaluées sur les nerfs moteurs) caractérisées par une augmentation de la latence distale motrice (atteinte des fibres les plus rapides), ralentissement des vitesses de conduction, blocs de conduction, dispersion des potentiels.
  • Il n'y a pas de parallélisme entre le degré de la paralysie et les anomalies constatées en début d'évolution.
  • L'examen de détection met en évidence des anomalies neurogènes.
  • Seule l'inexcitabilité des nerfs est de mauvais pronostic.

2. Au cours de l’AMAN

  • Il n'existe pas d'anomalies sensitives.
  • Les amplitudes des potentiels moteurs sont diminuées aux quatre membres.
  • La détection montre des tracés neurogènes.
  • Il n'y a pas d'anomalies démyélinisantes.

B. Liquide cérébrospinal

  • Son étude permet de mettre en évidence :
    • une hyperprotéinorachie, pouvant être supérieure à 1 g/l, retardée de 3 à 10 jours par rapport au début de la clinique ; elle peut atteindre plusieurs grammes par litre. Il n'y a pas de parallèle entre l'évolution clinique et l'importance de l'hyperprotéinorachie ;
    • une absence de réaction cellulaire (< 10 mm3).
  • Une pléiocytose supérieure à 50 mm3 doit faire évoquer un autre diagnostic, telle qu'une méningoradiculite infectieuse.

C. Autres examens biologiques

  •  La biologie standard peut mettre en évidence :
    • une lymphopénie ;
    • des anomalies du bilan hépatique (augmentation des transaminases).
  • La pratique des sérologies n’a qu’un objectif épidémiologique : CMV, EBV ; il faut penser à la séroconversion VIH (cependant rare).
  • En cas de diarrhée : sérologie Campylobacter jejuni.
  • Immunologie : les anticorps anti-gangliosides anti-GM1 et/ou anti-GD1a de type IgG sont associés aux AMAN.

V. Traitement

A. Traitements spécifiques

  • Le traitement doit être précoce, au mieux dans les deux premières semaines.
  • Deux modalités sont possibles :
    • les immunoglobulines polyvalentes : à la dose de 0,4 g/kg par jour pendant 5 jours consécutifs en IV sur plusieurs heures;
    • les échanges plasmatiques : quatre échanges réalisés un jour sur deux.
  • Ces deux options thérapeutiques sont d'efficacité équivalente. Les immunoglobulines sont plus utilisées car de réalisation plus simple.
  • L'efficacité de ces traitements est prouvée sur la réduction de la durée de ventilation assistée, la rapidité de reprise de la marche et la durée d'hospitalisation.
  • Ces traitements n'ont pas modifié le pourcentage de patients avec séquelles.
  • L'association échanges plasmatiques et immunoglobulines polyvalentes est inutile.
  • Les corticoïdes sont inutiles.

B. Traitement symptomatiques

  • Prévention indispensable des complications de décubitus : héparinothérapie par héparine de bas poids moléculaire, prévention des positions vicieuses favorisées par les déficits.
  • Ventilation mécanique si nécessaire.
  • Contrôle de la dysautonomie.
  • Rééducation précoce et poursuivie pour lutter contre la désadaptation à l'effort.
  • Mesures sociales pour l'aide à la reprise du travail.

VI. Surveillance et pronostic

A. Surveillance

1. Lors de la phase d’aggravation

  • Dépistage des troubles de déglutition.
  • Dépistage de difficultés respiratoires : efficacité de la toux, rythme respiratoire, capacité vitale par spiromètre portable afin d'évaluer la capacité vitale.

2. Lors de la phase d’état

  • Troubles végétatifs : modifications du rythme cardiaque, variation tensionnelle.
  • Complication de décubitus : thrombose veineuse, positions vicieuses.

B. Pronostic

  • Sont de mauvais pronostic :
    • une phase d'aggravation très rapide;
    • une atteinte faciale bilatérale initiale;
    • un âge supérieur à 60 ans;
    • une inexcitabilité des nerfs à l'ENMG;
    • une ventilation prolongée.
  • Les récidives du syndrome de Guillain-Barré sont très rares.

 


Compléments en ligne

Des compléments numériques sont associés à cet ouvrage. Ils sont indiqués dans la marge par un pictogramme qui renvoient vers les vidéos ou enregistrements sonores.
Pour accéder à ces compléments, connectez-vous sur www.em-consulte.com/complement/477437 et suivez les instructions pour activer votre accès.


Vidéo 7.1. Exemple d'exploration neurophysiologique : examen du nerf médian en électroneuromyographie.


Vidéo 7.2. Syndrome du canal carpien.
À l'interrogatoire, on retient la survenue au cours de la grossesse, l'atteinte bilatérale, le caractère douloureux et nocturne, la nécessité de bouger les doigts pour faire diminuer la douleur. On note également le caractère permanent des dysesthésies et l'atteinte du 4e doigt. L'examen clinique confirme l'hypoesthésie et les dysesthésies dans les territoires symptomatiques. Les signes de Tinel et Phalen sont négatifs ou peu positifs. L'examen moteur n'est pas montré dans la vidéo. 


Vidéo 7.3. Neuronopathie sensitive.
On retient la symptomatologie initiale à type d'étau dans les membres inférieurs qui évoque une atteinte proprioceptive. L'extension des troubles aux membres supérieurs, également de type atteinte de la sensibilité profonde, est asymétrique, touchant d'abord la main droite avant la main gauche. Les troubles sont responsables d'une maladresse gênant l'écriture ou la manipulation des petits objets. Aux membres inférieurs, l'ataxie empêche de fermer les yeux sous la douche, de monter des escaliers ou de descendre une pente sans aide. La patiente précise bien qu'il ne s'agit pas d'un manque de force. Si la diffusion des membres inférieurs aux membres supérieurs dans un deuxième temps peut évoquer une polyneuropathie, l'atteinte ultérieure asymétrique et le caractère sensitif pur sont en faveur d'une neuronopathie sensitive. Enfin, à l'examen clinique, le signe de Romberg est positif, les réflexes tendineux sont tous abolis. Même si la pallesthésie n'est abolie qu'aux membres inférieurs, le diagnostic (confirmé par l'électroneuromyogramme) est celui de neuronopathie sensitive.


Vidéo 7.4. Polyradiculonévrite aigüe.
On retient chez cette patiente la survenue à la suite d'une infection respiratoire, de douleurs radiculaires très sévères, continues, touchant d'abord les membres inférieurs puis les membres supérieurs. Elles sont caractéristiques du syndrome de Guillain-Barré et sont prises dans l'exemple pour des douleurs d'origine mécanique. On note également leur apparition aux membres supérieurs. Par la suite surviennent des troubles sensitifs des pieds et des jambes ainsi que des mains. La patiente se plaint aussi de lourdeur des membres inférieurs qui correspondent vraisemblablement à un déficit moteur. Enfin, la paralysie faciale reflète le caractère diffus de l'atteinte neurologique. La patiente montre la déviation de la bouche vers la droite en raison de la paralysie faciale gauche. À noter que la patiente signale que son œil gauche avait tendance à se fermer. Il s'agit vraisemblablement d'une atteinte du muscle frontal responsable de la chute de la queue du sourcil, à ne pas confondre avec l'orbiculaire de l'œil dont le déficit est responsable de la mauvaise occlusion de l'œil dans la paralysie faciale. Il faut également entendre le caractère orienté de l'interrogatoire qui permet de reconstituer les différentes étapes d'une polyradiculonévrite : événement déclenchant, déficit sensitif des quatre membres puis déficit moteur avec paralysie faciale.