Les céphalées, ou douleurs crâniennes, représentent l'un des symptômes les plus fréquents en médecine. Ne seront envisagées ici que les plus fréquentes ou les plus graves :

  • les céphalées chroniques (présentes pendant plusieurs années ou mois) :
    • migraine
    • céphalée de tension
  • des céphalées aigues ou subaiguës (installées en quelques heures ou jours) :
    • syndrome méningé
    • hypertension intracrânienne (HIC)

I - Céphalée migraineuse

La migraine est la cause la plus fréquente de céphalées (on estime que 12% de la population en souffre). Son étiologie est multifactorielle et encore mal connue (composantes génétique, hormonale, alimentaire, psychique) et sa physiopathologie est complexe (la douleur est liée à une vasodilatation du territoire de l'artère carotide externe)

Les céphalées évoluent par crises, entre lesquelles le malade ne souffre pas.
On distingue la migraine sans aura et la migraine avec aura.

1. La migraine sans aura

C'est un diagnostic d'interrogatoire, visant à recueillir les critères diagnostiques internationaux, qui exigent :

  • Au moins 5 crises céphalalgiques durant chacune de 4 à 72 heures avec au moins 2 des 4 caractéristiques suivantes :
    • Topographie unilatérale (le mot « migraine » vient de « hémicrânie »)
    • Pulsatilité (la douleur est battante comme le pouls)
    • Intensité modérée à sévère, gênant ou empêchant les activités quotidiennes
    • Aggravation par la marche ou toute autre activité physique habituelle
  • Durant la céphalée, au moins un des deux symptômes suivants survient :
    • Photophobie et phonophobie
    • Nausées et/ou vomissements

De sorte que le malade, dans les cas typiques, raconte qu 'il doit interrompre ses activités et s'allonger dans l'obscurité, à l'abri du bruit.

2. La migraine avec aura (moins fréquente que la précédente)

  • L'aura migraineuse est définie par un déficit neurologique focal traduisant une « dépression neuronale corticale » de physiopathologie mal connue.
  • Cette symptomatologie s'installe de façon progressive, en quelques minutes, et dure moins de 60 minutes. Plusieurs déficits peuvent se succéder.
  • L'aura la plus fréquente est ophtalmique, réalisant un scotome (amputation du champ visuel) hémianopsique latéral homonyme (ou quadranopsique), avec parfois des scintilements ou des flashs lumineux. C'est la migraine ophtalmique (où les troubles peuvent être monoculaires).
    Atteinte du nerf optique
  • D'autres déficits peuvent s'observer (ou succéder au trouble visuel) : paresthésies, aphasie
  • Les céphalées secondaires à l'aura (ou, plus rarement, synchrones) ont les caractéristiques d'une céphalée migraineuse (cf supra).

II - Céphalée de tension

Leur étiopathogénie est mal connue. Une composante psychologique est très souvent identifiable

  • Les critères diagnostiques internationaux les opposent point par point aux migraines :
    • Au moins 2 critères parmi les 4 suivants :
      • Douleur à type de pression pesanteur (non pulsatile),
      • Intensité légère à modérée, gênant mais n'empêchant pas les activités
      • Topographie bilatérale, souvent postérieure (nuque, occiput)
      • Pas d'aggravation par la marche
    • Absence de :
      • Nausées ou vomissements
      • Photo phonophobi
  • Elles peuvent être permanentes, quotidiennes (« céphalées chroniques quotidiennes »)
    ou épisodiques, durant de 30 minutes à 7 jours.

III - Céphalée du syndrome meningé

Syndrome méningé

Le syndrome méningé est fait de l'ensemble des symptômes et signes cliniques traduisant une souffrance des espaces méningés.
Les récepteurs à la douleur situés dans les méninges réagissent à la présence de sang (hémorragie méningée) ou d'un processus inflammatoire (méningite).

1. Symptômes

  • La céphalée est :
    • intense
    • diffuse, « en casque »
    • parfois associée à des rachialgies et une hyperesthésie diffuse (qui rend le malade hostile à l'examen)
  • Vomissements
  • Photophobie (le malade ne supporte pas la lumière)

2. Signes cliniques : la raideur méningée comporte

  • Une attitude «en chien de fusil » du malade
  • une raideur de la nuque, mise en évidence par la résistance à la flexion passive de la nuque
    • le signe de Kernig : résistance douloureuse lors de l'extension passive du membre inférieur (FILM)
      Signe de Kernig
  • le signe de Brudzinski : flexion involontaire des membres inférieurs lorsqu'on tente de fléchir la nuque.
  • Des signes de gravité peuvent exister, qui doivent être recherchés :
    • trouble de la vigilance (de la somnolence au coma)
    • signe(s) de localisation (déficit moteur, aphasie)
    • crise d'épilepsie focale ou généralisé

3. Examens complémentaires

A. La ponction lombaire

  • souvent réalisée après un scanner cérébral
  • dans des conditions d'asepsie (peau bien nettoyée, gants, masque) et d'analgésie (pommade anesthésiante – Emla® par exemple)
  • demander au malade de s'enrouler en avant autour d'un oreiller
  • repérer une ligne horizontale reliant chaque épine iliaque postéro supérieure
  • sur cette ligne, repérer les apohyses épineuses des vertèbres lombaires
  • enfoncer une aiguille à mandrin fine entre deux épineuses, de façon très sagittale et légèrement ascendante
  • dès que l'on sent que le ligament est franchi, s'arrêter, retire le mandrin et laisser s'écouler le liquide dans le premier des trois tubes stériles préalablement préparés (un pour la biochimie et la cytologie, un autre pour l'immunofixation, un troisième pour la bactériologie).
  • Le malade est ensuite allongé, ne doit pas se lever pendant 12 heures, et boire abondamment.
  • Dans certains cas survient un « syndrome post-PL » comportant des céphalées diffuses lors du passage à la position debout. Il est du à l'hyoptension intra crânienne résultant de la poursuite de l'écoulement du LCR à travers la brèche. Le traitement de choix est le « blood-patch », qui consiste en l'injection profonde, à l'endroit où a été faite la PL, d'une petite quantité de sang autologue (préalablement prélevé chez le malade).

B. Le liquide céphalo rachidien normal comporte :

  • protéinorrachie : pas plus de 0,45 g/l ; glycorrachie égale à la moitié de la glycémie.
  • cellularité : pas plus de 5 cellules mononucléées /mm3
  • pas de germes au direct

Selon les cas, d'autres examens biologiques peuvent être réalisés :

  • immunofixation des immunoglobulines
  • recherche d'antigènes microbiens (viraux ou autres), mise en culture.
  • recherche de pigments sanguins.

IV - Céphalée du syndrome d'hypertension intra crânienne (HIC)

Les hémisphères cérébraux et cérébelleux étant contenus par de solides structures méningées dure-meriennes (faux du cerveau, tente du cervelet) au sein d'une boite crânienne inextensible, toute expansion de volume du parenchyme cérébral (du fait d'une tumeur, d'une hémorragie, d'un œdème, etc.) exerce une pression sur les récepteurs à la douleur situés dans les méninges, entraînant des céphalées. L'hyperpression gêne le retour veineux du nerf optique (d'où les symptômes visuels) et un cône de pression s'exerce vers les espaces où le parenchyme peut s'engager (entre le bord libre de la tente du cervelet et le mésencéphale : hernie de la partie interne du lobe temporal – engagement temporal – ou hernie de la tonsile cérébelleuse dans le foramen magnum).
L'HIC peut être due à un processus expansif intracrânien volumineux (tumeur, hémorragie, infarctus), à une dilatation ventriculaire aigue, à une thrombose veineuse cérébrale.
Le syndrome d'hypertension intra crânienne est une urgence vitale : l'engagement temporal non traité évolue vers la constitution d'hémorragies du tronc cérébral.

1. Symptômes

  • Céphalées
    • typiquement diffuses, « en casque », parfois localisées
    • souvent intenses, atroces (broiement, éclatement, …)
    • réveillant la nuit, notamment au petit matin (matutinales)
    • survenant par crises de plusieurs heures
    • accrues par le moindre effort (marche, rotation de la tête, toux)
    • peu sensibles aux antalgiques usuels
  • Vomissements
    • typiquement « en jet », au paroxysme de la céphalée,
    • mais inconstants (parfois seulement des nausées)
  • Troubles visuels
    • impression de flou ou de brouillard bilatérale
    • avec parfois des « éclipses visuelles » (le malade se retrouve dans le noir quelques secondes)
    • une diplopie par atteinte du VI (long et fragile) est possible

2. Signes cliniques

  • L'œdème papillaire est tardif (donc, inconstant) : à l'examen du fond d'œil (FO),
    • les bords de la papille optique sont flous
    • la papille elle-même est floue, avec des veines turgescentes
    • elle peut faire saillie et comporter des micro hémorragies.
    • en l'absence de traitement, une atrophie de la papille optique survient, irréversible.
  • Troubles de la vigilance
    • ralentissement de l'idéation
    • bâillements, somnolence
    • coma
  • D'autres signes peuvent exister, témoignant
    • soit d'un engagement temporal :
      • mydriase d'abord réactive puis aréactive à la lumière,
      • troubles de la vigilance : depuis la somnolence avec bâillements, jusqu'au coma.
    • soit de la lésion causale :
      • signes déficitaires (hémiparésie, aphasie, hémianopsie)
      • crises d'épileps

3. Examens complémentaires

L'imagerie cérébrale (scanner ou IRM) montre la lésion causale et ses conséquences : effet de masse (engagement sous la faux du cerveau, déplacement de la ligne médiane, effacement des sillons et des ventricules, engagement temporal sur les coupes coronales). Il s'agit parfois d'une hydrocéphalie aigue (dilatation des ventricules lorsqu'une lésion fait obstacle à l'écoulement du liquide céphalo-rachidien).