I. Syndrome rolandique

1. Rappel anatomique

Le sillon de Rolando, ou scissure centrale, sépare la circonvolution frontale ascendante (F.A. ou gyrus précentral) de la circonvolution pariétale ascendante (P.A. ou gyrus postcentral).
Ce cortex primaire comporte l'aire somatomotrice (F.A., dont les neurones constituent une grande partie de l'origine de la voie corticospinale ou faisceau pyramidal, destinée à l'hémicorps controlatéral) et l'aire somatosensitive (P.A., dont les neurones reçoivent les afférences sensitives thalamiques de l'hémicorps controlatéral).
Il existe une somatotopie (homonculus) telle que les territoires de la face et de la main sont surreprésentés et siègent dans la partie inférieure de ces gyri à la face externe de l'hémisphère (opercule rolandique) et les territoires du membre inférieur à la face interne de l'hémisphère (lobule paracentral).

2. Sémiologie

  • Déficit moteur (ou trouble de la commande volontaire)
    • Hémiplégie controlatérale, souvent à prédominance brachiofaciale (quand la lésion touche la face externe), parfois à prédominance crurale (au membre inférieur), quand la lésion atteint le lobule paracentral à la face interne du cerveau.
    • Paralysie faciale centrale, quand la lésion est limitée à l'opercule rolandique. Il existe une dissociation automatico volontaire (déficit à la commande volontaire, pas de déficit lors des mouvements automatiques, comme le rire).
    • Syndrome pseudo bulbaire quand il y a une lésion des deux opercules rolandiques (rare).
    • Paraplégie en cas de lésion comprimant les deux lobules paracentraux (rare)
  • Déficit sensitif de l'hémicorps controlatéral, à tous les modes, à prédominance brachiofaciale (parfois cheiro orale : main et bouche).
  • Le déficit est souvent sensitivo moteur (car la cause la plus fréquente est ischémique : nécrose vasculaire dans le territoire de l'artère sylvienne - cérébrale moyenne -, qui vascularise les gyri pré et post centraux). Quand la lésion déborde sur la partie postérieure de la troisième circonvolution frontale (pied de F3) dans l'hémisphère majeur, une aphasie de Broca est associée à l'hémiplégie sensitivo motrice.
  • Les crises d'épilepsie.
    • Crises bravais-jacksoniennes, avec leur progression topographique très particulière.
    • Crises motrices ou sensitives.

II. Syndrome parietal

Le lobe pariétal comporte le gyrus post central (fonctions sensitives) et d'autres structures, dites associatives car intégrant des fonctions cognitives.

  • Déficits sensitifs
    • Déficits sensitifs élémentaires (hypo ou anesthésies) hémicorporels controlatéraux.
    • L'extinction sensitive et l'astéréognosie se recherchent en l'absence de déficit sensitif élémentaire (ou seulement un déficit modéré) et quand elles existent sont très évocatrices d'une lésion pariétale (voir Sémiologie analytique : syndromes sensitifs )
  • Troubles du schéma corporel (voir Sémiologie analytique : troubles cognitifs : agnosies)
    • Hémisphère mineur : hémiasomatognosie.
      Plus rarement, on observe des illusions corporelles : phénomène de la main étrangère, le malade ne reconnaissant plus comme étant sienne sa main gauche, ou la percevant comme étant celle d'un étranger. Parfois il s'agit d'une impression de membre surnuméraire ou du sentiment d'absence d'un membre ou d'un segment de membre.
    • Hémisphère dominant : agnosie digitale, autotopoagnosie, indistinction droite/gauche.
  • Troubles visuo spatiaux
    • Quadranopsie inférieure controlatérale (atteinte des radiations optiques)
    • Négligence visuo spatiale (le malade néglige les objets ou les personnes situées dans son hémi espace, généralement le gauche chez les droitiers)
    • Perte de la mémoire topographique, parfois désorientation spatiale isolée.
  • Apraxies, gestuelle, constructive, de l'habillage (voir Sémiologie analytique : troubles cognitifs : apraxies)
  • Aphasie, de Wernicke (lésion du gyrus supramarginalis et du pli courbe, situés respectivement à la partie antérieure et à la partie postérieure de P2), de conduction (lésion du faisceau arqué) ou transcorticale sensorielle (voir Sémiologie analytique : troubles cognitifs : aphasies), agraphie.
  • Les crises épileptiques peuvent être
    • Partielles simples, somatosensitives, aphasiques
    • Partielles complexes

III. Syndrome occipital

La sémiologie est visuelle, simple (cortex primaire) ou complexe (cortex associatif).

  • Déficits visuels élémentaires :
    • Hémianopsie (ou quadranopise) latérale homonyme (HLH) controlatérale, par lésion de l'aire 17.
    • Cécité corticale (lésions bilatérales)
  • Déficits visuels complexes
    • Négligence visuelle ou visuo spatiale.
    • Agnosies visuelles : pour les objets, les couleurs, les visages, les lettres (alexie). Un syndrome alexie-agraphie peut s'observer dans certaines lésion occipito-pariétales.
  • Crises d'épilepsie, rares, simples (phosphènes) ou complexes (animaux, personnages, scènes).
  • Métamorphopsies (vision déformée des objets) et hallucinations visuelles (perceptions sans objets), peuvent se rencontrer dans des contextes pathologiques autres que l'épilepsie (aura migraineuse par exemple).

IV. Syndrome temporal

La sémiologie en est complexe, à l'image de l'hétérogénéité fonctionnelle de ce lobe.

  • L'aphasie de Wernicke est le principal signe d'atteinte du lobe temporal de l'hémisphère majeur.
    Elle résulte d'une lésion de la partie postérieure des deux premières circonvolutions temporales (T1, T2) et de la partie adjacente du lobe pariétal (gyrus supramarginal et pli courbe).
  • Agnosies auditives : pour les bruits, la musique (amusie), les mots (surdité verbale pure)
  • Quadranopsie latérale homonyme supérieure (par atteinte des radiations optiques à la profondeur du lobe)
  • Confusion mentale ou états dépressifs dans les lésions du lobe temporal droit.
  • Amnésies antérogrades lors d'atteintes des deux hippocampes.
  • Crises d'épilepsie
    • Simples, élémentaires (bruits, sons) ou élaborées (air de musique)
    • Complexes, d'une grande diversité.

V. Syndrome frontal

Les lésions du lobe frontal et des structures qui lui sont connectées, sont à l'origine d'une séméiologie d'une diversité et d'une complexité extrêmes. Ceci est lié à l'importance considérable de l'expansion du lobe frontal chez l'homme.

Un syndrome frontal peut résulter de lésions du lobe frontal lui-même ou de ses connections. Ces dernières peuvent être réparties en deux grandes catégories :

  • d'une part des connections sous-corticales, avec certains noyaux gris centraux (thalamus, noyau caudé, noyau lenticulaire) et le lobe limbique. Les lésions de ces structures peuvent réaliser un syndrome frontal par déconnexion.
  • d'autre part, le lobe frontal est en connexion avec l'ensemble du reste du cortex cérébral.

En clinique courante, deux difficultés se présentent :

  • méconnaître un syndrome frontal, quand il est peu important
  • le confondre avec une confusion mentale ou des troubles psychiatriques

Le syndrome frontal comporte trois grands types de troubles :

  • des troubles cognitifs, dits dysexécutifs.
  • des troubles psycho-comportementaux,
  • des troubles neurologiques, essentiellement moteurs.

1. Les troubles cognitifs

ayant été étudiés dans le chapitre « Sémiologie des fonctions cognitives » (Sémiologie analytique), seuls les troubles psycho comportementaux et les troubles moteurs seront abordés ici.

2. Les troubles moteurs

  • Troubles de la marche et de l'équilibre :l'astasie-abasie frontale comporte une marche à pas « collés au sol » ou impossible (abasie) et une tendance aux rétropulsions (astasie)
  • Réflexes archaïques
    • Le grasping réflexe est un réflexe cutané, présent chez le nouveau-né. Il consiste en une préhension soutenue sans arrêt de tout objet mis en contact de la paume de la main, ou de tout stimulus de celle-ci (habituellement la propre main de l'examinateur), alors même que la consigne est donnée de « lâcher ».
      Grasping réflexe
    • On en rapproche le sucking réflexe, lui aussi normalement présent chez le nouveau-né, consistant en une contraction de la commissure labiale, secondaire à une stimulation cutanée de celle-ci.
    • Le réflexe d'aimentation : la main (et parfois la bouche) du malade est irrépressiblement attirée par tout objet présenté dans le champ visuel.
      Réflexes d'aimantations, sucking réflexe
  • Un comportements d'imitationpeut s'observer : le malade imite les gestes et postures de l'examinateur, sans avoir été invité à la faire. On en rapproche les comportements d'utilisation : le malade utilise un objet qu'on lui présente sans consigne particulière.
  • Le réflexe pollico-mentonierest une contraction de la houppe du menton, en réponse à une stimulation de la base du pouce.
    Réflexe palmo-mentonnier
  • Déviation oculo-céphalique vers le côté de la lésion (par hyperactivité du centre oculo céphalique non lésé).
  • Troubles sphinctériens(incontinence urinaire, parfois aussi fécale)

3. Les troubles psycho comportementaux

comportent deux versants diamétralement opposés, parfois intriqués ou se succédant dans le temps chez un même patient.

  • Versant déficitaire. Inhibition
    • Il est caractérisé par une réduction quantitative et qualitative globale de l'activité psychique et du comportement : apragmatisme, adynamie, aboulie, perte de l'auto-activation psychique, perte de l'initiative, ralentissement idéatoire
    • Au maximum, c'est le mutisme akinétique, lié à des lésions frontales ou sous-corticales bilatérales, le malade étant mutique et ne bougeant que très peu ou pas du tout, restant confiné au fauteuil
    • A ce noyau déficitaire, s'ajoutent parfois des activités de type compulsif ou obsessionnel, comme le fait de compter sans interruption tous les objets de l'environnement (arithmomanie). Ces troubles obsessionnels compulsifs (« T.O.C. ») ne sont pas sans rappeler ce que l'on peut observer au cours des névroses obsessionnelles sévères.
    • Il y a également une indifférence affective, une perte des affects, parfois qualifiée d'athymormie
    • Contrairement aux états dépressifs ou mélancoliques, il n'y a pas de douleur morale perceptible.
  • Versant productif. Désinhibition
    • Euphorie niaise ou moria : l'humeur est joviale avec production de calembours ou de mauvais jeux de mots.
    • Impulsivité et troubles des conduites sociales. C'est la dimension sociopathique du syndrome
    • Hyperactivité inefficace et incohérente avec distractibilité et inattention
    • Hypersexualité, boulimie, urination (le malade urine dans des lieux inappropriés)
    • Ce versant productif n'est pas sans rappeler la séméiologie de certains états maniaques observés en psychiatrie.

En dehors de ces manifestations (et des troubles moteurs déficitaires et cognitifs) on peut observer, lors de lésions frontales, une anosmie (par atteinte des bulbes olfactifs) et des crises d'épilepsie, simples (crises adversives) ou complexes, défiant toute description.