Vous voyez en consultation Mme G. âgée de 49 ans amenée par son époux pour des troubles psycho-comportementaux.

Elle n’a pas d’antécédent personnel. Vous notez une fin de vie difficile pour son père avec troubles psycho comportementaux alors qu’il était en fauteuil roulant (on aurait parlé de la maladie de Charcot). Son frère plus âgé aurait des difficultés à marcher et serait en cours de bilan neurologique.

Mme G. vous regarde avec un grand sourire et vous explique que tout va bien. Son mari raconte qu’il vit un enfer depuis plusieurs mois. Son épouse institutrice en maternelle n’arrive plus à gérer sa classe. Elle ne parvient pas à organiser l’enseignement et à même frappé des enfants si bien que des demandes de confrontation sont en cours avec des parents. A la maison, le mari note de nombreux oublis, des passages de coq à l’âne, une impatience importante nouvelle (elle ne peut plus coudre ou lire car se désintéresse vite). Ses amis se sont éloignés car elle est devenue plus franche avec de nombreuses remarques déplacées. Le mari note aussi une négligence physique puisqu’elle ne se maquille plus et ne change que très rarement ses habits. Il décrit aussi une prise de 10 kg sur un an car elle mange sans cesse des gâteaux alors qu’elle mangeait peu de sucré par le passé. L’autonomie est grandement altérée.

L’examen clinique ne retrouve pas d’anomalie.

L’examen neuropsychologique retrouve un syndrome dysexécutif comportemental et cognitif, un ludisme important et beaucoup de triche durant les passations. La mémoire est conservée, il n’y a pas de trouble instrumental. Elle n’a malheureusement pas pu être explorée sur le plan orthophonique.

 

Voici une IRM cérébrale et un PET-Scanner.

 

Que dire de l’imagerie ? Quel est le diagnostic neuropsychologique ? Quel diagnostic plus général peut-on proposer ?

Atrophie frontale sur l’IRM avec hypométabolisme antérieur marqué, démence fronto-temporale, tableau de mutation C9ORF72

 

La démence frontotemporale (DFT) fait partie du groupe des dégénérescences lobaires fronto temporales (DFT, DCB, PSP, APP non fluente et sémantique). Ici, le tableau clinique remplit les critères cliniques de DFT possible selon Rascovsky, soit au moins 3 critères parmi :

  • Désinhibition comportementale précoce,
  • Apathie/inertie précoce,
  • Perte de sympathie ou d’empathie précoce,
  • Comportement persévératif, stéréotypé ou compulsif/obsessionnel précoce,
  • Hyperoralité et changement des habitudes alimentaires,
  • Profil neuropsychologique (déficit exécutif, préservation mémoire épisodique et fonctions visuo spatiales).

Le diagnostic devient probable car aux critères cliniques de DFT possible s’ajoute un déclin fonctionnel significatif et des résultats d’imageries concordants (IRM et PET).

L’histoire familiale permettra probablement de passer en stade certain puisqu’elle semble orienter vers une mutation C9ORF72.

 

On estime à 40% l’origine génétique des DFT. Cela motive la recherche systématique d’une histoire familiale. La mutation C9ORF72 est finalement de description récente mais probablement la plus fréquente. Elle doit systématiquement être évoquée dans une histoire familiale mêlant DFT et SLA.

 

Bibliographie :

 

Rascovsky K, Hodges JR, Knopman D, Mendez MF, Kramer JH, Neuhaus J, et al. >Sensitivity of revised diagnostic criteria for the behavioural variant of frontotemporal dementia. Brain [Internet] 2011;134(9):2456–2477

 

De Jesus-Hernandez M.Mackenzie IR, Boeve BF et al.Expanded GGGGCC hexanucleotide repeat in noncoding region of C9ORF72 causes chromosome 9p-linked FTD and ALS. Neuron 2011;72(2):245-56.

 

Renton AE, Majounie E, Waite A et al. A hexanucleotide repeat expansion in C9ORF72 is the cause of chromosome 9p21-linked ALS-FTD. Neuron 2011;72(2):257-68.