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Chapitre 9 : Sémiologie des nerfs crâniens

Grégoire Pin 

 

Les nerfs crâniens prennent leur origine ou se terminent dans l'encéphale. On décrit 12 paires de nerfs crâniens :

  • nerf I : nerf olfactif ;
  • nerf II : nerf optique ;
  • nerf III : nerf oculomoteur commun ;
  • nerf IV : nerf trochléaire (anciennement nerf pathétique) ;
  • nerf V : nerf trijumeau ;
  • nerf VI : nerf abducens (anciennement nerf moteur oculaire externe) ;
  • nerf VII : nerf facial ;
  • nerf VIII : nerf cochléovestibulaire ;
  • nerf IX : nerf glossopharyngien ;
  •  nerf X : nerf vague (anciennement nerf pneumogastrique) ;
  • nerf XI : nerf accessoire (ou nerf spinal) ;
  • nerf XII : nerf hypoglosse.

Sémiologie de l'olfaction

Le système olfactif est constitué par un appareil récepteur situé dans la muqueuse pituitaire ; les fibres nerveuses qui en partent gagnent le bulbe olfactif où elles font relais, puis gagnent le cortex cérébral.
L'interrogatoire doit s'attacher à préciser les circonstances de survenue du trouble olfactif, ses caractéristiques et son importance. On peut observer quatre types d'atteinte :

  • une diminution de l'odorat (hyposmie) qui peut aller jusqu'à la perte de l'odorat (anosmie). Il faut signaler qu'une perte de l'olfaction est habituellement ressentie par le patient comme une perte de goût : en effet, le goût des aliments est presque uniquement l'odeur qu'ils ont en passant dans la partie postérieure de la cavité buccale ;
  • une exagération de la perception olfactive (hyperosmie), plus rarement observée ;
  • une distorsion de l'odorat (cacosmie), où le patient se plaint de confondre les odeurs qui ont alors souvent une tonalité désagréable ;
  • des perceptions olfactives sans objet ou hallucinations olfactives qui peuvent se rencontrer dans certaines formes d'épilepsie.

L'olfaction peut s'explorer de manière qualitative en présentant au sujet, dont les yeux sont fermés, différentes odeurs (lavande, ail, menthe, etc.) et en lui demandant de les reconnaître. L'étude quantitative par olfactométrie apporte des renseignements plus précis.

Sémiologie de la vision

L'œil transmet les stimuli lumineux à la rétine qui comprend deux types de récepteurs : les cônes et les bâtonnets. Les cônes assurent la vision centrale, au niveau de la macula, et sont capables de discriminations très fines. Les bâtonnets assurent la vision périphérique, moins discriminante mais plus sensible aux faibles éclairements.
Les deux nerfs optiques (nerfs II) émergent des globes oculaires près de leur pôle postérieur et convergent vers la région suprahypophysaire où ils forment le chiasma optique. Le chiasma optique est une formation importante car les fibres nerveuses en provenance des deux hémirétines nasales s'y entrecroisent et gagnent le tractus optique, encore appelé bandelette optique controlatérale (figure 9.1). En revanche, les fibres nerveuses en provenance des deux hémirétines temporales gagnent le tractus optique homolatéral. En arrière du chiasma optique, les tractus optiques rejoignent les corps géniculés latéraux et ils y font relais. Les radiations optiques vont des corps genouillés latéraux (CGL) au cortex occipital homolatéral où elles se terminent.

 

 

Figure 9.1 
Organisation anatomofonctionnelle des voies visuelles.
© Ader J.L. et al. Physiologie. Collection « Abrégés PCEM », 2e éd. Paris : Masson ; 2006.

Acuité visuelle

On désigne sous le terme d'acuité visuelle le pouvoir qu'a l'œil de distinguer deux points plus ou moins distants. On utilise parfois le terme de pouvoir discriminatif. Pour évaluer l'acuité visuelle, on peut utiliser :

  • une échelle de loin (5 m), l'échelle de Monoyer, avec un score maximal de 10/10e ;
  • pour la vision de près, l'échelle de Parinaud.

Le terme amblyopie désigne toute diminution de l'acuité visuelle. Celui d'amaurose fait référence à l'absence de toute perception lumineuse monoculaire et/ou transitoire. On réserve le terme de cécité pour désigner une absence définitive et complète de vision d'un ou des deux yeux. Le terme dyschromatopsie fait référence à un trouble de la perception des couleurs.
En cas de neuropathie optique, on peut constater une baisse d'acuité visuelle d'intensité variable, parfois sévère et un déficit pupillaire afférent relatif : l'éclairement alterné des pupilles, dans des conditions d'obscurité, s'accompagne d'une dilatation pupillaire paradoxale du côté atteint. Des douleurs rétro-oculaires sont aussi fréquentes, majorées à la mobilisation des globes oculaires.

Champ visuel

Son étude permet d'évaluer le fonctionnement de la rétine fonctionnelle centrale mais aussi périphérique, et celui des voies optiques. Elle est pratiquée séparément pour chaque œil, chez un sujet qui fixe un point donné, en déterminant les limites spatiales dans lesquelles les objets sont vus. On peut par exemple se placer face au patient, en lui demandant de fixer le nez de l'examinateur. On place ses deux index latéralement, un peu en avant du plan du patient qui reçoit pour consigne de saisir le doigt qui bouge. Chez une personne incapable de coopérer, on étudie le réflexe de clignement à la menace en approchant rapidement une main de chacun de ses yeux.
Le terme d'hémianopsie désigne la perte de vision dans une moitié du champ visuel ; le trouble affecte habituellement un hémichamp visuel au niveau des deux yeux.
Les hémianopsies altitudinales sont rares : le sujet ne voit pas l'hémichamp supérieur ou inférieur. Dans les hémianopsies latérales, la limite entre les deux hémichamps (celui qui est vu et celui qui ne l'est pas) est verticale :

  • dans l'hémianopsie latérale homonyme (HLH), l'atteinte affecte les deux hémichamps droit ou gauche ; ainsi dans l'HLH droite, sont atteints l'hémichamp temporal de l'œil droit et l'hémichamp nasal de l'œil gauche, et inversement pour l'HLH gauche. L'HLH traduit donc une lésion rétrochiasmatique. Lorsque l'hémianopsie se limite à l'atteinte d'un quadrant, on parle de quadranopsie, signifiant plutôt une lésion des radiations optiques. En cas d'atteinte du faisceau ventral ou inférieur, la quadranopsie est supérieure et en cas d'atteinte du faisceau supérieur, la quadranopsie est inférieure ;
  • dans l'hémianopsie bitemporale, le patient ne perçoit pas les deux hémichamps temporaux (il a des « œillères »). Cela traduit une atteinte du chiasma optique et des fibres qui proviennent des deux hémirétines nasales ;
  • dans l'hémianopsie binasale, le patient ne voit pas les deux hémichamps nasaux (il a un « poteau » devant le nez).

Les scotomes sont des lacunes affectant le champ visuel central ; elles correspondent à des atteintes du faisceau maculaire et entraînent donc une baisse précoce et importante de l'acuité visuelle : la lecture est très vite impossible, alors que la vision périphérique est relativement conservée.
Le rétrécissement périphérique du champ visuel peut être tubulaire, c'est-à-dire que le champ visuel restant a la même largeur quelle que soit la distance : ceci est évocateur de trouble neurologique fonctionnel. Si le rétrécissement est concentrique, c'est-à-dire que le champ visuel restant s'élargit en fonction de la distance, il faut évoquer un trouble organique (comme une atrophie du nerf optique).
La cécité corticale est en fait une double hémianopsie à laquelle s'ajoute souvent une anosognosie (le patient semble négliger son trouble). Cela se rencontre habituellement sur des lésions corticales occipitales bilatérales. Le réflexe photomoteur est conservé.
L'agnosie visuelle est un trouble où le patient ne reconnaît pas visuellement un objet qui lui est présenté ; en revanche il est capable de l'identifier par la palpation. Ce trouble est en lien avec une atteinte des cortex occipitotemporaux (cf. chapitre 10).

Sémiologie de la motilité oculaire

La motilité oculaire est assurée par trois nerfs crâniens, à savoir le nerf III qui innerve l'ensemble des muscles oculomoteurs, à l'exception du muscle grand oblique innervé par le nerf IV et du muscle droit latéral innervé par le nerf VI.
Les noyaux de ces nerfs se trouvent dans le tronc cérébral et reçoivent une commande centrale, donc supranucléaire (au niveau des centres frontaux et occipitaux) et sont connectés entre eux par des fibres nerveuses qui assurent le déplacement parallèle des globes oculaires : le faisceau longitudinal médian qui relie les noyaux du III et du VI.
On distingue donc des paralysies oculomotrices (ou ophtalmoplégies) :

  • nucléaires (atteinte des noyaux oculomoteurs) ou tronculaires (atteinte du tronc nerveux) ;
  • supranucléaires (atteinte des centres de commande oculomotrice) ;
  • internucléaires (atteinte du faisceau longitudinal médian).

Atteinte nucléaire ou tronculaire

Le patient se plaint d'une diplopie (vision dédoublée des objets) ou seulement d'une vision trouble dans les formes mineures. La première étape est de lui demander si cette vision double disparaît lorsqu'il ferme un œil, pour confirmer qu'il s'agit bien d'une diplopie binoculaire par atteinte oculomotrice.
On demande ensuite au patient dans quelle direction du regard il voit double : soit la diplopie est horizontale (deux objets côte à côte), traduisant une atteinte du VI, soit elle est verticale ou oblique (deux objets l'un au-dessus de l'autre), traduisant une atteinte du III ou du IV.
À l'examen clinique, on note une déviation du globe oculaire (strabisme), une limitation de sa course lors de la commande volontaire ou de la poursuite automatique du doigt de l'examinateur (ou d'un objet). Ces signes cliniques peuvent faire défaut ou être très discrets.

  • L'atteinte du noyau ou du tronc du III provoque un ptosis (chute de la paupière supérieure), une impossibilité de porter l'œil atteint en haut, en dedans ou en bas, un strabisme externe (c.-à-d. une déviation du globe oculaire vers l'extérieur). En cas d'atteinte des fibres intrinsèques qui innervent la pupille, on observe une mydriase (dilatation pupillaire) qui peut être réactive à la lumière ou aréactive. On parle d'oculomotricité intrinsèque pour l'innervation pupillaire et d'oculomotricité extrinsèque pour l'innervation des muscles oculomoteurs. L'atteinte du III peut être complète (tous ces signes sont présents) ou incomplète (dissociée, seulement extrinsèque ou intrinsèque).
  • L'atteinte du noyau ou du tronc du IV est plus rare et donne une diplopie dans le regard interne vers le bas (lorsque le malade lit ou descend les escaliers). Elle donne parfois une inclinaison compensatoire de la tête vers l'épaule du côté sain qui peut être douloureuse (« torticolis oculaire »).
  • L'atteinte du noyau ou du tronc du VI se traduit par un strabisme interne (œil paralysé en adduction) et une abduction oculaire qui est alors impossible.

À noter qu'il existe des diplopies par atteinte de la jonction neuromusculaire (dans le cadre d'un syndrome myasthénique par exemple).

Atteinte ou paralysie supranucléaire

Ce sont alors les fonctions qui sont atteintes et il n'y a pas de diplopie. On distingue :

  • les paralysies de la latéralité du regard (les plus fréquentes) qui s'observent dans les atteintes hémisphériques ou du tronc cérébral. Dans les atteintes hémisphériques, elles associent une déviation de la tête et des yeux vers la lésion hémisphérique et une hémiplégie controlatérale (on dit que le patient « se détourne » de son hémiplégie) ;
  • les paralysies de la verticalité (syndrome de Parinaud) sont liées à une atteinte de la partie haute du mésencéphale (pédoncule cérébral) et comportent également une paralysie de la convergence.

Atteinte ou paralysie internucléaire

Cette paralysie traduit une atteinte du faisceau longitudinal médian qui relie les noyaux du III et du VI. Dans le regard latéral, l'œil en abduction est animé d'un nystagmus tandis que l'autre œil ne passe pas la ligne médiane (figure 9.2). La convergence reste en revanche possible, ce qui traduit une intégrité des noyaux du III.

 

 

Figure 9.2 
Ophtalmoplégie internucléaire gauche.

En cas d'ophtalmoplégie internucléaire gauche par lésion du faisceau longitudinal médian gauche (FLM), l'œil gauche ne peut pas réaliser de mouvement d'adduction. Il existe un nystagmus de l'œil droit en abduction. La convergence est préservée.
© Espinasse-Berrod M.-A. Strabologie – Approches diagnostique et thérapeutique, 3e édition. Paris : Elsevier-Masson ; 2018.

Atteinte de la motilité oculaire intrinsèque

  • Dans le réflexe photomoteur, une lumière vive projetée directement sur l'œil examiné, l'autre étant à l'abri de la lumière, provoque une contraction brusque de la pupille (réflexe direct) et aussi une contraction pupillaire de l'œil controlatéral non éclairé (réflexe consensuel).
  • Les modifications de calibre de la pupille sont d'une importance clinique considérable. En cas d'asymétrie du diamètre pupillaire entre les deux yeux, on parle alors d'anisocorie. Une contraction pupillaire ou myosis peut s'observer au cours du syndrome de Claude Bernard-Horner qui associe un myosis, ptosis (chute de la paupière supérieure) et énophtalmie (recul du globe oculaire dans l'orbite). Ce syndrome se rencontre en cas d'atteinte des fibres nerveuses sympathiques à un niveau quelconque de leur trajet (ex : envahissement sympathique par une tumeur de l'apex pulmonaire associé à une douleur du territoire C8-T1 ou syndrome de Pancoast-Tobias). Une dilatation pupillaire ou mydriase est la conséquence d'une atteinte des fibres parasympathiques qui cheminent avec la IIIe paire crânienne et peut être le premier signe d'un engagement temporal interne mettant alors en jeu le pronostic vital du patient (mydriase d'abord réactive, puis aréactive à la lumière).
  • Le signe d'Argyll-Robertson est défini par la perte du réflexe photomoteur et la conservation de la contraction pupillaire à l'accommodation-convergence. Il doit faire rechercher avant tout une étiologie syphilitique.

Sémiologie du nerf trijumeau (nerf V)

Pour la plus grande partie, la sensibilité de la face dépend du nerf trijumeau. Les exceptions sont la conque de l'oreille qui est innervée par le VIIbis et la partie postérieure du cuir chevelu qui est innervée par les nerfs issus de la moelle cervicale. Le nerf trijumeau reçoit les filets de la sensibilité de la langue, des muqueuses nasales, jugales et du palais : il n'intervient cependant pas dans la sensation gustative. Les trois branches du trijumeau comprennent :

  • la branche V1 ou nerf ophtalmique qui assure notamment la sensibilité cornéenne ;
  • la branche V2 ou nerf maxillaire ;
  • la branche V3 ou nerf mandibulaire (anciennement nerf maxillaire inférieur).

Les trois faisceaux du trijumeau entrent dans le crâne par les trous de l'étage moyen de la base du crâne et se réunissent au niveau du ganglion trigéminal (anciennement de Gasser) à la pointe du rocher (figure 9.3). De là, le nerf trijumeau rejoint, en passant par l'angle pontocérébelleux où il est en rapport étroit avec les nerfs VII et VIII, son noyau sensitif qui s'étend sur presque toute la hauteur du tronc cérébral. À signaler que le nerf trijumeau possède un petit contingent moteur qui innerve les muscles de la mastication : les muscles temporal, ptérygoïdien latéral et médial, et masséter.

  • L'anesthésie cornéenne est importante à rechercher et constitue un bon signe d'atteinte trigéminale. Le sujet ne perçoit pas le contact du coton sur la cornée et le réflexe cornéen est aboli du côté de l'atteinte.
  • La névralgie du trijumeau est une douleur fulgurante survenant par crises dans le territoire sensitif du trijumeau. La douleur est brève, atroce, parfois provoquée par le fait de toucher un point précis de la face (on parle de zone gâchette). Cette affection est soit « essentielle », souvent due à un conflit vasculonerveux (boucle artérielle autour de la racine du nerf), soit « symptomatique », sur des lésions du noyau ou du nerf (inflammatoire – sclérose en plaques, tumeurs).

 

 

Figure 9.3 
Territoires sensitifs du nerf trijumeau.
© CFORL. ORL, 4e édition. Paris : Elsevier-Masson ; 2017.

Sémiologie du nerf facial (nerf VII)

Le nerf facial présente tout à la fois des fonctions motrice, végétative, sensitive et sensorielle :

  • sa principale fonction est d'assurer l'innervation motrice de tous les muscles peauciers de la face et du cou. Il innerve également le muscle stapédien de l'oreille moyenne ;
  • la fonction végétative est sécrétoire (glandes lacrymales et salivaires) et passe par le nerf grand pétreux et la corde du tympan ;
  • la fonction sensitive est limitée à la peau de la conque de l'oreille (zone de Ramsay-Hunt), et s'exerce via le nerf intermédiaire (ou VIIbis, anciennement nerf de Wrisberg) ;
  • la fonction sensorielle est gustative : toujours via le nerf intermédiaire, le nerf facial assure la sensation du goût des deux tiers antérieurs de la langue. La gustation du tiers postérieur de la langue est assurée par le nerf IX.

Depuis son émergence dans le pont, le VII chemine dans l'angle pontocérébelleux près du V et du VIII, puis dans le méat acoustique interne avec le VIII ; puis il traverse le rocher d'où il sort par le foramen stylomastoïdien. Enfin, il traverse la parotide dans laquelle il se divise en contingents facial supérieur et facial inférieur. Comme tous les nerfs périphériques, le nerf facial est soumis au contrôle central du faisceau pyramidal.
Le noyau du nerf facial est double : la partie supérieure est à l'origine des fibres du contingent facial supérieur et reçoit des afférences pyramidales bilatérales. En revanche, la partie inférieure reçoit des afférences pyramidales unilatérales. De ce fait, l'atteinte unilatérale du faisceau pyramidal (lors d'un AVC [accident vasculaire cérébral] par exemple) provoque une atteinte motrice qui prédomine sur le territoire facial inférieur. L'atteinte du nerf facial entre son noyau et sa bifurcation dans la carotide provoque une paralysie faciale périphérique.

La paralysie faciale périphérique se traduit par une disparition de la motilité d'une hémiface : elle touche autant la partie supérieure que la partie inférieure du visage. Ainsi, de haut en bas, on constate que :

  • les rides sont effacées du côté atteint ;
  • le malade ne peut pas fermer l'œil (orbiculaire de l'œil innervé par le VII) et lorsqu'il tente de le faire, son globe oculaire se dirige normalement vers le haut et en dehors ; de ce fait, la non-occlusion palpébrale laisse apparaître un œil blanc (signe de Charles Bell). Les cils apparaissent plus longs du côté paralysé au cours d'une fermeture forcée des paupières, c'est le signe des cils de Souques ; il n'y a pas de clignement des yeux à la menace ;
  • le pli nasogénien ou nasolabial est effacé du côté atteint ;
  • la bouche est attirée du côté sain ;
  • lors de l'ouverture contrariée de la bouche, on voit se contracter le muscle peaucier du cou d'un seul côté (signe du peaucier du cou) ;
  • il existe parfois une hyperacousie douloureuse avec abolition du réflexe stapédien (atteinte en amont de l'émergence du nerf du muscle stapédien).

Dans quelques cas rares, la paralysie faciale est bilatérale : diplégie faciale, de diagnostic parfois difficile (mais signe de Charles Bell bilatéral).
L'orientation étiologique se fait en suivant le trajet du nerf :

  • si l'atteinte siège dans l'angle pontocérébelleux, le V et le VIII sont atteints ;
  • si l'atteinte siège dans la parotide, il n'y a pas d'autre atteinte nerveuse et souvent une tumeur parotidienne ;
  • les atteintes du nerf facial dans le rocher résultent souvent d'un traumatisme crânien.

La cause la plus fréquente de paralysie faciale périphérique reste la paralysie faciale a frigore, dont l'étiologie semble être liée à une réactivation virale.
La paralysie faciale centrale se différencie de la paralysie faciale périphérique par trois points (figure 9.4) :

  • elle prédomine sur le territoire facial inférieur et il n'y a pas de signe de Charles Bell ;
  • il existe une dissociation automaticovolontaire : la motricité volontaire est impossible mais en revanche on voit parfois survenir une contraction normale de l'hémiface paralysée lors du rire ou lors d'une émotion ;
  • enfin, elle s'accompagne souvent d'une atteinte pyramidale du reste du corps, c'est-à-dire d'une hémiplégie.

 

 

Figure 9.4 
Paralysie faciale périphérique (A) vs paralysie faciale centrale (B).
© Alastair Innes J, Dover AR, Fairhurst K. Examen clinique et sémiologie – MacleodInterrogatoire
 et examen clinique, sémiologie par appareil, situations particulières. Paris : Elsevier-Masson ; 2019.

Sémiologie du système vestibulaire

L'audition et la fonction vestibulaire sont assurées par le nerf VIII. La sémiologie du système vestibulaire est abordée chapitre 8.

Sémiologie des nerfs IX, X, XI et XII

Nerfs mixtes (nerfs IX, X et XI)

Les nerfs IX (glossopharyngien), X (vague) et XI (accessoire ou spinal), appelés aussi les nerfs mixtes, innervent avant tout les muscles de la déglutition et de la phonation. Ces trois nerfs sont souvent atteints ensemble, par leurs noyaux dans le bulbe.
Leur atteinte se traduit par :

  • des troubles de déglutition exposant au risque de fausses routes alimentaires et donc de pneumopathie d'inhalation ;
  • des troubles de la phonation, les muscles laryngés et la corde vocale étant innervés par le nerf laryngé récurrent provenant du X. Une voix nasonnée par atteinte du voile du palais peut aussi se rencontrer ;
  • un signe du rideau : on demande au sujet de prononcer la lettre A et on regarde le mouvement du voile du palais. Dans les paralysies unilatérales du IX, une moitié seule du voile se lève et attire l'autre moitié : la paroi postérieure du pharynx se déplace latéralement vers le côté sain comme un rideau qui se ferme ;
  • le réflexe nauséeux est aboli du côté de la paralysie mais il n'a qu'une valeur relative en raison de la grande variabilité de cette réponse chez les sujets normaux.

L'atteinte de ces nerfs est parfois isolée :

  • la névralgie du glossopharyngien est très rare ; la douleur est alors provoquée par la déglutition. Elle évolue par périodes et accès paroxystiques de façon comparable à la névralgie du trijumeau ;
  • l'atteinte du X entraîne une dysphonie avec voix bitonale, avec à l'examen laryngoscopique une paralysie de la corde vocale du côté atteint en adduction. Les fonctions végétatives du nerf vague sont très importantes puisqu'il innerve les muscles lisses de l'appareil cardiovasculaire pour lequel il est bradycardisant et hypotenseur, de l'appareil bronchopulmonaire et de l'appareil digestif ;
  • l'atteinte du nerf XI entraîne une paralysie unilatérale du muscle sterno-cléido-mastoïdien et du trapèze : faiblesse de la rotation de la tête vers le côté sain (mieux appréciée lors du mouvement contrarié) et faiblesse de l'élévation de l'épaule.

Nerf hypoglosse (nerf XII)

C'est le nerf moteur de la langue. La paralysie unilatérale entraîne peu de gêne fonctionnelle notable mais l'examen permet de noter :

  • une déviation de la langue vers le côté paralysé lors de la protraction linguale (le nerf « pousse » la langue et le côté sain est le seul à pousser) ;
  • une déviation de la langue vers le côté sain lorsque la langue repose sur le plancher de la bouche.

Lors des atteintes sévères, une atrophie de l'hémilangue avec fasciculations peut s'observer.
Les paralysies bilatérales du XII entraînent en revanche une gêne fonctionnelle importante (pour la mastication, la déglutition, la phonation) et la motilité de la langue est alors complètement abolie.

  • L'hémianopsie latérale homonyme traduit une lésion en arrière du chiasma optique alors que l'hémianopsie bitemporale traduit une atteinte chiasmatique.
  • La paralysie faciale centrale prédomine sur le territoire facial inférieur et s'accompagne souvent d'une hémiparésie homolatérale. La paralysie faciale périphérique touche autant le territoire facial supérieur que celui du facial inférieur.
  • Devant toute diplopie, la première étape est de déterminer s'il s'agit d'une diplopie binoculaire (= disparaît à la fermeture de l'un ou de l'autre œil) ou monoculaire (= disparaît à l'occlusion de l'œil atteint et persiste à l'occlusion de l'œil sain).
  • L'atteinte du noyau ou du tronc du III peut donner de manière complète ou incomplète : un ptosis, un strabisme externe, une limitation des mouvements oculaires en dedans, en haut et en bas, et une mydriase par atteinte de la motilité pupillaire intrinsèque.
  • Le nerf V est un nerf sensitif et moteur pour les muscles de la mastication (muscle temporal, ptérygoïdien médial et latéral, masséter).
  • Le syndrome vestibulaire périphérique comporte des vertiges souvent intenses et des signes cochléaires (hypoacousie, acouphènes) et est dit harmonieux.
  • Le syndrome vestibulaire central (atteinte des noyaux vestibulaires) comporte une instabilité plutôt qu'un vertige, s'accompagne souvent de signes neurologiques sans signe cochléaire et est dit dysharmonieux.

Voir QRM chapitre 32.